À Detroit, l’industrie automobile montre patte blanche à Trump

Mis sous pression par Donald Trump, les grands groupes automobiles ont montré patte blanche lundi au salon de Detroit en vantant leurs investissements aux États-Unis par crainte d’être pris en grippe par le président américain désigné.
Parti en guerre contre les délocalisations, M. Trump s’en est récemment pris aux grands noms de l’automobile mondiale et son ombre plane sur la 29e édition de la grand-messe du secteur, qui s’est ouverte dans la ville du Michigan. M. Trump, qui succédera à Barack Obama le 20 janvier, veut contraindre les groupes automobiles présents sur le sol américain à freiner leurs délocalisations vers le Mexique où de nombreuses usines ont été ouvertes lors de la dernière décennie grâce à l’accord de libre-échange ALENA.
Face à la pression, l’industrie automobile allemande a tenu à souligner à Detroit qu’elle avait « quadruplé [sa] production aux États-Unis entre 2009 et 2016, de 214 000 à 850 000 », selon Matthias Wissmann, le président de la fédération allemande de l’automobile VDA, qui regroupe notamment Daimler, BMW et Volkswagen. « C’est un engagement clair envers les États-Unis en tant que base industrielle », a estimé M. Wissmann, prenant toutefois le contre-pied de M. Trump en assurant qu’»il serait habile de ne pas remettre en question l’absence de taxes à l’importation au sein de l’ALENA ».
S’il s’en est déjà pris aux américains General Motors et Ford ainsi qu’au japonais Toyota, Donald Trump, élu sur la promesse de ramener des emplois industriels aux États-Unis, n’a pas encore attaqué un constructeur allemand.
Main tendue
Sur la sellette, Ford et Fiat-Chrysler ont, eux, déjà choisi de lui tendre la main, le premier en annulant un investissement de 1,6 milliard de dollars au Mexique et le second en rapatriant aux États-Unis la production d’une camionnette à plateau et en annonçant la création de 2000 emplois. Toyota a également annoncé un investissement de 10 milliards de dollars aux États-Unis dans les cinq prochaines années. « On y est enfin arrivé », s’est félicité M. Trump dans un tweet lundi. « Merci Ford et Fiat ! »
Absent du Mexique, le constructeur suédois Volvo, dont l’actionnaire principal est chinois, vante pour sa part son installation à Charleston (Caroline du Sud) où il va commencer à produire la prochaine génération de berlines moyennes S60 en 2018.
Première usine de Volvo en Amérique du Nord après celles de Suède et de Chine, ce site devrait exporter la moitié de sa production, mettant ainsi en valeur le « Made in America » cher à Donald Trump.
« Je lui suis reconnaissant de cette réaction », a indiqué le p.-d.g. de Fiat-Chrysler, Sergio Marchionne, en soulignant qu’il serait « irresponsable » d’investir davantage au Mexique dans la situation actuelle. De son côté, le président du conseil d’administration de Ford, Bill Ford, a salué en M. Trump quelqu’un de « très accessible ».
Le p.-d.g. de Renault-Nissan, Carlos Ghosn, a quant a lui estimé lundi que les ambitions de M. Trump et des contraintes des constructeurs étaient « compatibles. Ce que nous entendons jusqu’ici de l’administration Trump, c’est “ l’Amérique d’abord, des emplois aux États-Unis”. Ce que vous entendez de notre part, c’est “ pas de risques liés aux changes ” […] ce qui veut dire construire aux Etats-Unis ce que nous vendons aux États-Unis », a-t-il démontré.
Volkswagen
La veille, Volkswagen (VW) avait essayé d’amadouer M. Trump en s’engageant à produire ses futurs véhicules électriques aux États-Unis. Le groupe aux douze marques pourrait agrandir les capacités de son usine de Chattanooga (Tennessee) où Volkswagen emploie jusqu’à 3200 personnes. Mais VW, qui s’est évertué lundi à présenter une vision d’un retour en grâce auprès des consommateurs américains avec de nouveaux 4x4 urbains et un prototype électrique aux lignes proches de son légendaire Combi, a été rattrapé par le « dieselgate ».
Le salon ouvrira ses portes au public samedi après cinq jours dédiés aux professionnels et aux médias. Côté nouveautés, Ford a joué sur la nostalgie en ressuscitant deux de ses noms les plus mythiques : le petit pick-up Ranger et le 4x4 Bronco.
Toyota, de son côté, a présenté une énième édition de sa berline moyenne Camry, valeur sûre du marché depuis 20 ans mais dont la prééminence a été contestée par la montée en régime des camionnettes, SUV et autres 4x4 urbains, qui représentent aujourd’hui plus de 60 % du marché américain, à la faveur de prix du carburant encore très bas aux États-Unis.