Malgré Trump, le monde des affaires fonce

Des militants écologistes protestent contre l'élection de Donald Trump en marge de la COP22 à Marrakech, au Maroc.
Photo: Mosa'ab Elshamy Associated Press Des militants écologistes protestent contre l'élection de Donald Trump en marge de la COP22 à Marrakech, au Maroc.

Entre Walmart qui se fixe des objectifs « basés sur la science », ExxonMobil qui réitère son appui à l’Accord de Paris et un regroupement de grandes multinationales qui somment Donald Trump de laisser le climato-scepticisme à la porte… la tournure des événements a ceci de particulier que le monde des affaires est aujourd’hui plus investi dans la lutte contre les changements climatiques que ne l’est celui qui s’apprête à occuper le Bureau ovale.

Trois jours après l’élection d’un candidat républicain qui décrit les changements climatiques comme un canular inventé par la Chine, la conférence climatique de Marrakech bat son plein et diverses voix s’élèvent pour décrire les actions en train d’être mises en oeuvre pour réduire la pollution atmosphérique. Et les messages qui doivent les accompagner.

« Le monde des affaires devrait réaffirmer publiquement que la construction d’une économie durable sur le plan environnemental est inévitable et irréversible, et que tout gouvernement américain convaincu du contraire hypothèque son économie et l’avenir de sa population », a écrit vendredi le président de BSR (Business for Social Responsability), Aron Cramer, sur son blogue. « Il devrait aussi dire clairement que les climato-sceptiques n’ont pas d’affaire au gouvernement américain. »

BSR, un collectif fondé il y a une vingtaine d’années, réunit aujourd’hui 250 poids lourds, dont les membres sont notamment Shell, Boeing, Hilton, Sony, Electrolux, Michelin, Unilever, Dow Chemical, le transporteur maritime Maersk et Visa. « Le débat est déjà terminé dans la plupart des entreprises : il est bien convenu que l’avenir des affaires doit être durable », a déclaré son président.

L’engagement des entreprises dans la lutte contre les changements climatiques augmente de façon constante depuis quelques années. La réticence initiale de plusieurs a graduellement cédé face au mouvement qui favorise le recours aux énergies renouvelables. En parallèle, un nombre grandissant de sociétés — sans compter des gouvernements et la Banque mondiale — souhaite la mise en place de systèmes de tarification du carbone de manière à ce que son usage soit pris en compte dans la chaîne des coûts.

La conférence de Marrakech, qui se termine le 18 novembre, offre une fenêtre nouvelle aux entreprises souhaitant diffuser ce message. Vendredi, le groupe familial Mars, un géant de 75 000 employés qui produisent les M M, la gomme Excel, les tablettes Snickers et diverses nourritures pour animaux, a exhorté les chefs d’État et la communauté d’affaires à tout faire pour atteindre les objectifs de l’accord climatique de Paris. Mars, qui veut complètement éliminer l’usage de combustibles fossiles d’ici 2040, a également profité de l’occasion pour annoncer la construction d’un troisième parc éolien, cette fois au Mexique.

Sans mentionner M. Trump, Mars a affirmé, dans un long communiqué, que « nous sommes à un important tournant dans l’histoire politique et économique, et nous devons absolument nous rallier afin de résoudre les immenses défis qui menacent la planète ».

La science pour seul phare

 

Le 4 novembre dernier, un autre géant, Walmart, a révélé qu’il va arrimer ses propres objectifs de réduction de GES aux objectifs établis par la science pour atteindre les cibles de l’Accord de Paris. La décision a été prise avec l’organisme Science Based Targets, dont les partenaires sont notamment l’ONU, World Wildlife Fund et le Carbon Disclosure Project, qui incite les sociétés à une plus grande transparence. À ce jour, 26 entreprises ont adopté des cibles « approuvées », dont Pfizer et Coca-Cola, et 170 autres, comme Carrefour et Xerox, ont pris des engagements.

De manière concrète, Walmart, le premier de son secteur à poser ce geste, veut réduire ses émissions de 18 % d’ici 2025. Déjà, le quart de son approvisionnement énergétique provient de source renouvelable. Elle vise 50 % d’ici 2025 et, à terme, 100 %. En plus, Walmart veut travailler avec ses fournisseurs pour réduire ses émissions d’un million de tonnes d’ici 2030, l’équivalent, selon la société, du retrait annuel de 211 millions de véhicules. Son président a dit que la société s’engage ni plus ni moins dans un « mouvement de confiance et de transparence ».

L’arrivée au pouvoir de M. Trump se fait dans un contexte où certains ténors de l’industrie pétrolière, bien qu’ils aient secrètement financé des lobbys antiscience, n’hésitent plus à se ranger du côté de la majorité. C’est ainsi que la vice-présidente des affaires gouvernementales d’ExxonMobil, Suzanne McCarron, a affirmé sur Twitter jeudi que l’Accord de Paris est « une étape importante » dans la lutte contre les changements climatiques.

Certains usagers lui ont répondu que la direction de l’entreprise devrait le répéter à M. Trump lors de leur première réunion.

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