Le débat de principe est clos, tranche Pierre Arcand

Le ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles, Pierre Arcand
Photo: Jacques Nadeau Le Devoir Le ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles, Pierre Arcand

Les cris des manifestants et les sondages d’opinion ne changeront rien aux grandes orientations du projet de loi sur les hydrocarbures, dont le principe est maintenant adopté, indique le ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles, Pierre Arcand.

À la veille de l’étude article par article du projet de loi 106, le ministre Arcand a fait savoir qu’il n’avait pas l’intention de reculer. « Une fois qu’on a adopté le principe, ce dont on parle pour l’avenir, c’est des règlements et de l’encadrement comme tel », a-t-il affirmé lors d’un discours prononcé dans le cadre de la conférence de l’Association pétrolière et gazière du Québec (APGQ).
 


Le principe du projet de loi a été adopté le 6 octobre dernier. Les libéraux et les caquistes ont voté pour, tandis que les péquistes et les solidaires se sont prononcés contre.

« Pétrolières, meurtrières »

« Je pense que [le projet de loi] est nécessaire, qu’il est pertinent. Notre gouvernement veut en faire le meilleur projet de loi qui découlera du plus large consensus possible », a poursuivi M. Arcand, avant de se faire interrompre quelques minutes plus tard par un manifestant en colère.

« Pétrolières, meurtrières ; ministre, complice », a scandé un jeune homme en veston et cravate qui a tenté de faire irruption dans la salle aux portes verrouillées, avant d’être maîtrisé par un agent de sécurité.

Le ministre Arcand a poursuivi son discours sans broncher, en faisant remarquer qu’un « large consensus » n’est pas synonyme d’« unanimité ». « Les gens ne s’obstinent pas sur le cadre comme tel, a-t-il ajouté en point de presse. C’est une question de principe : “est-ce qu’on veut, ou on ne veut pas d’hydrocarbures au Québec”». Et après des années de discussions, ce débat est clos, a-t-il fait valoir.

« Nous ne sommes pas en train de dire qu’il faut faire la promotion des hydrocarbures. Ce que nous sommes en train de dire, c’est qu’il faut encadrer. […] Et je dois vous dire que les entreprises qui sont ici ne sont pas nécessairement très excitées, parce qu’elles savent qu’il va y avoir un cadre beaucoup plus strict. »

Nouveau sondage

Photo: Jacques Nadeau Le Devoir L’ancien chef de l’Assemblée des Premières Nations du Canada Phil Fontaine a profité d’un atelier de la conférence de l’APGQ pour lancer un avertissement aux entreprises pétrolières et gazières : sans acceptabilité sociale, vos projets sont voués à l’échec.

Il est vrai que le gouvernement a tenu plusieurs consultations, concède la coordonnatrice générale et porte-parole du Regroupement vigilance hydrocarbures Québec, Carole Dupuis. « Il y a un an, on a dit qu’on ne voulait pas un plan d’action gouvernemental sur les hydrocarbures, on a dit qu’on voulait un plan d’action gouvernemental sur la transition énergétique. Ce qu’on a eu, c’est un projet de loi qui fait mine de parler de transition énergétique, mais qui permet tout ce à quoi on a dit non. »

Selon un sondage dévoilé dimanche par des groupes environnementaux, près de deux répondants sur trois s’opposent à l’extraction de pétrole et de gaz au Québec. Un autre coup de sonde, cette fois commandé par la Fédération des chambres de commerce du Québec, avait à l’inverse montré en 2014 que 68 % des répondants appuyaient l’exploitation des hydrocarbures québécois.

Le projet de loi 106, qui vise à mettre en oeuvre la Politique énergétique 2030 du gouvernement Couillard, comporte un volet consacré à la transition énergétique, et un autre lié à l’encadrement des activités d’exploration et d’exploitation des hydrocarbures au Québec. Les opposants estiment que ces deux volets sont contradictoires et auraient souhaité que le projet de loi soit scindé en deux.

Le ministre Arcand a déposé, fin septembre, 80 amendements au projet de loi. L’un d’eux vise par exemple à permettre aux municipalités de « faire entendre leur voix […] en désignant des territoires incompatibles avec l’exploration et l’exploitation des hydrocarbures ». Le libellé précise cependant que cette mesure d’exclusion « ne s’applique pas » aux zones qui sont déjà visées par un permis d’exploration, rapportait Le Devoir il y a un mois.

Impliquer les communautés

 

En avant-midi, l’ancien chef de l’Assemblée des Premières Nations du Canada Phil Fontaine a par ailleurs profité d’un atelier de la conférence de l’APGQ pour lancer un avertissement aux entreprises pétrolières et gazières : sans acceptabilité sociale, vos projets sont voués à l’échec.

« Il faut impliquer les communautés dès les premiers développements d’un projet, a-t-il déclaré. N’allez pas voir les communautés quand le projet, l’échéancier et le tracé sont déjà décidés. […] Ce sera coûteux. »

« Il doit y avoir un changement radical dans la relation avec nos communautés », a-t-il ajouté, se disant en faveur du développement de projets, mais « pas à tout prix ».

Également présent sur scène, le vice-président de TransCanada pour le projet de pipeline Énergie Est, Gary Houston, a fait remarquer que l’entreprise a multiplié les consultations avec différentes communautés. En a-t-elle fait assez jusqu’à maintenant ? « On va voir », s’est contenté de répondre l’ancien premier ministre du Canada Paul Martin, qui animait les discussions.