Volkswagen fait face aux reproches de ses petits actionnaires

Le titre de Volkswagen a perdu un quart de sa valeur depuis le début du « dieselgate ».
Photo: Patrick Stollarz Agence France-Presse Le titre de Volkswagen a perdu un quart de sa valeur depuis le début du « dieselgate ».

Le géant européen de l’automobile Volkswagen s’apprête à affronter mercredi lors de son assemblée générale un flot de questions et de reproches de la part de ses petits actionnaires, très remontés par la tricherie sur les moteurs diesel.

Neuf mois après l’éclatement du « dieselgate », de nombreuses incertitudes demeurent à la fois sur les origines et les conséquences du trucage de 11 millions de véhicules diesel dans le monde.

Plusieurs milliers de petits actionnaires entendent bien profiter de l’occasion qui leur sera fournie à Hanovre pour donner de la voix, même si leur poids est très limité. Ils ne détiennent que 11 % environ des droits de vote. Le reste se répartit entre les familles héritières Porsche-Piëch (52 % environ), l’État régional de Basse-Saxe (20 %) et l’Emirat du Qatar via le fonds Qatar Holding (17 %).

Ulrich Hocker, président de l’association de protection des actionnaires DSW, attend une assemblée générale « très particulière, très litigieuse », a-t-il confié à l’AFP. « Il sera très peu question de l’activité du groupe, la discussion portera presque entièrement sur l’affaire du diesel », estime-t-il avant le premier face-à-face entre les petits porteurs et le patron Matthias Müller, arrivé aux manettes en septembre dernier en remplacement de Martin Winterkorn.

Depuis que Volkswagen a avoué en septembre avoir installé un logiciel destiné à faire paraître les moteurs diesel moins polluants qu’ils ne le sont en réalité, le groupe aux douze marques (dont Audi, Seat, Porsche) est sur la sellette. Ses ventes se sont maintenues à flots mais il fait l’objet de poursuites en justice et de demandes d’indemnisations dans plusieurs pays. Volkswagen a imputé la responsabilité du trucage à un petit groupe de personnes qui aurait agi à l’insu de la direction.

Plusieurs organisations d’actionnaires, comme DSW, reprochent au groupe d’avoir tardé non seulement à comprendre l’ampleur du problème, mais également à en informer les investisseurs, touchés de plein fouet par la descente aux enfers de l’action (-40 %) à l’automne. Le titre Volkswagen a repris des couleurs depuis, mais a tout de même perdu un quart de sa valeur depuis le début de l’affaire.

Ancien patron sous enquête

 

La décision de la justice allemande d’élargir le champ de ses investigations sur le dieselgate va donner de l’eau au moulin des petits porteurs. Le parquet de Brunswick, qui enquête déjà pour tromperie et tentative d’entrave à la justice au sein du groupe, a annoncé lundi se pencher également sur des soupçons de manipulation de cours portant notamment sur l’ancien patron Martin Winterkorn.

Plusieurs groupements d’actionnaires réclament une enquête spéciale sur les responsabilités au sein du groupe, estimant que celle du cabinet américain Jones Day, commanditée par la direction de Volkswagen et dont les conclusions n’ont pas encore été publiées, n’est pas assez indépendante. S’ils n’obtiennent pas gain de cause lors de l’assemblée, hypothèse privilégiée, ils envisagent de lancer une procédure judiciaire.

Plusieurs petits actionnaires comptent par ailleurs désavouer le directoire et le conseil de surveillance en refusant de donner quitus, c’est-à-dire d’approuver la gestion sur l’année passée. Une défiance seulement symbolique, puisque les grands actionnaires devraient voter en bloc en faveur des organes dirigeants.

Feront aussi débat les rémunérations des dirigeants, ainsi que la capacité de l’équipe en place, issue pour beaucoup de la vieille garde, à insuffler un sang neuf.


Enquête pour manipulation de cours contre l’ex-patron

La justice allemande a indiqué lundi avoir étendu ses investigations dans l’affaire des moteurs diesel truqués par Volkswagen au soupçon de manipulation de cours, qui porte en particulier sur Martin Winterkorn, l’ancien patron du groupe automobile. Le parquet de Brunswick a ouvert une enquête pour manipulation de cours dans le cadre de ses investigations « dans l’affaire des émissions de Volkswagen » après une plainte du Bafin, le gendarme allemand des marchés financiers, selon un communiqué. Le « soupçon initial porte sur deux anciens membres du directoire du groupe VW », dont M. Winterkorn, précise-t-il. La deuxième personne, dont le parquet tait le nom, n’est « pas l’actuel président du conseil de surveillance de Volkswagen », Hans Dieter Pötsch, qui était encore directeur financier du géant européen de l’automobile au moment de l’éclatement du scandale du diesel, en septembre dernier. La justice s’interroge sur le moment choisi par le groupe aux 12 marques (Volkswagen, Audi, Porsche, Skoda, etc.) pour informer les investisseurs des conséquences financières du scandale via un communiqué boursier. Le groupe de Wolfsburg avait publié le 22 septembre un communiqué dans lequel il expliquait devoir passer une provision d’environ 6,5 milliards d’euros dans ses comptes du troisième trimestre pour faire face au scandale provoqué par sa tricherie sur les véhicules diesel. Une provision qui sera par la suite gonflée à 16,2 milliards d’euros pour l’ensemble de l’exercice 2015, engendrant la première perte annuelle de Volkswagen depuis plus 20 ans. « Il existe assez d’éléments montrant que le devoir de communication sur des pertes financières importantes attendues aurait pu avoir lieu plus tôt » que le 22 septembre, écrit le parquet de Brunswick. Son enquête devra démontrer si ces soupçons sont fondés ou non.


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