Le Canada doit développer une «vision unifiée»

La coalition Intelliprospérité demandera au gouvernement Trudeau de réévaluer la cible de réduction des GES établie par les conservateurs et d’imposer un prix sur le carbone.
Photo: Jacques Nadeau Le Devoir La coalition Intelliprospérité demandera au gouvernement Trudeau de réévaluer la cible de réduction des GES établie par les conservateurs et d’imposer un prix sur le carbone.

À la veille d’une importante rencontre des premiers ministres provinciaux portant sur les changements climatiques, une nouvelle coalition pancanadienne portée par des groupes de réflexion, des syndicats et des leaders du monde des affaires réclame une « vision unifiée » pour accélérer la transition du Canada vers une économie « plus forte et plus propre ».

La coalition Intelliprospérité (ou « Smart Prosperity »), qui sera lancée ce mardi, a l’intention de mettre de la pression sur tous les ordres de gouvernement pour qu’ils tiennent compte de l’impératif environnemental. « Si notre ambition est de demeurer concurrentiels face aux chefs de file mondiaux, de respecter nos engagements internationaux en matière de climat et de laisser aux générations futures une planète en santé, nous avons de grands pas à franchir au cours des cinq ou dix prochaines années », souligne le plan d’action de l’alliance, dont Le Devoir a obtenu copie.

« Les richesses naturelles et la main-d’oeuvre hautement qualifiée du Canada rendent possibles d’importants progrès dans les technologies propres, poursuit le document. Mais pour réaliser ce potentiel, une vision unifiée et des objectifs clairs doivent guider nos progrès à l’échelle de toute l’économie. »

Le plan de l’alliance vise le développement de villes et de communautés « vertes », d’entreprises « propres et innovantes » et de politiques publiques qui stimuleront la performance économique et environnementale, dans le but d’améliorer la qualité de vie des Canadiens.

Recette en cinq points

 

Pour y arriver, les membres de la coalition mettent en avant cinq grandes idées : la promotion des technologies propres, l’amélioration de l’efficacité énergétique, l’investissement dans les infrastructures, la conservation de la nature et la tarification de la pollution.

Dans la foulée des travaux d’organisations comme SWITCH, l’Alliance pour une économie verte au Québec, ou de la Commission de l’écofiscalité du Canada, la coalition Intelliprospérité soumet donc sa recette aux premiers ministres provinciaux, qui se réuniront ce jeudi à Vancouver pour discuter des changements climatiques.

 

« C’est important pour le gouvernement de sentir le consensus qui existe au sein de la société canadienne en ce qui concerne la mise en place de mesures pour accélérer la transition, à un moment où c’est probablement difficile de faire des choix dans une économie qui est fragile », souligne le président et chef de la direction de l’Association de l’aluminium du Canada et porte-parole québécois de la nouvelle alliance, Jean Simard.

L’Intelliprospérité a notamment reçu l’appui de la présidente et chef de la direction du Mouvement Desjardins, Monique Leroux, du directeur général de l’Institut Broadbent, Rick Smith, des dirigeants de Telus, RBC, Loblaw et Tembec, mais aussi du président de Shell Canada, Michael Crothers.

M. Simard se dit « très à l’aise » avec la présence d’un représentant de l’industrie pétrolière autour de la table. « Même si on n’aime pas ce que ces entreprises produisent aujourd’hui en raison de l’empreinte très lourde sur le plan environnemental, il ne faut pas oublier que ce sont aussi des agents de changement, dit-il. Quand la haute direction d’une grande entreprise comme Shell s’engage publiquement dans une démarche comme celle-là avec d’autres leaders de tous les horizons, au contraire, je trouve ça rassurant. »

Stratégie nationale

 

Au-delà des grands objectifs et des priorités d’action, la coalition demandera au gouvernement Trudeau de réévaluer la cible de réduction des GES établie par les conservateurs et d’imposer un prix sur le carbone.

L’objectif global doit être commun à toutes les provinces, mais les moyens utilisés pour l’atteindre peuvent différer en fonction des réalités de chacune d’entre elles, estime Jean Simard.

« Le changement ne peut pas se produire avec une volonté exclusivement fédérale, insiste-t-il. On ne peut pas continuer d’agir en vase clos si on veut en arriver à des solutions d’avenir. »

La ministre fédérale de l’Environnement, Catherine McKenna, croit elle aussi que l’imposition d’un prix sur le carbone constitue le moyen le plus efficace de lutter contre les changements climatiques. Lundi, elle a cependant fait savoir que la rencontre de cette semaine avec les premiers ministres provinciaux ne permettra sans doute pas d’en arriver à des résultats concrets.

Reste à voir si, à terme, le gouvernement parviendra à convaincre les provinces de se ranger derrière une stratégie commune, en dépit de leurs divergences. Différents systèmes de tarification du carbone ont été mis en place à travers le pays, mais le premier ministre de la Saskatchewan, Brad Wall, a indiqué samedi sur sa page Facebook qu’il refuserait de signer toute entente qui inclurait une « taxe nationale sur le carbone ».

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