Le Québec a un urgent besoin de main-d’oeuvre qualifiée

Photo: Archives Le Devoir

Le Québec a environ trois ans devant lui pour répondre à sa pénurie de main-d’oeuvre spécialisée, sans quoi il pourrait voir l’opportunité que représentent les plus récentes ententes de libre-échange lui passer sous le nez, craint Manufacturiers et Exportateurs du Québec.

L’association, qui représente les entreprises manufacturières et exportatrices du Québec, participe depuis lundi matin à un colloque international consacré à la main-d’oeuvre qualifiée, et elle profite de l’occasion pour lancer un cri d’alarme. À quelques années de la mise en oeuvre de l’entente de libre-échange avec l’Union européenne et du Partenariat transpacifique, il faut que les entreprises québécoises aient rapidement accès aux travailleurs spécialisés dont elles ont besoin, fait valoir le président de MEQ, Éric Tétrault.

« Nous sommes membres de presque tout ce qui a été signé et de ce qui est en voie d’être signé dans les prochaines années en matière de libre-échange. C’est extraordinaire, mais ce sont des cadres. Maintenant, il faut en profiter, dit-il. Si tu veux en tirer parti plutôt que les subir, il faut que tes entreprises soient concurrentielles. »

« Au Québec, on a un gros besoin de travailleurs qualifiés auquel on ne répond pas assez rapidement, résume Paul Bélanger, le directeur de l’Observatoire compétences-emplois de l’UQAM, qui organise le colloque. Les entreprises veulent se développer, mais elles ne trouvent pas le personnel qualifié dont elles ont besoin. »

Le problème n’est pas nouveau. Le vieillissement de la population et la mutation des entreprises manufacturières québécoises — qui doivent se spécialiser pour se démarquer — augmentent les besoins en main-d’oeuvre qualifiée. Les compagnies cherchent par exemple des soudeurs, des machinistes et des électromécaniciens, mais les ressources manquent. Au total, quelque 150 000 emplois devront être pourvus au cours des trois ou quatre prochaines années, estime M. Bélanger.

Changer d’approche

Le colloque présenté jusqu’à mardi à Boucherville, sur la Rive-Sud de Montréal, a pour but de tisser des liens entre le milieu de l’éducation et le secteur privé et de trouver des solutions.

Selon Paul Bélanger, il faut d’abord être en mesure de développer ou de modifier les programmes de formation professionnelle plus rapidement qu’en six ans, comme c’est souvent le cas actuellement. Il faut également miser sur la formation à temps partiel pour permettre à des personnes en emploi de parfaire leurs connaissances. Et surtout, il faut redorer le blason de la formation professionnelle.

« Je comprends les parents qui veulent le mieux pour leur enfant, mais ils se trompent en pensant que la formation professionnelle est un cul-de-sac », explique le professeur, qui souligne qu’un chef d’entreprise allemand sur deux est issu de la formation professionnelle.

Éric Tétrault, de MEQ, réclame quant à lui des programmes de formation révisés. « Il faut que notre système d’éducation au complet se mette au service de l’économie », lance-t-il.

M. Tétrault reconnaît que les entreprises manufacturières québécoises n’ont pas su profiter autant que prévu de la chute du dollar canadien pour exporter davantage, mais il ne s’inquiète pas pour autant. La fenêtre d’opportunité demeurera ouverte tant que le huard restera faible, et le gouvernement québécois est au travail pour aider le secteur, se réjouit-il. Un projet de loi serait par exemple en préparation au ministère du Travail et de l’Emploi pour développer une nouvelle offre en matière de formation. Au moment de publier, le cabinet du ministre Sam Hamad n’avait pas répondu à nos demandes de précisions.

Creux historique en octobre

Le secteur manufacturier canadien a connu un mois d’octobre difficile, atteignant un creux historique selon l’indice conçu par la Banque Royale du Canada (RBC). L’Indice PMI RBC a chuté à 48, ce qui constitue le pire résultat depuis que l’institution financière a commencé à évaluer le secteur, en 2010. Cet indice reposant sur les réponses fournies par les directeurs d’achats de plus de 400 entreprises de l’industrie manufacturière révèle une détérioration de la conjoncture au pays, notamment en raison de l’incertitude que laisse planer l’économie mondiale. Le Québec a connu un léger repli, tandis que l’Ontario a continué de prendre du mieux.


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