Comment sortir le Québec des sources d’énergie fossiles?

Ce texte fait partie du cahier spécial Coopératives
Confronté à l’augmentation importante du prix du pétrole et à la nécessité de réduire ses émissions de gaz à effet de serre, le Québec devra, pour rester concurrentiel et atteindre ses objectifs de lutte contre les changements climatiques, diminuer sa consommation d’énergie de sources fossiles au cours des prochaines années. Comment y parvenir ? Robert Laplante, directeur général de l’Institut de recherche en économie contemporaine (IREC), et Normand Mousseau, professeur de physique à l’Université de Montréal (UdeM) et coprésident de la Commission sur les enjeux énergétiques du Québec, se prononcent sur le sujet dans le cadre du Sommet international des coopératives.
Au Québec, la production d’énergie de sources renouvelables permet de combler près de la moitié des besoins énergétiques de la province. Parmi elles, on compte notamment l’hydroélectricité, mais également la biomasse, le biogaz ainsi que les énergies solaire et éolienne. Grâce à sa capacité de production massive, le Québec dispose d’importants surplus d’énergie de sources propres et peu coûteuses, ce qui le place dans une situation enviable sur le plan de la sécurité énergétique. « Il y a très peu de sociétés au monde qui aient un portefeuille énergétique aussi avantageux », note M. Laplante.
Là où le bât blesse, c’est que les Québécois figurent parmi les plus grands consommateurs d’énergie au monde, avec une utilisation moyenne de près de cinq tonnes équivalent pétrole (tep) par habitant. Les secteurs de l’industrie et des transports sont ceux d’où émanent les plus grandes demandes en énergie. Or ils sont aussi ceux qui dépendant le plus des hydrocarbures. Ainsi, malgré son importante production d’énergie de sources renouvelables, le Québec dépend à plus de 50 % du pétrole et du gaz naturel pour satisfaire ses besoins en énergie.
N’étant pas un producteur d’hydrocarbures fossiles, le Québec doit importer la part qu’il consomme ou transforme sur son territoire. Or cela coûte cher. « Notre consommation d’énergie de sources fossiles a d’ores et déjà commencé à nous appauvrir sérieusement. Ça déstabilise considérablement notre balance commerciale et, bien entendu, ce flux monétaire de 14 ou 15 milliards qui sort du Québec chaque année a un impact sournois et insidieux sur notre compétitivité et sur notre capacité à nous inscrire dans les échanges économiques », précise le directeur de l’IREC.
Vers une meilleure maîtrise de l’énergie
D’après M. Mousseau et M. Laplante, avec son riche portefeuille énergétique, le Québec a tout ce qu’il faut pour se défaire de sa dépendance envers les sources d’énergie fossiles. Toutefois, comme la province est déjà bien engagée dans le chemin du « mal-développement », les spécialistes estiment qu’elle devra rapidement poser des actions structurantes si elle désire réellement s’inscrire dans un paradigme de maîtrise de l’énergie et de consommation durable.
« Ce qu’il faut comprendre, c’est que des pistes de solution faciles, il n’y en a pas au Québec, souligne M. Mousseau. Partout dans le monde, on s’efforce de diminuer la dépendance aux hydrocarbures fossiles en réduisant leur proportion dans l’électricité. Ici, ça ne sert pas à grand-chose d’agir sur l’électricité, parce qu’elle est déjà à 99,7 % renouvelable. Ce qu’il nous reste à faire, c’est d’agir de façon importante et structurée sur les secteurs où notre utilisation de l’énergie est déficiente. »
Pour M. Mousseau, cela implique notamment une importante révision de nos façons de faire en matière d’aménagement du territoire. À son avis, il faut dès maintenant se mettre à le développer de façon plus intelligente, en rabattant notamment la population vers certains grands axes, et implanter des structures qui permettront une réelle efficacité du transport en commun.
M. Laplante, lui, croit qu’une action globale d’électrification du transport collectif représente une avenue particulièrement intéressante pour le Québec. « Si nous voulons être sérieux dans notre démarche, il faut investir massivement du côté de l’électrification du transport collectif. Pourquoi ? Parce que cette action globale peut avoir un effet direct sur notre structure industrielle », relève-t-il.
Les deux spécialistes jugent également nécessaire que le Québec adopte une approche plus globale de l’exploitation de ses ressources énergétiques, afin d’assurer des retombées optimales pour l’ensemble de sa population.
M. Laplante et M. Mousseau se retrouveront à Québec le 6 octobre prochain pour traiter de la question, à l’occasion du Sommet international des coopératives. En compagnie de M. François L’Italien, chercheur à l’IREC, et de M. Stéphane Labranche, politologue à l’Institut d’études politiques de Grenoble, ils participeront à une table ronde intitulée « La transition énergétique de l’économie : comment sortir des énergies fossiles ».
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