Redevances minières: un consensus sera impossible, reconnaît Martine Ouellet

La ministre Ouellet participe vendredi au sommet sur les redevances minières, en compagnie du ministre Nicolas Marceau.
Photo: -Le Devoir La ministre Ouellet participe vendredi au sommet sur les redevances minières, en compagnie du ministre Nicolas Marceau.

Devant le dialogue de sourds qui a eu cours vendredi au forum du gouvernement sur les redevances minières, la ministre des Ressources naturelles, Martine Ouellet, a dû reconnaître qu'il serait impossible de dégager un consensus sur cette épineuse question.

«Lorsqu'on parle d'augmenter les redevances, on était quand même réalistes, on ne s'attendait pas à avoir un consensus», a déclaré Mme Ouellet en point de presse, en réitérant son intention d'aller de l'avant dès ce printemps avec la hausse des redevances.

La ministre a assuré que la réforme ne nuira pas à la compétitivité du Québec sur la scène internationale.

Deux visions


Le forum, auquel participent des représentants de sociétés minières, de syndicats, de groupes de citoyens, d'autochtones et d'organismes environnementaux, oppose deux visions irréconciliables.

L'industrie plaide à l'unisson qu'une nouvelle hausse des redevances sonnera le glas de certains projets miniers et se traduira par des pertes d'emplois dans les régions. Les autres intervenants soutiennent pour leur part que les entreprises sont en mesure de verser davantage à l'État pour exploiter les ressources non renouvelables.

L'artiste et militant écologiste Dominic Champagne a pris la parole pour demander une étude sur les impacts sociaux et environnementaux de l'industrie minière au Québec. La ministre Ouellet s'est prononcée en faveur de l'idée, sans toutefois donner d'échéancier précis pour sa réalisation.

Le gouvernement veut «aller chercher des redevances particulièrement là où les rendements sont vraiment exceptionnels» et faire en sorte qu'il y ait «toujours une compensation qui sera payée pour l'appropriation d'une ressource qui appartient à l'ensemble des citoyens québécois», a insisté Mme Ouellet dans son discours d'ouverture.

Lien de confiance


En réponse à l'industrie, qui réclame un régime de redevances «stable et prévisible», la ministre a affirmé que les communautés locales devaient elles aussi bénéficier de stabilité et de prévisibilité. Pour ce faire, il faut «recréer» le lien de confiance avec les citoyens, a-t-elle indiqué.

Martine Ouellet a souligné qu'au cours de la dernière décennie, les cours des métaux ont été multipliés par cinq en moyenne. Un représentant de la Fédération des chambres de commerce du Québec a répliqué que pendant la même période, les sommes recueillies en redevances minières par Québec avaient été multipliées par 32.

Le gouvernement souhaite instaurer un régime hybride, qui taxerait non seulement les profits des minières, mais qui imposerait également une taxe plancher équivalant à cinq pour cent de la valeur du minerai extrait. Les critères qui guideront la mise en place du nouveau régime sont la stabilité, l'équité, la transparence, l'efficacité et la compétitivité, a précisé Mme Ouellet.

Normand Mousseau, professeur au département de physique de l'Université de Montréal et auteur du livre «Le défi des ressources minières», a noté que l'importance de l'industrie minière dans l'économie québécoise a chuté depuis les années 1960, en raison principalement de la croissance des autres secteurs. Il a ajouté que les mines créent proportionnellement moins d'emplois que d'autres industries.

Josée Méthot, p.-d.g. de l'Association minière du Québec, a quant à elle rappelé que les gisements québécois sont généralement moins denses que ceux situés dans les autres centres miniers mondiaux et que leurs coûts d'exploitation sont plus élevés en raison notamment de leur éloignement des grands marchés. Ce n'est pas au Québec qu'on peut dicter les règles du jeu de l'industrie minière mondiale, a-t-elle lancé.

Les minières exigent actuellement un taux de rendement interne oscillant entre 15 et 20 % pour leurs projets, a relevé Renault-François Lortie, associé chez KPMG-Secor. Selon lui, de telles occasions d'affaires sont plutôt rares au Québec et elles le deviendraient encore davantage si une taxe sur la valeur extraite devait être imposée.

Nochane Rousseau, comptable au cabinet PricewaterhouseCoopers, a estimé qu'une telle taxe découragerait l'exploitation à long terme des mines québécoises, puisque celles-ci auraient intérêt à n'extraire que les «meilleures pelles» de minerai, soit celles ayant les plus fortes teneurs.

Christian Simard, directeur général de Nature Québec, s'est demandé pourquoi l'industrie était aussi hostile à une taxe sur la valeur brute alors que la firme Mines Virginia en a obtenu une de Goldcorp lorsqu'elle a vendu à cette dernière le gigantesque projet aurifère Éléonore, à la Baie-James.

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