Les conséquences économiques de la révolte égyptienne - Les banques ferment, les touristes fuient

Des guichets automatiques qui se vident, une Bourse inopérante, des touristes qui annulent. Aux prises avec un soulèvement populaire sans précédent, l'Égypte vit ces jours-ci toute une série de secousses économiques. Avec en parallèle, un baril de pétrole brut, le Brent de la mer du Nord, qui franchit le seuil de 100 $ pour la première fois depuis 2008.
Quatrième économie du Moyen-Orient, l'Égypte dépend beaucoup du tourisme, mais les observateurs s'interrogeaient à propos du canal de Suez, par lequel transitent 1,2 million de barils de pétrole de la mer Rouge à la Méditerranée, et de l'oléoduc Sumed qui transporte 1,1 million de barils. Combinés, ces deux moyens totalisent près de 1 baril sur 20 que la planète produit sur une base quotidienne.À Londres, le cours du baril de Brent a augmenté de 1,53 $ à 100,95 $. À New York, cependant, celui du pétrole West Texas Intermediate, référence nord-américaine dont les stocks sont à la hausse, a progressé de 3,11 $ à 92,45 $. Le Brent est plus cher depuis des mois, mais le WTI a quand même bondi de 8 % en deux séances.
Si jamais ces deux passages faisaient l'objet d'une fermeture, il y aurait «un risque de pénurie réelle», a dit hier Abdallah Salem El-Badri, secrétaire général de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP). Pour l'instant, toutefois, le canal fonctionnait «à pleine capacité», selon les médias officiels en Égypte. Advenant le pire, les navires seraient obligés de faire un très long détour par l'Afrique du Sud.
Ailleurs dans l'économie égyptienne, il semblait y avoir du sable dans l'engrenage. Selon les médias sur place, non seulement Internet est-il encore bloqué, mais la Bourse du Caire a plongé de 10 % en deux séances, et les banques seront encore fermées aujourd'hui, contrairement à l'habitude.
De plus, des magasins — du moins ceux qui étaient ouverts — n'acceptaient plus que de l'argent comptant, et l'activité aérienne, notamment celle du fret, était en baisse.
Relation Canada-Égypte
La taille de l'activité économique égyptienne est d'environ 217 milliards, selon les données du Fonds monétaire international, soit un peu moins que celle du Québec.
Selon le gouvernement canadien, l'Égypte était en 2009 le troisième marché d'exportation du Canada au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. Le Canada a notamment exporté du matériel ferroviaire, du fer, de l'acier, des machines et des légumes.
«En 2009, les exportations ont plus que triplé par rapport à 1999», peut-on lire dans un document d'information du ministère des Affaires étrangères.
Par ailleurs, l'impact des cours du pétrole n'est pas une grande préoccupation pour l'instant, mais une flambée «à 120 $, disons, pourrait avoir des conséquences sur la confiance des consommateurs et entraîner des hausses de prix», a dit Mathieu D'Anjou, économiste au Mouvement Desjardins. Aux États-Unis, principal partenaire économique canadien, «la confiance demeure fragile», a-t-il dit.
Selon Simon Prévost, qui dirige les Manufacturiers et Exportateurs du Québec, ce n'est pas tant le niveau des cours du pétrole qui causerait des problèmes que la vitesse à laquelle ils augmenteraient. Une progression lente permet aux entreprises de mieux s'adapter, a-t-il dit hier lors d'un entretien.
Il y a deux ans, le Mouvement Desjardins avait écrit une note économique selon laquelle un baril de pétrole à 100 $ était «préoccupant, mais pas catastrophique». «Bien que préoccupantes, les hausses de prix enregistrées ces dernières années n'ont pas véritablement freiné l'économie et, pour les mêmes raisons, les impacts d'un baril qui avoisine les 100 $, soit environ 30 $ de plus que l'an dernier, seront limités», avaient écrit trois économistes du Mouvement.
«Nous sommes encore bien loin des augmentations connues en 1973 et en 1979. Pour être comparables, les prix devraient tripler par rapport à l'année dernière [2007], ce qui les situerait aux alentours de 180 $ le baril.»
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Avec l'Agence France-Presse