Pour éviter la bulle, restreindre le crédit

Craignant l'émergence d'une bulle immobilière dans certaines régions du pays, le gouvernement fédéral a mis en place une série de mesures au printemps destinées à resserrer l'accès au crédit disponible aux acheteurs. Et il n'exclut pas de poser d'autres gestes.
Chez les analystes, les stratèges en placement et les économistes, le débat sur l'existence d'une bulle fait rage depuis des mois, pas tant pour le Québec toutefois que pour le reste du pays. «Nous continuons de surveiller l'état de la situation. S'il est nécessaire de resserrer les règles encore plus, nous allons le faire», a dit le ministre fédéral des Finances, Jim Flaherty, le 4 octobre. Selon le ministre, cité par l'agence Reuters à l'issue d'une rencontre avec des économistes, elles ont déjà un effet.Entre autres, le gouvernement Harper a décrété au printemps que l'admissibilité à un prêt hypothécaire serait désormais établie en fonction du taux sur cinq ans, même si l'acheteur veut une hypothèque à taux variable. Et quiconque achète un immeuble dans lequel il ne compte pas vivre doit déposer une mise de fonds de 20 %, pour décourager la spéculation.
Malgré une récession qui a entraîné la disparition de dizaines de milliers d'emplois d'un océan à l'autre, les prix, qui sont déjà élevés dans des villes comme Toronto et Vancouver, ont continué de grimper.
Si le prix moyen d'une résidence dans le Grand Montréal a grimpé d'environ 9 % depuis janvier 2010, il a augmenté de 11,4 % à Toronto, de 11 % à Winnipeg et de 16,2 % à Vancouver.
La Banque CIBC estime que 17 % des propriétés sont «surévaluées» par rapport à leur «juste valeur», soit environ 1,5 million de maisons et de condos. Environ la moitié de ceux-ci excèdent leur juste valeur de plus de 5 %, selon l'établissement.
De manière générale, fait remarquer la CIBC, le prix d'une propriété a augmenté de 23 % depuis janvier 2009, et dépasse de 7 % les niveaux observés avant la récession.
Le marché n'en serait peut-être pas là si les taux hypothécaires, qui s'affichent officiellement à un peu plus de 5 %, n'étaient pas aussi faibles. Découlant d'un contexte de récession, cette baisse a eu pour effet de nourrir l'activité immobilière comme jamais dans le passé.
«On a eu des directives pour limiter le montant maximal des prêts pour les clients, car on anticipe une hausse des taux et on veut s'assurer que les gens, quand ils vont renouveler dans trois à cinq ans, pourront honorer leurs obligations hypothécaires», dit Xavier Footman, courtier hypothécaire à la Banque de Montréal.
En toile de fond figure l'endettement des ménages. Dans un discours le 30 septembre dernier, le gouverneur de la Banque du Canada a dit que, «malgré le dynamisme du marché du logement, le ratio de la dette à l'actif a atteint son niveau le plus élevé en plus de 20 ans».
Les Canadiens ont peut-être commencé à réduire leurs dépenses, a-t-il précisé, mais il reste qu'«en un mot, les bilans des ménages canadiens sont de plus en plus lourds». Cet été, la Banque du Canada a recommencé à hausser son taux directeur, ce qui va éventuellement se répercuter sur les taux hypothécaires.
La Fédération des chambres immobilières du Québec estime malgré tout que la faiblesse des taux d'intérêt a permis au consommateur de maintenir son pouvoir d'achat depuis les années 80.
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