OPEP: vers le statu quo
Vienne — L'option d'un maintien de l'offre pétrolière de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) semblait la plus probable hier à la veille de sa réunion à Vienne, bien que plusieurs de ses membres affichent leur préférence en faveur d'une réduction de l'offre.
Le comité consultatif de l'OPEP, qui fournit une recommandation aux 13 pays membres du cartel pétrolier, va recommander aujourd'hui le statu quo sur la production, a indiqué le ministre du Pétrole iranien, Gholam Hossein Nozari. Il n'y a «pas d'autre choix» que le statu quo, avait déjà affirmé le ministre qatari du Pétrole, Abdallah al-Attiyah, en accord avec ses homologues équatorien et libyen.L'OPEP devrait donc rester sourde aux appels appuyés des pays consommateurs en faveur d'une hausse de production, alors que le prix du baril de brut vole de record en record: il a frôlé 104 $US lundi, un niveau jamais atteint même pendant le deuxième choc pétrolier, si l'on tient compte de l'inflation.
Une «erreur» selon Bush
Inquiet des conséquences économiques de la flambée pétrolière, le président américain George W. Bush a affirmé hier que ce serait une «erreur» de la part des pays exportateurs de pétrole de laisser leur production inchangée. La veille, le président de l'Eurogroupe, le Luxembourgeois Jean-Claude Juncker, avait lui aussi demandé au cartel d'agir.
Mais une hausse de production a été formellement exclue par le président de l'OPEP, l'Algérien Chakib Khelil, tout comme par les ministres koweïtien, vénézuélien, qatari et iranien.
Le Saoudien Ali al-Nouaïmi, chef de file du cartel, ne s'est pas exprimé publiquement depuis son arrivée dans la capitale autrichienne, mais avait souligné son opposition à une hausse dans la revue Pétrostratégies. Selon lui, «rien ne justifie» une hausse «au regard des données qui sont dorénavant largement transparentes», a-t-il dit.
En outre, les stocks pétroliers sont en hausse depuis sept semaines aux États-Unis, un argument supplémentaire pour ne pas pomper plus. D'autant que le cartel craint une baisse de la demande au deuxième trimestre avec la fin de l'hiver et l'impact négatif potentiel du ralentissement économique américain.
Une perspective qui inquiète certains pays au point de réclamer une restriction de l'offre.
En tant que ministre du Pétrole de l'Algérie, «je préférerais baisser la production, car la demande mondiale va baisser», a ainsi déclaré hier Chakib Khelil. Les «faucons» du cartel, l'Iran et le Venezuela, avaient déjà fait savoir leur préférence pour cette option.
Mais, avec un baril à plus de 100 $US, cela semble difficile à envisager politiquement, comme l'a admis le ministre algérien. «Une baisse de production serait très surprenante» et ne serait «pas bienvenue», a estimé Lawrence Eagles, chef analyste de l'Agence internationale de l'Énergie (AIE).
L'OPEP maintient que l'envolée des prix est liée aux tensions géopolitiques et aux investisseurs utilisant le pétrole pour se protéger de la chute du dollar: «Vous ne pouvez pas nous reprocher» les prix élevés du pétrole, «qui échappent à notre contrôle». «Comment contrôler la spéculation, comment contrôler les facteurs géopolitiques?», a ainsi remarqué le ministre qatari.
Certains pays membres de l'OPEP ont aussi peu intérêt à voir la production coupée, alors que les prix records dopent leurs revenus.
Face aux incertitudes qui pèsent sur la demande, le cartel pourrait choisir de se réunir à nouveau au printemps. Une idée soutenue par son président en exercice, Chakib Khelil, et par le Libyen Choukri Ghanem notamment.
Le cartel pourrait également diminuer officieusement son offre, fixée à 29,67 millions de barils par jour (mbj) et qu'il dépasse pour le moment de 110 000 barils par jour.