Forêt: un consensus contre le livre vert se dégage dans l'industrie
Après avoir sondé une bonne partie des membres de l'Association des industries forestières du Québec (AIFQ), Guy Chevrette, qui en est le président-directeur général, voit déjà un large consensus se dégager contre plusieurs mesures du livre vert sur la forêt présenté à la mi-février par Claude Béchard, ministre des Ressources naturelles et de la Faune.
Au cours d'une réunion des membres de l'AIFQ qui aura lieu à Québec le 14 mars, M. Chevrette soumettra à l'assemblée un certain nombre de propositions, notamment celle de confier à une firme spécialisée le mandat d'effectuer une étude d'impact sur ce que donnerait l'application de ce livre vert. Selon le p-d.g., ce document comprend certaines mesures qui n'ont fait l'objet d'aucune entente lors du Sommet l'avenir de la forêt tenu en décembre dernier, un sommet qui s'était terminé dans la plus grande harmonie et dont le ministre Béchard s'était engagé à respecter les conclusions. «Appliqué tel quel, ce livre vert n'est pas viable», affirme M. Chevrette.Il reproche au livre vert de proposer la fixation d'un prix plancher pour le bois venant de la forêt publique qui tiendrait compte des interventions d'aménagement forestier, des coûts de protection des forêts, du coût de fonctionnement du bureau de mise en marché et qui prévoirait une marge de profit pour les entreprises d'aménagement. Les compagnies acheteuses, constate M. Chevrette, n'auraient aucun contrôle sur le transport du bois pour le sortir de la forêt et aucun contrôle sur les coûts sur les activités en forêt. «Qui établirait la marge de profit des entreprises d'aménagement? Nous sommes contre le prix plancher, chacun doit assumer ses risques», poursuit-il.
Selon lui, il faudrait laisser le marché libre, ce qui aurait pour effet d'aider à la rationalisation de l'industrie du sciage. Certaines scieries disparaîtraient, mais une fois la rationalisation effectuée, les prix se stabiliseraient pour se situer au niveau du prix mondial, pense M. Chevrette, en ajoutant par ailleurs que le modèle contenu dans le livre vert, c'est-à-dire de lier les contrats d'approvisionnement en bois aux usines plutôt qu'aux entreprises, a pour effet d'empêcher les fusions et les entreprises conjointes, lesquelles seraient nécessaires dans plusieurs cas pour assurer la survie des scieries.
À peu près dans toutes les régions forestières du Québec, la consolidation n'est pas terminée et, dans certains cas, elle n'est même pas commencée. M. Chevrette affirme qu'il y a des usines de sciage qui fonctionnent à 40 ou 45 % de leur capacité. Pour l'ensemble de l'industrie du sciage au Québec, le taux serait inférieur à 70 %. Il s'élève aussi contre l'idée d'une Bourse du bois où serait négocié 25 % du bois et dont le prix servirait de base pour les compagnies qui auraient un droit de premier preneur sur 75 % du volume qu'elles détenaient auparavant. Il pourrait y avoir là un effet pervers, certains cherchant à faire grimper le prix sur la Bourse des 25 %, afin de nuire. «Si la forêt privée était mise avec le 25 %, on ne s'opposerait pas», ajoute le p-d.g.. Bref, M. Chevrette pense qu'il faut un meilleur encadrement des coûts et une définition plus précise des pouvoirs au niveau local.