Quand la SAAQ pousse un soupir de soulagement

Dévoilée en 2006 à la consternation générale, la hausse de tarifs qui est appliquée cette année par la Société de l'assurance automobile du Québec (SAAQ) représente une bouffée d'air frais pour l'organisme. D'autant plus que si le bilan routier s'améliorait, les finances pourraient s'embellir significativement d'ici quelques années, croit sa direction.
Pour l'instant, la situation financière de la SAAQ n'est pas rose. En 2006, ses dépenses d'indemnisation ont atteint 1,1 milliard. Les revenus, cependant, se sont chiffrés à 800 millions. D'où la révision des tarifs, pour éviter un casse-tête actuariel qui ne fera qu'empirer au fil des ans.«Au bout de trois ans, l'augmentation des tarifs amènera 300 millions de plus dans les coffres sur une base annuelle», dit le président-directeur général de la SAAQ, John Harbour.
La direction de la SAAQ compte aussi sur une amélioration du bilan routier. L'objectif, dit M. Harbour, est de revenir au niveau de 2001, lorsque 610 personnes ont perdu la vie. L'an dernier, 717 personnes ont connu le même sort. Pour 2007, il pourrait y avoir un revirement de situation. Les données préliminaires montrent une chute de 14 % du nombre de décès et de 21 % du nombre de blessés graves.
«Revenir au niveau de 2001 permettrait d'abaisser de 130 millions le total des indemnités», dit M. Harbour. Au plan administratif, il y a moyen d'améliorer le fonctionnement de l'appareil pour économiser 70 millions de plus, croit-il.
D'abord prévus pour le 1er janvier 2007, les nouveaux tarifs de la SAAQ avaient été reportés au 1er janvier 2008. La SAAQ affirmait que son système informatique n'était pas prêt. Les esprits plus malins avaient conclu que la SAAQ avait tout simplement cédé à la pression des libéraux, qui ne voulaient pas froisser l'électorat à l'approche des élections du printemps 2007.
L'assurance automobile coûte moins cher au Québec qu'ailleurs au Canada. Selon le Bureau d'assurance du Canada, en 2006, un conducteur québécois payait environ 698 $ par année (SAAQ + assurance matérielle). Or pour une couverture semblable, le coût total en Ontario était de 1296 $, comparativement à 990 $ au Manitoba et 911 $ au Nouveau-Brunswick.
Pour les propriétaires de voitures, la hausse touchera surtout le permis de conduire, qui passe de 43 $ à 58 $. L'immatriculation bouge à peine, passant de 255 $ à 257 $.
Les motos frappées de plein fouet
Chez les motocyclistes, la grogne a été plus forte. Le permis de conduire pour véhicule avec classe moto passe de 43 $ à 96 $. Quant à l'immatriculation d'une moto, elle passe de 320 $ à 667 $ pour un modèle sport de 401 cc et plus, et de 320 $ à 416 $ pour un modèle régulier. «C'est pas que les motos ont beaucoup plus d'accidents», dit M. Harbour, selon lequel les motocyclistes paient moins de 25 % des coûts du régime qui leur sont attribués. «Mais c'est que la sévérité des blessures est beaucoup plus grande.»
Les motocyclistes n'en reviennent toujours pas. Il ne devrait pas y avoir de catégorisation, plaident-ils. «Le problème, ce n'est pas la moto», dit Éric Bouchard, président de l'Association des concessionnaires de véhicules de loisir du Québec. «Le problème, c'est le conducteur.» Les accidents de moto sont le plus souvent causés par des voitures, ajoute-t-il.
Depuis 2006, dit-il, les ventes de motos ont chuté de 30 %. Sur environ 200 concessionnaires dans la province, «quelques dizaines» ont fermé, selon lui. «On a eu deux années difficiles, mais les choses sont maintenant au beau fixe», dit-il. «Il y a une acceptation passive [des hausses].»
Certes, le système québécois a fait ses preuves, dit M. Bouchard, et les finances de la SAAQ méritaient d'être réglées. «On a des responsabilités envers les générations futures», reconnaît-il. Il se dit toutefois en faveur d'un système qui récompenserait les conducteurs au dossier vierge. Cette idée n'est pas exclue à la SAAQ, mais il faut d'abord équilibrer les livres, dit M. Harbour.