L'inflation recommence à peser sur les consommateurs américains
Washington — L'inflation recommence à peser sur les consommateurs aux États-Unis, au grand dam de la banque centrale qui doit parallèlement lutter contre la menace insistante d'une récession.
En janvier, les dépenses des ménages ont progressé de 0,4 % par rapport à décembre, ce qui est en apparence une bonne nouvelle car les analystes s'attendaient à une hausse deux fois moindre. Mais une fois ajustées de l'inflation, les dépenses sont en fait restées stables pour le deuxième mois consécutif. Et le revenu disponible n'a progressé que de 0,1 %, a annoncé hier le département du Commerce.«Les consommateurs dépensent plus, mais le surplus est effacé par la hausse des prix», note Nigel Gault du cabinet Global Insight. «Les dépenses ajustées de l'inflation devraient plus ou moins stagner au premier trimestre. Une petite baisse est même possible, ce qui ne s'était pas produit depuis 1991», ajoute-t-il.
En effet l'inflation donne des signes d'impatience. L'indice des prix lié aux dépenses de consommation a augmenté de 0,4 % en janvier — et de 3,7 % sur un an, ce qui est le niveau le plus élevé enregistré depuis juillet 1991.
En janvier, l'essentiel des achats des consommateurs s'est porté sur les biens de consommation courante et les services, alors que les dépenses pour les biens durables, comme les voitures ou les machines à laver, ont chuté. «Une grande partie de leur argent a servi à payer la hausse des prix de l'essence, de l'habillement et d'autres coûts», explique l'économiste indépendant Joel Naroff.
La Réserve fédérale (Fed) fait le pari que le ralentissement de l'économie permettra de juguler l'inflation en cours d'année. Elle récuse un scénario catastrophe réitérant la stagflation des années 1970, associant stagnation économique et envolée des prix.
Menace gênante
Cependant elle-même reconnaît que la menace inflationniste est de plus en plus gênante. «Nous avons vu l'inflation atteindre 2 % hors énergie et alimentation en 2007. Si on ajoute l'énergie et l'alimentation, on est plus autour de 3,5 %, ce qui est évidemment un niveau d'inflation élevé, avec lequel nous ne sommes pas à l'aise», a reconnu jeudi le président de la Fed, Ben Bernanke.
Cela lui pose un problème car la priorité du jour reste de lutter contre la menace de récession. Si elle privilégie la croissance et baisse son taux directeur d'un demi-point supplémentaire, pour le ramener à 2,5 % comme les marchés le prévoient, elle prend le risque de laisser la bride sur le cou à l'inflation.
Mais elle peut difficilement faire autrement alors que chaque jour ou presque apporte de mauvaises nouvelles sur la conjoncture.
L'immobilier, risque numéro un pour l'économie, s'enfonce dans la crise et l'année 2007 s'est soldée par la première baisse des prix depuis des décennies. «Le malaise de l'immobilier pourrait durer plus longtemps que prévu et la reprise être plus anémique que ce que nous avons connu au cours des précédentes crises immobilières», a averti hier le président de la Fed de Boston, Eric Rosengren.
Hier encore, les marchés ont dû digérer l'annonce d'une chute en février de l'activité industrielle de la région de Chicago, revenue à son plus bas niveau en six ans.
La production, les commandes et les stocks ont baissé. L'emploi est tombé à son plus bas niveau depuis janvier 2002, ce qui est un mauvais signe car un marché du travail en mauvaise santé se traduit par des revenus moins élevés pour les ménages. Et dans le même temps, les prix ont continué de progresser à un rythme élevé.
Dans ce contexte, la confiance des ménages ne cesse de se détériorer. Elle est tombée à 70,8 points en février, contre 78,4 en janvier, selon l'indice de l'université du Michigan publié hier.