La SGF verse 100 millions pour Alliance Films

Tournage dans le Vieux-Montréal. La SGF a investi 258 millions dans le domaine du cinéma depuis octobre 2006. Photo: Bureau de cinéma de Montréal
Photo: Tournage dans le Vieux-Montréal. La SGF a investi 258 millions dans le domaine du cinéma depuis octobre 2006. Photo: Bureau de cinéma de Montréal

Pour la troisième fois en 15 mois, la Société générale de financement (SGF) investit dans le cinéma. Confirmant hier les rumeurs qui circulaient depuis peu, la société d'État a versé 100 millions pour acquérir le contrôle du distributeur Alliance Films, dont le catalogue met notamment en vedette le long métrage Atonement.

La SGF, dont cette prise de participation dans le plus gros distributeur indépendant au Canada porte à 258 millions ses investissements de nature cinématographique depuis octobre 2006, croit que l'ensemble de son portefeuille peut générer un rendement annuel de 10 %, a dit au Devoir le vice-président aux communications, Christian Lessard.

Concrètement, la SGF détiendra 38,5 % d'Alliance Films, une participation qui lui confère 51 % des droits de vote. La transaction, cependant, est particulière en ce sens qu'une des conditions porte carrément sur le rapatriement du siège social d'Alliance Films de Toronto vers Montréal, où l'entreprise a été fondée.

«En plus de la visibilité accrue pour Montréal, ce partenariat générera d'importantes retombées économiques. Il contribuera également au transfert d'emplois bien payés qui enrichissent l'économie de la métropole», a dit dans un communiqué le président de la SGF, Pierre Shedleur, en y voyant un stimulant pour l'industrie du cinéma au Québec.

Environ 200 personnes travaillent chez Alliance Films, dont les trois quarts sont présentement à Toronto alors que le quart est à Montréal. Au terme de l'opération, pendant laquelle une partie de la haute direction déménagera, dont le président d'origine montréalaise, Victor Loewy, le personnel montréalais comptera pour la moitié du total. Il a été impossible de joindre M. Loewy hier.

L'autre actionnaire: Goldman Sachs

Alliance Films, qui détient les droits canadiens sur les films de New Line Cinema et Miramax, entre autres, est l'héritier des activités de distribution qui se trouvaient jadis dans le grand giron de l'empire Alliance Atlantis. Celui-ci a été racheté en janvier 2007 pour 2,3 milliards par le groupe CanWest et l'investisseur américain Goldman Sachs.

Les activités de distribution, de fil en aiguille, étaient devenues la propriété de Goldman Sachs. En raison des lois canadiennes, Goldman Sachs devait trouver un partenaire canadien. À l'été 2007, il en a trouvé un: le groupe torontois EdgeStone Capital Partners, qui a pris 51 % de la distribution alors que Goldman en avait 49 %.

La relation entre EdgeStone et Goldman Sachs n'a pas porté fruits. En novembre 2007, le groupe new-yorkais s'est mis à la recherche d'un acheteur. Ayant déjà croisé la SGF dans d'autres transactions, Goldman Sachs lui a soumis l'idée. Les discussions ont duré deux mois.

Les dernières données financières au sujet d'Alliance Films remontent à la mi-2007, à l'époque où elles étaient encore recensées dans les documents d'Alliance Atlantis. Pour les six premiers mois de 2007, les revenus de distribution se sont chiffrés à 197 millions, en hausse de 7 % par rapport à 2006. Le bénéfice s'est chiffré à 14,5 millions, comparativement à 11,3 millions l'année précédente.

M. Lessard n'a pas voulu commenter le rendement précis que la SGF attend de ce qu'elle vient d'acheter. Un analyste qui a déjà couvert Alliance Atlantis, Carl Bayard, de Genuity Capital Markets, a affirmé qu'«à l'époque ça allait bien» dans l'unité de distribution de films.

«Ils avaient une part de marché de 25 % au Canada et bénéficiaient du fait qu'ils ont eu Le Seigneur des anneaux pendant trois ans. Lorsque ça s'est terminé, ç'a été un peu plus difficile, et une diversification des activités en Espagne a été mal exécutée, mais dans l'ensemble, c'était une bonne "business"», a dit M. Bayard.

Il s'agit pour la SGF d'un troisième investissement dans le secteur. En 2006, elle a investi 18 millions dans un projet de 270 millions pour le tournage de 15 films par la maison de production hollywoodienne de Joel Silver, Dark Castle. Cela prévoit le tournage de six films au Québec.

Et en 2007, la SGF a conclu une entente de partenariat de 400 millions avec Lionsgate. La SGF a investi 140 millions et affirme que plus de 15 films et séries télévisées seront tournés au Québec en quatre ans.

Grève des scénaristes

Par ailleurs, la SGF affirme que la grève des scénaristes américains de cinéma et de télé n'a pas d'impact sur elle. «Pour l'instant, on n'a pas d'indications selon lesquelles des projets seraient reportés ou annulés, a dit M. Lessard. Deux tournages de Dark Castle à Montréal débuteront comme prévu.»

Si le conflit perdure, il pourrait y avoir un impact sur le calendrier de production. «Il faudrait que ça dure longtemps, a dit M. Lessard. Mais notre investissement avec Dark Castle porte sur 15 productions, [alors même s'il y avait un délai], dans l'ensemble ça ne changerait pas grand-chose.»

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