Quebecor World: les actionnaires perdent confiance
Le cours du titre de Quebecor World a subi une nouvelle dégringolade hier après qu’un plan de sauvetage censé lui éviter la faillite semble avoir fait perdre aux actionnaires leurs derniers espoirs de recouvrer un jour leur mise.
L’action de l’imprimeur a connu une autre mauvaise journée à la Bourse de Toronto hier en perdant presque 42 % de sa valeur, clôturant à 47 ¢, soit 34 ¢ de moins que la veille (81 ¢). Cela remplaçait l’ancienne marque de 71 ¢ comme plus bas niveau atteint au cours des 52 dernières semaines et marquait une nouvelle étape dans la descente aux enfers de la compagnie, dont le titre valait encore 13 $ cet été, 17,25 $ en février et une quarantaine de dollars il y a cinq ans.La poursuite de cette débandade s’est produite au lendemain de l’annonce, par Quebecor World, qu’il acceptait le plan de financement de 400 millions proposé par Quebecor inc. et Brookfield Asset Management visant à l’aider à faire face à ses obligations auprès de ses banquiers. Ces derniers avaient laissé à la compagnie en difficulté jusqu’à hier pour leur dire comment elle entendait leur rembourser un total de 750 millions d’ici la fin de juin. Une première tranche de 125 millions devait en principe être versée hier.
Leur réaction au plan accepté lundi soir par Quebecor World était attendue par les investisseurs avec impatience hier, mais elle n’est jamais venue. Le syndicat bancaire dirigé par la Banque Royale semble avoir décidé de se prévaloir d’un autre délai que lui accordait Quebecor World jusqu’à ce soir 21h. On devrait savoir alors si ces banques acceptent la proposition qui leur est faite, si elles ont une autre solution à proposer ou si elles préfèrent pousser à la faillite le géant de l’imprimerie, à tout le moins pour le forcer à se restructurer en profondeur.
Le plan de 400 millions proposé par Quebecor World serait financé à parts égales par la société mère Quebecor inc. et Tricap Partners, un fonds de placement géré par Brookfield Asset Management. Si elle est acceptée par les banquiers, la proposition de sauvetage prévoit une facilité de paiement immédiate de 200 millions qui serait remplacée par la suite par un plan de recapitalisation comprenant une émission de billets garantis de premier rang de 400 millions au profit de Quebecor et Tricap ainsi qu’un certain nombre d’actions subalternes leur assurant 75 % de l’ensemble des capitaux propres de Quebecor World après dilution, alors que Quebecor inc. ne détient actuellement que 35,5 % des actions de la compagnie. Les banques devraient également s’engager à ne rien entreprendre pendant au moins deux ans.
Ce plan aurait pour effet de diviser par dix l’avoir des actionnaires. Il ramènerait les actions privilégiées au statut d’actions subalternes. Les 400 millions de titres de dette détenus par Quebecor et Tricap sous forme de billets garantis de premier plan auraient aussi préséance sur les titres des autres créanciers, y compris ceux des banques, à l’exception des 350 millions qu’elles ont fait garantir par des comptes à recevoir.
La plupart des analystes et des observateurs accordaient hier peu de chances de succès à cette proposition. «On ne souhaite du mal à aucune compagnie, mais ne serait-il pas ultimement mieux pour Quebecor World de se servir de la loi sur les arrangements avec les créanciers pour se restructurer une bonne fois pour toutes plutôt que de prolonger son agonie et succomber un peu plus tard?», se demandait hier l’analyste Adam Shine, de la Financière Banque Nationale.
On se disait, en même temps, qu’il se pourrait bien que les banques préfèrent malgré tout donner encore une chance à leur cliente dans l’espoir qu’elle retrouve ses assises. Leur réponse devrait venir aujourd’hui.