Banques américaines cherchent capitaux désespérément

New York — Les grandes banques américaines cherchent frénétiquement à se renflouer avant la publication imminente de résultats annuels désastreux, en appelant à l'aide des investisseurs arabes et asiatiques, en réduisant dividendes et effectifs, ou en vendant des filiales.
La plus touchée, Citigroup cherche à lever entre huit et 15 milliards $US d'argent frais dans le Golfe ou en Chine, selon la presse, pour compenser des dépréciations d'actifs qui pourraient dépasser 20 milliards.Citigroup pourrait annoncer cette nouvelle injection de fonds dès aujourd'hui, jour où elle publie ses comptes du quatrième trimestre, qui devraient être massivement ««dans le rouge» sous l'effet de dépréciations d'actifs comprises entre 15 à 24 milliards $US.
Une conséquence de la perte de valeur des crédits hypothécaires subprimes accordés trop facilement à des emprunteurs fragiles, incapables de rembourser.
Signe de la fébrilité des marchés, les estimations varient considérablement: pour Citigroup, la banque d'affaires Bear Stearns prévoit des dépréciations de 16 milliards et la société de Bourse Susquehanna attend 15 à 20 milliards. La perte par action attendue va de 17 ¢US (Deutsche Bank) à 87 ¢US (Bear Stearns).
Parmi les sauveteurs de Citigroup devraient figurer le prince saoudien Al-Walid ben Talal, longtemps le principal actionnaire de la banque (avec 5 % du capital), la banque chinoise China Development Bank, avec deux milliards, ainsi que le fonds d'investissement du Koweit, KIA, avec deux à trois milliards.
L'essentiel des fonds devrait venir de Chine, mais rien n'est encore acquis: selon le Wall Street Journal d'hier, le gouvernement chinois pourrait bloquer l'apport de la China Development Bank.
Un deuxième appel
Ce serait pour Citigroup son deuxième appel aux fonds étrangers, après l'apport de 7,5 milliards du fonds d'investissement d'Abou Dhabi en novembre.
Particulièrement exposée aux crédits hypothécaires de mauvaise qualité, avec 55 milliards $US de ces titres invendables en portefeuille, Citigroup, dont l'action a chuté de 48 % en un an, doit d'urgence rassurer les marchés.
Elle envisage donc aussi d'émettre pour quatre milliards $US d'actions ou encore de réduire drastiquement son dividende, peut-être de moitié, afin d'économiser cinq à 10 milliards $US, toujours selon la presse.
La banque vient par ailleurs d'annoncer la vente de sa filiale italienne de banque privée au groupe Credito Emiliano.
Elle préparerait enfin un plan massif de licenciements concernant 10 % de ses effectifs, soit plus de 20 000 personnes.
Merrill Lynch aussi
Autre banque en grandes difficultés, Merrill Lynch, qui annonce ses résultats jeudi, devrait selon les analystes afficher des dépréciations de 12 à 20 milliards $US et chercherait quatre milliards auprès du fonds souverain du Koweit — comme Citigroup.
Et comme Citigroup, Merrill ferait ainsi pour la seconde fois appel aux fonds internationaux, après avoir obtenu en décembre 6,2 milliards auprès du fonds Temasek de Singapour et du gestionnaire de Sicav Davis Selected Advisors.
JP Morgan surnage
En revanche, JP Morgan, qui publie ses comptes trimestriels demain, pourrait s'en tirer avec une baisse de seulement 14 % de son bénéfice, selon le Financial Times, et profiter de cette relative bonne santé pour racheter des concurrents comme Washington Mutual ou SunTrust.
Au total les banques américaines pourraient annoncer pour le quatrième trimestre des dépréciations cumulées de plus de 40 milliards $US, alors que se profile un problème supplémentaire: les défauts de paiements des détenteurs de carte de crédit, qui pourrait obliger les banques à de nouvelles provisions.
Les marchés s'attendent au pire sur ce terrain après l'annonce par American Express la semaine dernière d'une brusque hausse des défauts de paiements. Et la hausse du chômage en décembre a encore accru les inquiétudes.