Vers un nouveau bras de fer chez Olymel
L'usine beauceronne d'Olymel à Vallée-Jonction, où 1200 employés font l'abattage et la découpe de porcs, sera probablement la prochaine à faire l'objet d'une tentative majeure de redressement, a appris hier Le Devoir auprès de sources syndicales.
L'annonce prochaine serait la suite logique de la réorganisation que tente déjà d'effectuer Olymel, laquelle souffre, comme toute l'industrie, de l'appréciation du dollar canadien, du moratoire sur la production appliqué depuis 2002 et de la maladie qui a décimé une partie du cheptel.La forme précise que prendra la tentative de redressement à Vallée-Jonction demeurait inconnue hier, mais elle s'inscrit directement dans le cadre de l'effort de restructuration auquel participe Lucien Bouchard depuis cet été. Négociateur patronal et avocat au cabinet Davies, Ward, Philips & Vineberg, il a reçu le mandat d'Olymel de s'adresser tant aux producteurs porcins qu'aux acteurs syndicaux afin de trouver des moyens de remettre l'entreprise sur les rails.
Les responsables syndicaux en ont déjà plein les bras avec l'annonce faite par Olymel, lundi, au sujet de la fermeture prochaine de deux établissements proches l'un de l'autre, soit l'usine de découpe située à Saint-Simon, près de Saint-Hyacinthe, et l'usine d'abattage de Saint-Valérien, qui l'approvisionnait. Les deux comptent 559 employés.
Ce n'est pas la première fois qu'Olymel tente de fermer l'usine de Saint-Simon. L'entreprise a essuyé plusieurs défaites de nature juridique, la dernière étant survenue en août lorsqu'un arbitre nommé par le ministère du Travail a jugé qu'elle n'avait pas le droit de fermer l'usine, car cela contreviendrait à la convention collective. Celle-ci, qui expire l'an prochain, stipule que si l'entreprise souhaite des transferts de production, elle doit en démontrer la nécessité. L'arbitre avait estimé que cette démonstration n'avait pas été faite.
«C'est le cadeau annuel d'Olymel envers ses travailleurs, pour le bon travail qu'ils ont fait durant l'année», a dit Richard Martin, président du syndicat des employés de l'usine de Saint-Simon, affilié à la CSN. «Ça fait deux ans qu'on reçoit le même.»
Le prochain chapitre pourrait de nouveau s'écrire devant les tribunaux, a dit M. Martin, qui réagissait pour la première fois hier. «C'est entre les mains du juridique et on va évaluer ça. Est-ce que ça s'apparente à un outrage au tribunal? C'est l'option qu'on étudie.» M. Martin a estimé que l'entreprise avait tout simplement passé au peigne fin la décision de l'arbitre et tenté de trouver un moyen de justifier la fermeture de l'usine de Saint-Simon. D'où la décision, possiblement, de fermer l'usine qui l'approvisionnait. «On a beau envisager tous les chemins juridiques, mais cette entreprise-là ne respecte rien.»
Olymel a décidé d'aller en Cour supérieure pour contester la décision de l'arbitre et serait entendue en avril. La fermeture des deux usines est prévue le 30 mars. Le ministre de l'Agriculture, Yvon Vallières, a promis de faire «le maximum» pour aider les employés.
Départ de Winnipeg
L'entreprise, qui commercialise ses produits sous les marques Olymel, Lafleur et Flamingo, est une société en commandite dont le principal actionnaire est la Coopérative fédérée du Québec. Il y a aussi deux associés minoritaires, soit le Groupe Brochu et la Société générale de financement. L'entreprise compte 10 000 employés et génère des ventes de près de 2,5 milliards. Elle exporte la moitié de ses ventes.
Il n'y a pas qu'au Québec que l'entreprise tente de rectifier le tir. Olymel a annoncé hier que l'état des choses est d'ailleurs si préoccupant sur la scène locale qu'elle se retire du consortium OlyWest, lequel comptait bâtir une usine d'abattage, de découpe et de transformation à Winnipeg. Le consortium incluait aussi les producteurs Hytek et Big Sky Farms, qui a quitté.
«Notre décision répond à l'urgence de consacrer toutes les énergies d'Olymel à trouver des solutions à la crise qui secoue l'industrie porcine au Québec et qui a entraîné des pertes substantielles pour l'entreprise depuis 2003», a dit le président-directeur général d'Olymel, Réjean Nadeau.