Shell reproche à Washington sa position anti-Kyoto

Dubaï — Le p.-d.g. de Royal Dutch Shell PLC a reproché hier à Washington d'avoir renié le protocole de Kyoto, affirmant que si le gouvernement américain soutenait une structure de réglementation mondiale, cela permettrait d'instaurer des mesures incitatives qui amèneraient les pétrolières à réduire leurs émissions de dioxyde de carbone.
«Pour nous comme compagnie, le débat concernant le CO2 est terminé. Nous avons commencé à débattre de quelle façon il faut réagir», a déclaré Jeroen Van Der Veer devant des centaines de dirigeants du monde des affaires et de la politique du Moyen-Orient et d'ailleurs.Un Américain participant au forum arabe de discussion stratégique a demandé à M. Van Der Veer si les projets d'affaires de la compagnie en matière d'énergie avaient été affectés par les réactions négatives à l'endroit du réchauffement de la planète et des carburants à base de pétrole qui sont la principale source des émissions de CO2.
M. Van Der Veer a affirmé que les sociétés d'énergie seraient prêtes à travailler de concert avec les gouvernements afin de résoudre cette problématique, à la condition qu'il y ait une structure mondiale de réglementation pour obliger les gouvernements à respecter les mêmes normes. Il a déclaré que le protocole de Kyoto, qui concerne 35 pays industrialisés, constituait un bon départ.
«Vous êtes des États-Unis. Pourquoi ne pas vous joindre à l'entente de Kyoto?, a demandé M. Van Der Veer à l'Américain. Il y a une structure de base qui existe et vous pouvez bâtir là-dessus en vue de l'avenir.»
L'administration Bush a refusé d'entériner le protocole de Kyoto peu après avoir pris le pouvoir en 2001. L'administration précédente, celle de Bill Clinton, avait signé l'entente en 1997, tout comme les membres de l'Union européenne et le Japon.
De la même façon, au Canada, le gouvernement conservateur a fait marche arrière dans le dossier de Kyoto et formulé de nouveaux engagements afin de combattre le réchauffement de la planète.
L'urgence de réduire les émissions de CO2 pourrait bientôt devenir plus manifeste. La tête dirigeante de Shell a déclaré que la consommation d'énergie augmentera de 50 % d'ici les 25 prochaines années, à cause surtout de la demande accrue pour le pétrole et le gaz naturel en Chine et en Inde, mais aussi dans le monde occidental.
M. Van Der Veer a déclaré qu'il fallait uniformiser les règles du jeu au point de vue du respect de l'environnement et s'assurer que tous les pays les suivent. Sinon, des compagnies comme Shell auraient peu d'intérêt à investir dans des mesures dispendieuses de réduction d'émissions polluantes, puisqu'elles pourraient tout simplement déménager dans un pays voisin qui n'a pas adopté des normes aussi sévères.
Shell cherche des moyens de réduire ses émissions de CO2 en emprisonnant et peut-être même en injectant le dioxyde de carbone sous terre. De cette façon, le CO2 pourrait même être utile, en ce sens qu'il permettrait d'augmenter la pression dans les champs de pétrole épuisés et de récupérer plus facilement le pétrole qui reste, a expliqué M. Van Der Veer.
«Je pense que la meilleure approche, c'est d'y voir une belle occasion d'explorer de nouvelles façons de faire, a déclaré M. Van Der Veer. Peut-on conserver le CO2 et l'utiliser pour mieux récupérer le pétrole? Où pouvons-nous le garder en stock?»