La débandade du secteur forestier se poursuit - Abitibi-Consolidated ferme quatre usines

La compagnie forestière Abitibi-Consolidated ferme quatre scieries, suspend ses activités d'exploitation forestière sur la Côte-Nord et met ainsi 700 personnes à pied au Québec, ajoutant à la débandade du secteur qui s'est intensifiée au cours des derniers mois.
Du 1er avril 2005 à octobre 2006, un total de 3000 emplois ont disparu au Québec à la suite de la fermeture définitive de 36 usines, selon des données provenant du Conseil de l'industrie forestière du Québec. Pendant la même période, il y a eu en outre 4144 travailleurs mis en disponibilité, pour des périodes plus ou moins longues, en raison de la fermeture temporaire de leur usine.Du côté du Parti québécois, on a relevé quatre fermetures temporaires d'usines la semaine dernière et la mise sur le carreau de quelque 1100 travailleurs. S'y ajouteront le 16 octobre prochain, pour une période indéterminée, les 380 travailleurs des usines d'Abitibi-Consolidated de Champneuf (Abitibi-Témiscamingue), Saint-Raymond (Capitale nationale), Saint-Thomas (Saguenay-Lac-Saint-Jean) et Outardes (Côte-Nord). De ce nombre, la moitié travaillent à Outardes.
La capacité annuelle de production de ces établissements représente environ 20 % de la capacité de production d'Abitibi-Consolidated. «Le coût élevé de production, incluant celui de la fibre, combiné à la détérioration des conditions du marché du bois d'oeuvre, ne nous laisse aucune autre alternative que de rationaliser notre capacité de production», a expliqué Yves Laflamme, premier vice-président responsable des divisions forestières et scieries chez Abitibi-Consolidated.
«La date de redémarrage des opérations sera déterminée entre autres par la combinaison de la réduction des coûts et par l'augmentation des prix pour les produits du bois», a-t-il ajouté.
Les opérations forestières seront également suspendues sur la Côte-Nord à compter du 16 octobre, touchant environ 300 travailleurs additionnels. Abitibi-Consolidated a en outre indiqué que les opérations forestières dans d'autres régions pourraient également être perturbées selon la durée des fermetures des scieries.
Peu de surprise
À Longueuil, où se tient un caucus de deux jours des députés libéraux, le ministre des Ressources naturelles Pierre Corbeil s'est montré peu surpris par cette annonce compte tenu de la détérioration rapide et importante des prix des matériaux de construction. «Les conditions du marché se sont détériorées rapidement et de façon très importante. Les prix des matériaux de construction ont baissé du mois de juillet à août de façon presque dramatique, ce qui fait que plusieurs scieries sont en deçà de leurs coûts de production», a commenté le ministre.
«Les fermetures sont annoncées pour des périodes qu'on espère la plus courte possible et on va travailler à remettre ces gens-là le plus rapidement au travail. On continue le travail de relance, de consolidation et de restructuration, a ajouté le ministre Corbeil. J'ai fait des annonces dans le Pontiac et l'Outaouais et, la semaine dernière, sur la Côte-Nord et le Bas-Saint-Laurent, au cas par cas, situation par situation.»
Le ministre Corbeil a rappelé que Québec avait adopté un plan d'action en mars dernier, dont des garanties de prêts, pour aider l'industrie à traverser cette période difficile. Cependant, l'industrie a vite considéré que dans bien des cas elle ne pouvait même pas se qualifier pour profiter des programmes offerts. Dans ce contexte, le gouvernement s'est engagé à bonifier son plan d'action et une annonce est attendue au cours des prochaines semaines, voire d'ici la fin de la semaine.
Le plan concocté par différents ministères pourrait être étudié dès la prochaine séance du conseil des ministres, demain, selon ce qu'a laissé entendre mardi le ministre du Développement économique, Raymond Bachand. «Vous verrez dans les prochains jours un plan majeur qu'on fait avec l'industrie forestière' pour restructurer cette industrie, a-t-il dit.
«La question de la forêt est très préoccupante et on est là-dessus à plein temps», a renchéri le ministre des Finances, Michel Audet.
Le ministre Corbeil a pour sa part illustré ainsi le glissement rapide des prix. Dans le secteur des panneaux OSB (oriented stratefied board), les 1000 pieds étaient à 260 $ US l'an dernier comparativement à 170 $ US présentement, d'où la décision de Louisiana Pacific de fermer ses installations de Saint-Michel-des-Saints. «Même chose pour le deux par quatre sec. Il a baissé de plus de 130 $ US du 1000 pieds, une détérioration importante, rapide que personne n'avait prévu, même pas le Conseil de l'industrie forestière du Québec», a renchéri le ministre.
M. Corbeil mise sur la reprise de la demande américaine. «Il va falloir que les mises en chantier reprennent aux États-Unis. On nous dit qu'il y a 500 000 maisons invendues, une situation qui va se rétablir dans un peu de temps.»
Du côté du Parti québécois, la porte-parole de l'opposition officielle en matière de mines, de terres et de forêts, Danielle Doyer, a dit s'inquiéter de «l'impassibilité» du ministre des Ressources naturelles. «La semaine dernière, le ministre Corbeil banalisait la crise forestière en disant qu'il fallait cesser de crier au loup. Le problème, c'est qu'en une semaine seulement les régions forestières ont vu 1800 de leurs travailleurs perdre leur emploi, dont 1000 sur la Côte-Nord seulement», a-t-elle commenté.
Des fermetures temporaires d'usines ont été annoncées la semaine dernière par Tembec (trois usines), Kruger (quatre), Domtar (deux) Cascades (une usine) et Groupe Cédrico (deux).