Scandale Enron - La SEC est montrée du doigt

New York — Le gendarme américain de la Bourse (SEC) est tancé pour n'avoir rien vu venir dans le scandale Enron. Le patron Harvey Pitt, de plus en plus contesté, se retrouve également fragilisé alors qu'il est considéré comme un élément essentiel pour restaurer la confiance des investisseurs.

Un rapport d'une commission du Sénat a mis au jour «l'échec systémique et catastrophique» de la SEC à découvrir les malversations comptables à grande échelle ayant mené à la chute spectaculaire du courtier en énergie texan Enron, et en particulier des véhicules financiers secrets qui lui ont permis de cacher une montagne de dette. Ainsi, les agents de la SEC n'ont passé en revue aucun des rapports annuels du groupe après 1997, affirment les deux sénateurs présidant la Commission, Joseph Lieberman et Fred Thompson, dans une lettre au président de la SEC Harvey Pitt.

«Si la SEC avait interrogé Enron sur ces faits et d'autres détails troublants apparus dans le rapport annuel de 1999, une partie des pertes énormes subies par les employés et les investisseurs aurait pu être évitée», écrivent-ils. «Quelles que soient les raisons qui empêchent la SEC de passer en revue les documents qu'elle collecte avec une régularité suffisante et d'utiliser les critères de sélection adéquats — le manque de ressources et les limites technologiques n'ont certainement pas été d'un grand secours — les investisseurs sont en droit d'attendre une meilleure protection du dernier rempart de régulation des marchés», ajoutent les deux sénateurs.

Cette critique arrive au plus mauvais moment pour la SEC qui a souvent prévenu de l'indigence de ses moyens. Elle est l'un des fers de lance chargé de restaurer la confiance des investisseurs dans les marchés et les entreprises après une série de scandales aux effets économiques et surtout psychologiques dévastateurs.

La SEC a été créée en 1934 déjà pour restaurer la confiance du public après le krach boursier de 1929, mais compte seulement 2900 agents. Le président George W. Bush a promis de lui donner plus de moyens et a pressé le Congrès de débloquer «immédiatement» les fonds nécessaires.

La réponse initiale de Harvey Pitt est brève. «Sous ma houlette, nous avons déjà pris d'importantes initiatives pour améliorer la transparence des entreprises et appliquer les loi boursières sans délai», a-t-il écrit, promettant d'étudier de très près le rapport.

Campagne contre Pitt

Pour ajouter aux problèmes, la campagne permanente contre M. Pitt s'est de nouveau enflammée.

Il est sous pression pour nommer le président d'un nouvel organisme de régulation de la profession comptable. Il a dû démentir la nomination de John Biggs, qui dirige un important fonds de pension d'enseignants et qui s'est montré très critique envers la profession comptable.

Enfin, nombre d'élus démocrates et républicains réclament régulièrement sa démission. Son passé d'avocat et de lobbyiste pour la profession comptable, font peser le soupçon d'un conflit d'intérêts.

Certains impairs, comme des rencontres avec des dirigeants d'entreprises faisant l'objet d'une enquête de ses services, ont aussi miné sa crédibilité.

De plus le Wall Street Journal rapportait hier que les dissensions internes au sein de la SEC se font plus vives. Mais Harvey Pitt a pour l'heure toujours bénéficié du soutien public du président Bush.

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