Adopter le réflexe écoresponsable

Rose Carine Henriquez
Collaboration spéciale
Pour la pièce Clandestines, une création du Centre du Théâtre d’Aujourd’hui et du Théâtre de l’Affamée, des stratégies écoresponsables ont été mises en place par ce dernier avec le support d’Écoscéno.
Photo: Valérie Remise Pour la pièce Clandestines, une création du Centre du Théâtre d’Aujourd’hui et du Théâtre de l’Affamée, des stratégies écoresponsables ont été mises en place par ce dernier avec le support d’Écoscéno.

Ce texte fait partie du cahier spécial Théâtre

Au fil des initiatives et des prises de position qui se succèdent, une sensibilisation aux enjeux écoresponsables est bien présente dans le milieu théâtral. Mais comme tout processus de transformation, il y a encore des obstacles à franchir et des schémas de pensée à réformer.

D’effort en effort, le milieu des arts de la scène, et particulièrement celui du théâtre, tend à adopter des principes écoresponsables. Une tendance se dessine et il existe une réelle volonté de joindre le geste à la parole, selon la directrice générale du Conseil québécois des événements écoresponsables (CQEER), Caroline Voyer. Mais il manque encore quelque chose : « Je pense qu’il faut que cela devienne un prérequis, une norme », soutient-elle.

Comme entrave au changement, Anne-Catherine Lebeau, directrice générale et cofondatrice de l’OBNL Écoscéno, qui accompagne la communauté artistique dans la transition socioécologique, blâme le rythme rapide des productions théâtrales. Elles s’enchaînent à une vitesse qui ne permet pas de défaire complètement les vieux automatismes. « Nous sommes dans un système avec des productions très éphémères, ce qui n’aide pas la transition, avance-t-elle. La transition, c’est produire mieux, mais aussi produire moins. » À titre d’exemple, même si l’on diminuait de 50 % leur impact environnemental, produire deux fois plus de spectacles rendrait cette démarche caduque.

Au-delà des actions coup-de-poing, il faut bâtir une vision à long terme. Un principe qui est au coeur de la démarche première en son genre de l’OBNL, qui est en activité depuis 2019. « Ce que nous cherchons à faire en écoconception, c’est être plus respectueux des ressources naturelles planétaires, mais aussi des ressources humaines, explique Anne-Catherine Lebeau. Nous cherchons à créer de nouveaux rythmes et des contextes de création où on a le temps de changer les choses. »

L’art de s’accommoder des contraintes

Penser autrement ses pratiques artistiques vient-il nuire à la liberté de création ? Ce n’est pas ce que s’entendent pour dire Mmes Voyer et Lebeau. De leur point de vue et de celui des artistes, il s’agit d’une contrainte comme peuvent l’être le budget, le lieu ou l’idéation elle-même. Pour Caroline Voyer, ce changement est même une porte ouverte aux possibilités. « C’est une occasion de découvrir de nouveaux matériaux et de nouveaux fournisseurs. Cela développe une autre forme de créativité, qui vient avec un sentiment de satisfaction », croit-elle.

Il est nécessaire de lier les gestes artistiques aux remises en question, même si elles sont difficiles, selon Anne-Catherine Lebeau, qui préconise l’idée de mettre la créativité au service de ces enjeux. « Au lieu d’accélérer les changements climatiques, on améliore le contexte en communiquant ces messages aux spectateurs aussi », pointe celle qui remarque que de plus en plus d’amoureux du théâtre font leur choix de pièces en fonction de la place accordée à l’écoresponsabilité dans le processus de création.

À travers ses formations et son accompagnement en écoconception (ainsi que son service de réemploi temporairement à l’arrêt), Écoscéno est aux premières loges pour assister à un éveil collectif. De même que le CQEER, qui accompagne depuis 2008 les diffuseurs dans leurs changements de pratiques. Caroline Voyer observe un désir des acteurs du milieu de dépasser une écoanxiété latente. « Ils ont vraiment besoin de passer à l’action et de poser des gestes concrets. Ils veulent faire partie des solutions », estime-t-elle.

L’évolution se fait même sentir à travers les formations professionnelles. « Cela commence à se voir », confirme Anne-Catherine Lebeau, qui a rencontré des finissants qui ne pouvaient pas imaginer créer des choses sans se questionner sur les impacts de leur choix. « La plupart des gens souhaitent incarner le changement qu’ils veulent voir advenir. C’est aussi pour cela que nous avons des créateurs : pour imaginer un nouveau monde. »

Être reconnu pour son engagement

À l’initiative du Réseau des femmes en environnement et du CQEER, le programme d’accréditation Scène écoresponsable vise à structurer et à reconnaître les actions concrètes des lieux de diffusion en matière d’écoresponsabilité. Des initiatives telles que l’utilisation de vaisselle réutilisable, l’attention portée à la consommation énergétique ou la réduction du matériel d’affichage peuvent valoir aux institutions une accréditation selon plusieurs niveaux (argent, bronze et or). La gestion des achats responsables, l’implication dans la communauté ou encore la gestion des déchets, du recyclage, du transport et de l’énergie sont notamment évaluées. L’accréditation doit être renouvelée tous les deux ans. S’engager dans une telle démarche vient non seulement envoyer un message fort, mais aussi servir d’exemple dans un mouvement qui ne fait que grandir.

Ce contenu spécial a été produit par l’équipe des publications spéciales du Devoir, relevant du marketing. La rédaction du Devoir n’y a pas pris part.



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