Luc Picard incarnera Jean-Paul Riopelle au théâtre

La pièce du dramaturge Robert Lepage soulignera aussi le 50e anniversaire de la Compagnie Jean-Duceppe.
Photo: Adil Boukind Le Devoir La pièce du dramaturge Robert Lepage soulignera aussi le 50e anniversaire de la Compagnie Jean-Duceppe.

C’est avec comme toile de fond L’hommage à Rosa Luxemburg, mais aussi l’ensemble de l’histoire du Québec du dernier siècle, que le dramaturge Robert Lepage entend déployer la pièce de théâtre qui marquera en 2023 le 100e anniversaire de naissance de Jean-Paul Riopelle, et le 50e anniversaire de la Compagnie Jean-Duceppe.

Encore en cours de création, la pièce répond présentement au nom de travail de « Projet Riopelle », mais on sait déjà que ce sont Luc Picard et Anne-Marie Cadieux qui y interpréteront Jean-Paul Riopelle et sa compagne Joan Mitchell, à l’âge adulte.

Réalisé par Riopelle à la fin de sa vie, alors que la peintre Joan Mitchell venait de mourir, L’hommage à Rosa Luxemburg est un triptyque constitué de trente vignettes, qui symbolisent souvent des événements précis vécus par son créateur. Robert Lepage s’en servira comme fondement de trois actes dans la vie de Riopelle. « On a des intentions, des idées, des thèmes », dit-il, mais on est encore loin du produit final.

Chose certaine, il y aura beaucoup d’acteurs qui tourneront autour des protagonistes, incarnant André Breton, Samuel Beckett, Paul-Émile Borduas ou Alberto Giacometti, par exemple.

Intarissable d’anecdotes

En entrevue, Robert Lepage est intarissable d’anecdotes survenues dans la vie de Riopelle. Il dit d’ailleurs vouloir que les dialogues de la pièce, dont la première représentation est prévue pour l'an prochain, soient ancrés dans de véritables échanges, dont témoignent les imposantes archives concernant l’artiste.

Il raconte notamment que le peintre, avant la signature du manifeste Refus global, avait signé à Paris le manifeste Rupture inaugurale, présenté par André Breton. Ce dernier souhaitant recruter des signataires au Québec, Jean-Paul Riopelle et Fernand Leduc y apportent le manifeste, que le groupe de Paul-Émile Borduas rejette, pour plutôt lancer le Refus global, qui répondait mieux à ses aspirations.

« Qui, de Riopelle ou de Fernand Leduc, a rapporté le manifeste Rupture inaugurale de Paris ? », le mystère demeure, lance-t-il en entrevue. Il ajoute d’ailleurs que Jean-Paul Riopelle était un peu « mythomane », et que, sans inventer des événements, il avait tendance à en grossir l’ampleur dans chacune des nouvelles versions présentées.

Il raconte aussi que Riopelle faisait partie des discussions qui ont entouré la mise en scène d’En attendant Godot, de Samuel Beckett.

Joan Mitchell, quant à elle, était américaine, même si elle est ensuite allée vivre avec Jean-Paul Riopelle à Paris. Encore aujourd’hui, sa renommée est beaucoup plus imposante à travers le monde que celle de Riopelle, relève Lepage, qui précise d’ailleurs que l’école de peinture de New York rayonnait plus fort, en cette époque d’après-guerre, que celle de Paris.

Comédiens russes en fuite

 

Passablement ralenti par la pandémie, Robert Lepage a signé sa dernière mise en scène en Russie, où il était encore en décembre dernier. Depuis, la pièce qu’il y a montée, d’après le roman Le Maître et Marguerite, du Russe Mikhaïl Boulgakov, a dû être annulée, entre autres parce que plusieurs comédiens, dont certains étaient d’ailleurs des Ukrainiens, ont quitté le pays.

C’est le cas notamment de la comédienne Chulpan Khamatova, qui a signé une pétition contre la guerre en Ukraine.

« Il y a 200 000 intellectuels qui ont quitté la Russie » depuis le début de la guerre en Ukraine, dit-il. « Les ingénieurs, les grands acteurs, les artistes sortent à pleines portes. » Quelques-uns des comédiens avec qui il a travaillé iront d’ailleurs le rejoindre à Berlin, où il présentera bientôt, dans le cadre du festival FIND, Les sept branches de la rivière Ota et 887.

Selon lui, l’opposition à la guerre est plus vivante en Russie que ne le laissent voir les sondages, même si le président Poutine tient un discours qu’il compare à ceux d’Hitler au début de la Seconde Guerre mondiale.

Et la répression russe est forte. « On retrouve la lettre Z, qui symbolise la guerre en Ukraine [et le soutien à l’armée russe], sur les portes mêmes des théâtres », dit-il.

Selon lui, la résolution de la guerre ne peut se faire qu’à partir de la Russie elle-même.

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