«Tout inclus»: une pièce qui vaut de l’or

François Grisé ajoute quatre chapitres éclairants à son enquête sur le vieillissement.
Photo: Danny Taillon François Grisé ajoute quatre chapitres éclairants à son enquête sur le vieillissement.

En 2014, à 43 ans, François Grisé s’est lancé dans une aventure pour le moins inusitée, une expérience qui allait changer le cours de sa vie personnelle et professionnelle. « Il y en a qui s’achètent des Lamborghini à crédit, il y en a qui quittent leur famille pour une femme plus jeune, moi, j’ai décidé d’aller vivre un mois dans une maison de vieux. »

Pièce en huit chapitres, dont les quatre premiers ont été créés au théâtre La Licorne en octobre 2019 avant d’être publiés par les éditions Atelier 10, Tout inclus est présenté ces jours-ci chez Duceppe dans sa version intégrale de trois heures. Grâce à François Grisé, auteur et comédien, et à Alexandre Fecteau, metteur en scène, on accède à une résidence privée pour aînés (RPA) de Val-d’Or dont les locataires traduisent en mots et en silences les forces et les faiblesses du système de santé, les félicités et les affres du vieillissement. Pas de doute, le théâtre documentaire québécois a toujours le vent dans les voiles.

Filant la métaphore aurifère — il s’agit après tout d’aborder l’âge d’or à Val-d’Or —, les quatre premiers chapitres sont consacrés au séjour d’un héros fort attachant dans les aires communes et privées des Jardins du patrimoine. Au fil des échanges de François avec Gisèle, Gerry, Lorraine, Victor, Darquise et les autres, on entend la tendresse et la complicité, mais plus encore la détresse et la résignation, le déni et la dépossession.

Les quatre chapitres suivants, chargés de faits et d’analyses mais non moins émouvants, procèdent à une essentielle mise en lumière des enjeux humains et politiques qui s’expriment dans le sort que nous réservons aux personnes âgées. Il est notamment question d’argent, de spiritualité, de marketing, de solidarité et, bien entendu, de COVID-19.

Après avoir brillamment incarné une truculente galerie de résidents, Marie Cantin, Jean-François Gaudet et Marie-Ginette Guay campent en seconde partie du spectacle une éclairante sélection de spécialistes — gériatre, sociologue, stratège publicitaire et démographe — qui nous font comprendre à quel point le sort des personnes âgées concerne toute la collectivité. Selon le gouvernement du Québec, le nombre de personnes de 65 ans et plus atteindra 2 877 998 en 2061, soit 28,5 % de la population. Il semble urgent de donner des choix à ces hommes et à ces femmes, notamment celui de rester le plus longtemps possible dans leur domicile.

C’est le parcours d’Alice et de Gilles, le père et la mère de François Grisé, qui sert de fil rouge au spectacle. Cocasses et terribles, futiles et tragiques, leurs aventures nous font entrevoir avec inquiétude le sort qui attend nos parents, et bien entendu celui qui nous attend. Heureusement, Tout inclus ouvre le dialogue, déclenche une conversation cruciale qui pourrait bien faire en sorte que la vieillesse au Québec devienne une expérience plus riche, plus diverse, plus inclusive.

Tout inclus

Texte : François Grisé. Mise en scène : Alexandre Fecteau. Une coproduction de Porte Parole, Un et un font mille et Nous sommes ici. Chez Duceppe jusqu’au 6 novembre, puis en tournée à travers le Québec du 2 au 31 mars.

À voir en vidéo