«L’authenticité, un sentiment: mode d’emploi»: l’art des possibles

Après avoir présenté L’authenticité, un sentiment : mode d’emploi en Suède, en Allemagne et en Islande, Jacob Wren est de retour chez lui, à Montréal, plus précisément à La Chapelle, pour offrir cette conférence-spectacle à propos des réalisations de PME-ART, la compagnie que l’auteur, metteur en scène et comédien dirige avec Sylvie Lachance depuis un peu plus de 20 ans. Notez que, contrairement à ce que le titre pourrait laisser croire, le créateur s’adresse en anglais à la cinquantaine de spectatrices et de spectateurs réunis dans le foyer du théâtre.
La démarche de PME-ART est hautement collaborative, effrontément fragmentaire, joyeusement anticonformiste et souverainement interdisciplinaire. Elle s’appuie sur ce qu’il serait tentant d’appeler un art des possibles. En ce sens que leur mélange de théâtre, de danse, de musique, de performance et d’arts visuels découle d’un besoin d’explorer et d’inventer, mais surtout d’un désir de faire autrement, de contredire, en somme de repousser les limites… du possible. Pas étonnant que, pendant la centaine de minutes que dure sa lecture-performance — une version scénique de son ouvrage Authenticity Is a Feeling : My Life In PME-ART (Book*hug, 2018) —, Jacob Wren prononce à de multiples reprises les mots « possibility » et « possibilities ».
À (re)lire
PME-ART: du difficile art d’être ensembleEn projetant des images sur un modeste écran, en reproduisant des mouvements, en plongeant l’aiguille dans quelques vinyles, mais surtout en se remémorant le passé, les moments remarquables tout autant que les anecdotes savoureuses, sans oublier le talent et la ferveur de celles et ceux qui ont partagé son rêve, le créateur nous fait voyager dans le temps. Avec sobriété, entrelaçant les idées et les émotions, la théorie et la pratique, et surtout sans jamais perdre une once de son esprit critique envers lui-même aussi bien qu’à l’endroit de son art ou de sa société, il évoque les différentes réalisations de la compagnie, mais également Les 20 jours du théâtre à risque, le référendum de 1995, le décès de sa complice Tracy Wright, la magie d’une représentation sous l’orage en Suisse…
Né à Jérusalem en 1971, formé à Toronto, installé à Montréal depuis 2002, Jacob Wren est, qu’il le veuille ou non, le principal atout de son spectacle. Il y apparaît dans toute sa vulnérabilité, avec ses peurs et ses doutes, partageant sa dépression et ses deuils ; mais aussi dans toute sa force, avec ses convictions et ses engagements, sachant faire preuve d’autodérision et de résilience. Avec ce spectacle, une expérience instructive et émouvante, qui tient à la fois du documentaire et de l’autofiction, de la conférence et de la performance, du coup de chapeau et du devoir de mémoire, le créateur parvient à faire revivre le passé, à s’interroger sur le présent, et même à formuler quelques espoirs pour le futur.