Célébrer la parole par le chant

Kathleen Fortin rend hommage à André Gagnon, Debbie Lynch-White à de grandes femmes de la chanson, et Dominique Quesnel à l’éternel Leonard Cohen.
Photo: Marie-France Coallier Le Devoir Kathleen Fortin rend hommage à André Gagnon, Debbie Lynch-White à de grandes femmes de la chanson, et Dominique Quesnel à l’éternel Leonard Cohen.

Ici et là, au fil des ans, que ce soit au théâtre, à la télévision ou au cinéma, ces trois comédiennes ont saisi toutes les occasions de chanter. Cet hiver, elles vont plus loin encore en prenant part à un tour de chant en bonne et due forme. Kathleen Fortin rend hommage au compositeur André Gagnon, Debbie Lynch-White à de grandes femmes de la chanson et Dominique Quesnel à l’éternel Leonard Cohen.

Si Debbie Lynch-White ne peut aujourd’hui s’empêcher de chanter, c’est en bonne partie grâce à son défunt père : « C’est lui qui m’a initiée à la musique. Il jouait de la guitare. Ensemble, dans le salon, nous passions des soirées entières à chanter. Il a grandement contribué à ma culture musicale. Il m’a fait découvrir les Beatles, Led Zeppelin, Tracy Chapman… » Quand elle revenait de l’école, la jeune Debbie « cassait les oreilles » de sa mère en s’époumonant devant son miroir, une brosse à cheveux à la main : « J’étais insatiable. Je passais des heures à chanter du Céline ou du Mariah Carey. »

C’est en intégrant une chorale, à l’église, que l’adolescente réalise qu’elle a une voix pas tout à fait comme les autres : « On a commencé à me donner de plus en plus de solos. Je sentais qu’on me faisait confiance. Je recevais des commentaires élogieux. Mais je pense que c’est dans les karaokés que ça s’est confirmé, quand j’ai vu de quelle manière les gens réagissaient à ma voix. » Cet appel pour le chant, aussi fort soit-il, ne parviendra pourtant pas à éloigner la jeune femme de son rêve premier : « J’ai toujours voulu être comédienne. À huit ans, c’était déjà clair. C’est pour ça que je me définis comme une actrice qui chante, et non pas comme une chanteuse. Le chant, c’est une corde de plus à mon arc, une manière additionnelle d’interpréter, de transmettre. »

Tout le monde peut chanter

 

Depuis sa sortie de l’École nationale de théâtre en 1988, Dominique Quesnel a pris beaucoup de plaisir à chanter sur scène, de Cabaret neiges noires à Belles-sœ​urs, en passant par les Secrétaires percutantes. Pour elle aussi, l’amour du chant provient de l’enfance : « Mes parents chantaient beaucoup. Ils affectionnaient Frank Sinatra, Harry Belafonte, Emmanuëlle… Ils n’avaient pas de grandes voix, mais ils m’ont transmis le bonheur de chanter. Pour ça, je les remercie énormément. »

La comédienne est d’avis que tout le monde est apte à chanter : « Les gens qui ne chantent pas, ce sont souvent ceux qui se sont fait dire, quand ils étaient jeunes, qu’ils chantaient mal. Une chose pareille, ça peut blesser à vie. Si tu es capable de parler, tu es capable de chanter. C’est Stéphane Venne, je crois, qui a écrit : “Chanter c’est comme parler, mais c’est plus beau.” Cette phrase-là m’est toujours restée dans la tête. Je trouve ça tellement vrai. »

Photo: Marie-France Coallier Le Devoir

« En ce qui me concerne, j’ai chanté avant de parler, intervient Kathleen Fortin. À un an et demi, il paraît que j’entonnais Agadou dou dou de Patrick Zabé. Pendant toute mon enfance, j’ai baigné dans la musique. Mon père a été pianiste dans les bars. Avec mon grand-père et l’un de mes oncles, il chantait à l’église tous les dimanches. » À l’adolescence, la comédienne avoue qu’elle poussait « tout le temps » la note : « Au secondaire, je chantais dans les manifestations. Au cégep, j’étais choriste pour des groupes. J’ai donc constamment chanté, mais sans jamais penser en faire une carrière. Je me suis laissé porter par la vie et celle-ci m’a menée au théâtre, que j’ai toujours aimé parce qu’il impliquait une aventure collective. Je suis assurément une fille de bande. La chanson, qu’on le veuille ou non, c’est très individuel. »

Répertoires exceptionnels

 

Depuis novembre 2017, Kathleen Fortin présente avec le pianiste Stéphane Aubin un programme intitulé Les 4 saisons d’André Gagnon. Dans ce spectacle produit par Station bleue, en bonne partie instrumental, la quarantenaire interprète notamment des extraits de l’opéra Nelligan et du légendaire concert Leyrac chante Nelligan. « Certains soirs, c’est carrément magique, explique-t-elle. Chanter, selon moi, c’est la façon la plus directe d’être cœur à cœur avec le public. C’est une histoire de vibrations et d’âme, un exercice qui tient du dévoilement. Il y a des moments où la symbiose est telle que je me dis que c’est impossible d’atteindre ça autrement que par le chant et la musique. »

J’ai toujours voulu être comédienne. C’est pour ça que je me définis comme une actrice qui chante, et non pas comme une chanteuse. Le chant, c’est une corde de plus à mon arc. 

Depuis octobre, Dominique Quesnel célèbre avec Claude Fradette et Simon Dolan la musique de Leonard Cohen dans un spectacle intitulé Hallelujah Leonard. « Quand Claude m’a présenté le projet, je me suis vraiment demandé si j’étais capable de le faire, avoue la comédienne. Défendre une vingtaine de chansons, sans personnage, ce n’est pas rien. Finalement, en commençant le travail, j’ai cessé de douter. Je ne pense pas que j’aurais été prête à accomplir une chose pareille en sortant de l’école de théâtre. À 54 ans, avec l’expérience de scène que j’ai, c’est non seulement un grand plaisir, c’est aussi très excitant. D’autant que je chante un matériel extraordinaire, qui me permet de voyager dans des énergies très différentes, l’œuvre d’un poète immense que les gens aiment passionnément et que j’approche avec beaucoup d’humilité. »

Toutes ces femmes en elle

 

À 32 ans, Debbie Lynch-White s’apprête à présenter son premier tour de chant : Elle était une fois. Au menu de ce spectacle mis en scène par Frédéric Dubois : des chansons écrites par des femmes, de ClémenceDesrochers aux Spice Girls, en passant par Barbara, Édith Piaf, Lisa LeBlanc et Adele.

Le 22 février, la jeune femme — accompagnée par Gabriel Gratton à la direction musicale et aux claviers, Simon Pedneault aux guitares et Lisandre Bourdages à la batterie — fera sa rentrée montréalaise au théâtre Maisonneuve de la Place des Arts avant d’entamer une tournée qui la mènera dans une quinzaine de villes au Québec. Rien de moins.

« Il y a une partie d’innocence dans tout ça, concède volontiers la principale intéressée. Je ne sais pas trop où je prends ce courage. Lorsque Spectra m’a proposé de mettre sur pied ce spectacle, j’ai accepté sans hésiter. D’abord parce que je suis extrêmement bien quand je chante. Ensuite, parce que j’avais envie de relever le défi, de défendre ces chansons qui me tiennent à cœur et de le faire à ma manière, avec une bonne dose de théâtralité. À vrai dire, je me suis lancée là-dedans sans trop me poser de questions ; et je pense que c’est exactement ce qu’il fallait faire. »


Kathleen Fortin dans Les 4 saisons d’André Gagnon

En tournée jusqu’au 14 avril, notamment au théâtre Outremont le 5 avril et au Petit Champlain le 6 avril.

Debbie Lynch-White dans Elle était une fois

En tournée jusqu’au 25 avril, notamment au théâtre Maisonneuve de la PdA le 22 février et à la salle Albert-Rousseau le 23 avril.

Dominique Quesnel dans Hallelujah Leonard

En tournée jusqu’au 22 juin, notamment au Lion d’Or le 14 mars.

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