Une journée de concertation qui fait jaser
Une semaine après la journée de concertation organisée par le Conseil des arts de Montréal sur l'intégration des communautés culturelles dans la vie artistique de la métropole, Pierre McDuff, directeur du Théâtre Les Deux Mondes, se dit de nouveau préoccupé par ce qui découlera de la rencontre. Il a d'ailleurs envoyé une lettre aux membres du conseil d'administration du CAM à cet effet.
Joint par Le Devoir, il a déploré le caractère «broche à foin» du déroulement de la journée de concertation, dont les constats selon lui discutables «laissent place à tous les arbitraires». Il ne remet évidemment pas en cause l'importance d'aborder la délicate question de l'intégration des communautés culturelles.«Sur quoi s'est-on concerté?, a-t-il demandé. Formellement, il ne s'est rien passé. Les questions n'ont pas fait l'objet d'un vote. Ce n'est pas une façon de faire de la part d'une instance publique comme le CAM», dont il a souligné le travail habituellement marqué du sceau de l'excellence. «Mes craintes, c'est que le CAM fasse fi des avis divergents qui ont été exprimés et continue de vouloir imposer un modèle et des visées qui, à l'évidence, ne recueillent pas l'assentiment de tout le monde.»
M. McDuff a souligné que les propos tenus lors des ateliers avaient parfois été mal rapportés en plénière, surtout lorsqu'il s'agissait des opinions dissidentes, ce qui augurait mal pour la suite du projet, qu'une délégation, formée spontanément ce jour-là, aurait à mener à terme. Il n'était toutefois pas lui-même présent aux ateliers et se fait le porte-parole de plusieurs participants qui étaient sur place.
Quatre propositions ont été soumises par le CAM aux participants lors de cette journée. Celles-ci touchaient à l'équité en matière d'accès aux différentes sources de financement pour les artistes issus de groupes culturels, à la responsabilité des organismes artistiques qui devraient se doter d'une politique d'inclusion, au rattrapage des subventionnaires en ce qui concerne l'évaluation des pratiques artistiques de ces groupes culturels et au soutien durable qu'il faudrait leur offrir.
«Entre le désir légitime de faire une plus grande place aux communautés culturelles et le fait de demander aux organismes culturels de se doter d'une politique d'inclusion comme critère d'attribution de leur subvention, il y a une marge», a souligné le directeur, qui déplore qu'on ne tienne pas compte de rapports déjà existants sur la question.
Au CAM, où on prépare une réplique à M. McDuff, on a rappelé que le but de la journée consistait justement à lancer le débat. «C'est clair que la délégation va essayer de trouver une position qui fait le plus de consensus possible, a insisté Christian O'Leary, directeur des communications du CAM. L'idée n'est pas d'imposer des choses, c'est d'ouvrir le débat... et il l'est.»
Si la question de l'intégration a déjà été étudiée par le CAM, «la problématique générale de l'accessibilité aux sources de financement n'a jamais été résolue», a indiqué M. O'Leary. Il a rappelé, pour preuve, le témoignage, ce jour-là, d'une artiste qui a mis plus de 20 ans à être admissible au financement public. Il a aussi évoqué l'étude dévoilée par l'Association des études, qui révélait que 70,4 % des citoyens qui exercent des professions dans le domaine des arts et de la culture sont d'origine canadienne-française ou anglaise.