Les 20 ans de la «symbiose» entre Mononc’ Serge et Anonymus

Mononc’ Serge et Anonymus
Photo: Valérian Mazataud Le Devoir Mononc’ Serge et Anonymus

Il y a des projets parallèles qui naissent, vivent un temps et puis meurent dans un oubli relatif. Et il y a la fusion du chanteur Mononc’ Serge et des métalleux d’Anonymus. Il y a 20 ans, à l’automne 2003, paraissait le premier rejeton de cette union jadis étonnante : le disque L’Académie du massacre, dont l’anniversaire est souligné par une douzaine de spectacles, dont un aux Francos de Montréal samedi.

« Il n’y a pas un spectacle qu’on fait avec Anonymus où on ne nous demande pas quand est-ce qu’on refait quelque chose avec Mononc’ Serge. » Ce constat d’Oscar Souto, du groupe métal québécois, est aussitôt partagé par le subversif chanteur, qui vit la même histoire chaque fois qu’il monte sur scène pour jouer son répertoire. Manifestement, la sauce a pris, et solidement.

L’Académie du massacre, paru en novembre 2003, « c’est plus que l’addition de mes fans et ceux d’Anonymus », résume Serge Robert, attablé avec Souto et Carlos Araya, le batteur du groupe métal. À ce jour, quelque 25 000 exemplaires physiques ont trouvé preneur, sans compter les achats numériques. Une version en vinyle vient aussi d’être mise en vente.

« Franchement, moi, je ne m’attendais jamais à ça, reconnaît Mononc’ Serge. Je pensais justement que faire un album de métal, ça serait un truc plus marginal que ce que je fais habituellement. Mais il y a eu une espèce d’effet de curiosité, je pense. »

Le bassiste Oscar Souto y voit une « symbiose » entre les forces de chaque entité de cette association musicale. « Les gens aiment le côté heavyde notre musique, puis ils aiment aussi le côté heavy des paroles de Mononc’. Les gens connectent là-dessus, puis aussi sur le côté humoristique de la chose. »

Cet engouement monstre s’est manifesté à la mise en vente des billets du concert des Francos de Montréal, d’abord prévu au Club Soda. Tous les billets se sont envolés en deux heures. Les organisateurs ont rapidement transféré le spectacle au MTelus, et les quelque 2000 places ont trouvé preneur le jour même.

Il n’y a pas un spectacle qu’on fait avec Anonymus où on ne nous demande pas quand est-ce qu’on refait quelque chose avec Mononc’ Serge

Les vapeurs du Polliwog

C’est en 2001 que les premiers contacts entre Mononc’ Serge et Anonymus ont eu lieu. À l’époque, l’ex-Coloc obtenait un certain succès avec sa pièce Marijuana, qui était diffusée par la défunte station alternative COOL FM. Le gérant du groupe métal avait proposé à ses poulains d’unir leur force avec le chanteur le temps d’une chanson lors du festival itinérant Polliwog. Mononc’ Serge jouait dans l’après-midi, et Anonymus était la tête d’affiche à Québec et à Montréal.

« On finissait le show avec Marijuana, puis ç’a levé, là. On s’est dit : il se passe quelque chose ici. La folie, la folie du monde qu’il y avait en avant de nous autres, c’était hallucinant », raconte Carlos Araya. Tous ont le même souvenir vif : à la sortie de scène, en coulisse, les musiciens se sont tout de suite dit que si le coeur y était, cette union pourrait avoir une suite.

Il aura fallu attendre un peu pour que les calendriers concordent, car chacun sortait un disque peu de temps après. Deux ou trois séances ont eu lieu en 2003, mais le résultat n’était pas à la hauteur des attentes en termes de qualité et de cohérence sonores. C’est là que Serge Robert et Anonymus ont décidé de passer une semaine au studio Wild de Pierre Rémillard, à Saint-Zénon, pour tout réenregistrer.

Ainsi est né L’Académie du massacre,un titre qui ne faisait pas référence à Star Académie — quoique sa date de sortie a coïncidé avec celle du premier effort de Wilfred LeBouthillier —, mais qui est plutôt tiré des paroles de la pièce Les portes de l’enfer, un des cinq morceaux originaux de l’album, sinon composé de reprises de Mononc’ Serge.

Les gars d’Anonymus insistent : ce projet parallèle leur permettait de « se lâcher lousse », sans toutefois être destiné à obtenir le succès d’estime et de ventes qu’il a finalement eu. « Nous, on faisait des tournées au Canada et aux États-Unis, explique Carlos. Entre-temps, moi puis Oscar, on était allés faire des spectacles avec le chanteur d’Anthrax, Joey Belladonna. Le truc avec Serge, c’était comme à côté. »

Et d’une certaine façon, malgré les bons échos, le truc est resté un à-côté, et ce, par choix. Les deux clans ont décidé de se faire rares, pas pour cultiver le mythe, mais pour que les réunions soient précieuses. Ils se sont retrouvés pour quelques spectacles, dont La Pâques satanique, et pour un deuxième disque, Musique barbare, paru en 2008.

Pour ce 20e anniversaire, « je pense qu’il y a un brin de nostalgie », note avec justesse Oscar Souto, qui explique qu’il récolte souvent les souvenirs et les anecdotes des fans. « Les gens se sont ennuyés du projet. »

Franchement, moi, je ne m’attendais jamais à ça. Je pensais justement que faire un album de métal, ça serait un truc plus marginal que ce que je fais habituellement. Mais il y a eu une espèce d’effet de curiosité, je pense.

Le spectacle au MTelus sera principalement composé de pièces de L’Académie du massacre, mais les musiciens iront piger un peu ailleurs, promettant aussi la classique surprise de ce genre de soirée. Ils ont par ailleurs fait paraître récemment une nouvelle pièce, Redoubler.

Les musiciens reprendront sur scène leur costume d’académicien, et mettront en place un décor pas très minimaliste — jadis, ils crucifiaient des patates. Tout ça, dans l’esprit du projet. « Moi, je ne joue pas la carte, là, de l’artiste sincère qui arrive s’a scène, puis qui parle de ses problèmes familiaux et de ses relations de couple, souligne Mononc’ Serge. Nous, on déconne, on se défoule, on s’amuse. »

Les 20 ans de L’Académie du massacre

Mononc' Serge et Anonymus, au MTelus, samedi, 21 h

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