Il a plu dru sur les champions

Nathaniel Rateliff & The Nights Sweats ont performé sous la pluie à la Place des Festivals, mardi.
Photo: Valérian Mazataud Le Devoir Nathaniel Rateliff & The Nights Sweats ont performé sous la pluie à la Place des Festivals, mardi.

Ni déluge ni bruine. Une pluie persistante, pas particulièrement froide ou chaude, tout bêtement soutenue, voire têtue, qui n’empêche rien vraiment, mais gâche un peu tout en même temps. Une petite demi-heure avant que Nathaniel Ratteliff descende de son Colorado avec sa bande de Night Sweats, il y a tout au plus une centaine de fans accoudés à la clôture de l’avant-scène. Amateurs de hockey ? Le groupe de Denver représente après tout une équipe championne, l’Avalanche a défilé et tous les montagnards ont déferlé, histoire de voir Cale Makar avec la vraie Coupe Stanley à bout de bras. Petite jalousie envers ces anciens Nordiques, Joe Sakic en tête ? C’est sûrement à cause de ça, le vilain crachin. Voleurs de rêve !

Mais non. Ce sont des braves, Nathaniel Rateliff et ses Night Sweats. Ils n’ont rien usurpé. À eux la palme des irréductibles du roots-rock américain, capables d’enthousiasmer un parterre de parapluies déployés (quelques milliers, finalement). Du sérieux, le barbu et les siens. N’ont-ils pas été les champions de Bernie Sanders durant la dernière campagne électorale américaine ? S’assument de toutes pores, les sudoripares nocturnes. Juré craché, la section de cuivres se rit des gouttes : ils postillonnent plus fort, voilà tout !

Puissance cohésive

 

Tout un band, constate-t-on assez instantanément. Dès Shoe Boot, on est dans la ligue majeure des puissances cohésives de l’histoire du rock, pas si loin des Asbury Jukes de Southside Johnny dans le genre. Rock’n’soul pertinent, puissamment porté. Rateliff compense en bonne énergie ce qui lui manque en voix. I’m On Your Side, vocifère-t-il (pour Bernie ?) : ce Nathaniel est une force positive. Et il sait crier. Oui, il est de notre bord. Du bon bord de l’Amérique du Nord, comme chante Luc De Larochellière. Par moments, il a des airs à la Van Morrison. C’est un compliment.

Howlin’ est un formidable shuffle, pas spectaculaire à voir, mais fichtrement bon à recevoir au plexus. On ne parle pas ici de chansons mémorables : rien n’est renversant, ni bouleversant, mais ça brasse, ça décrasse, ça se fout de la pluie. C’est le contraire de l’esbroufe. Tout le spectacle tient ainsi la barre haute, sans jeter personne par terre mais sans renoncer jamais. Du solide, du franc, de l’indomptable, du valeureux. Baby I’ve Lost My Way, à base d’orgue Hammond B-3, constitue l’exemple parfait : on accomplit du bon boulot. Du sacré bon boulot.

L’espoir en Amérique

Les trois albums sont à peu près également représentés, tout se vaut, et tout est valable. Une seule chanson provient du pan solo de la carrière de Rateliff : And It’s Still Alright. Elle est importante. Rateliff nous dit que ça vaut la peine de continuer à se battre pour ce en quoi l’on croit. Si on se tient debout, ça ira. « La raison d’être de cette chanson est de ne pas perdre espoir », précise-t-il.

Magnifique chanson. D’une clarté bienfaisante, ainsi, comprend-on, tout seul ou avec d’autres, en solo ou en groupe, il faut avancer. Et si ça tombe encore plus dru, on redoublera d’effort.. Et de sueur.

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