La salle Bourgie renouera avec le public en septembre

La salle Bourgie est la première à annoncer ses concerts de la rentrée. Elle le fait prudemment, avec une première salve de 36 concerts qui se tiendront à la salle Bourgie du 16 septembre au 15 novembre 2020. Les concerts de mi-novembre à Noël seront annoncés le 27 août.
Si l’automne est annoncé en deux temps, c’est « pour des raisons techniques », nous dit Isolde Lagacé, directrice de la salle. « La programmation est finalisée, les concerts signés, mais le site Internet du Musée des beaux-arts vient d’être changé et avec la contrainte des plans de salle révisés nous ne voulions pas avoir 56 concerts à gérer du jour au lendemain. Nous allons d’abord nous assurer que tout roule bien. »
Les mélomanes, après six mois de disette, vont-ils se précipiter ? « Je ne tiens strictement rien pour acquis. Je suis confiante, mais je ne sais pas comment cela va aller », nous dit Isolde Lagacé devant ce saut dans l’inconnu. « Le succès de quoi que ce soit, c’est la réflexion et le travail consacré à la préparation. Si l’on est confiant d’avoir couvert tous les angles, on accepte les résultats. ».
Quelle que soit la réponse du public, les concerts ne seront pas rentables. « Évidemment nous sommes à perte, même si nous faisons deux fois le concert et que les musiciens ont tous collaboré en acceptant d’emblée de doubler les concerts pour le cachet négocié à l’origine. » Le conseil d’administration et Pierre Bourgie ont souscrit à ces contraintes : « Nous sommes d’accord pour être à perte pendant l’automne. Il faut que tout le monde y mette du sien. Si l’on attend la panacée, on peut faire une croix sur notre milieu. »
Aux yeux d’Isolde Lagacé, « il fallait donner un signal. Pour nos musiciens, notre milieu, les gens d’ici. » Mais, c’est sûr, « cela ne va pas durer trois ans ainsi : il va falloir avoir le vrai portrait, voir la réaction du public, ce qui nous pend au bout du nez et prendre des décisions au fur et à mesure. Mais nous avons tellement changé du tout au tout dans nos façons de penser, de prévoir et de réfléchir… Je n’en reviens pas encore », analyse la directrice de la salle.
Nous sommes d’accord pour être à perte pendant l’automne. Il faut que tout le monde y mette du sien. Si l’on attend la panacée, on peut faire une croix sur notre milieu.
Lortie et Beethoven en vedette
Dévoilée ce jeudi, cette partie de saison est évidemment totalement composée d’artistes locaux qui donneront des concerts sans pause. Les plus courus seront présentés deux fois dans la journée à 14 h 30 et 19 h 30, comme ceux de Louis Lortie, dont l’intégrale des sonates pour piano de Beethoven sera menée à terme en deux phases : du 14 au 18 octobre et du 9 au 15 novembre.
Le concert d’ouverture, les 16 et 17 septembre, sera confié au Nouveau Quatuor à cordes Orford avec le Quatuor op. 59 n° 2 de Beethoven et le 2e Quatuorde Jacques Hétu. Charles Richard-Hamelin donnera les Préludes de Chopin, les 6 et 7 octobre avec les Pièces op. 76 de Brahms et les 26 et 27 octobre avec les Mélodies oubliées op. 39 de Medtner.
Cheng2 Duo, Quartom, les musiciens de l’OSM, la gambiste Mélisande Corriveau, les Violons du Roy (avec Luc Beauséjour les 9 et 10 octobre) et Pentaèdre sont à l’affiche d’une programmation qui n’oublie pas le jazz et les musiques du monde. La mezzo-soprano Michèle Losier donnera, le 4 octobre, un récital de mélodies en lien avec l’exposition « Paris au temps du postimpressionnisme : Signac et les Indépendants ». Quant au concert du pianiste David Jalbert du 24 septembre, il marquera les débuts d’une collaboration avec ATMA Classique : une série de sept rendez-vous avec des artistes ATMA retransmis en webdiffusion sur la plateforme Livetoune.
Gérer le stress
Selon les plans en vigueur, la salle Bourgie accueillera entre 130 et 144 spectateurs. Isolde Lagacé a choisi de maintenir les sièges numérotés réservés : « La plupart des salles qui rouvrent — TNM, Jean Duceppe, Koerner Hall à Toronto — fonctionnent en admission générale, mais pour le mélomane, l’admission générale est le plus mauvais service possible. »
Notant que sa clientèle a ses habitudes et ses préférences, Isolde Lagacé veut à tout prix éviter de « gérer des gens stressés postés devant la salle deux heures avant un concert pour avoir la place qu’ils veulent. » Cela lui fait perdre quelques places, mais elle a décidé de « ne va pas jouer au fou pour 8 à 10 billets de moins. Le soir du concert, le travail va être fait et il n’y aura pas la pagaille ».
En pratique, Isolde Lagacé renoncera à l’an 7 de son intégrale des Cantates de Bach. La série a tellement d’adeptes (traduire : plus d’abonnés que de places disponibles dans la nouvelle configuration) qu’il aurait été dommage de la sacrifier aux contraintes sanitaires. La saison programmée en 2021-2022 deviendra donc l’avant-dernière et tout ce qui était prévu en 2020-2021 sera reprogrammé en 2022-2023.
En tout, 17 concerts d’artistes internationaux ont été reportés à une année ultérieure. Il a aussi fallu annuler les concerts orchestraux car, avec la distanciation de 2 mètres, la capacité sur scène est de 11 musiciens plus un clavier ou un chef. Quant à l’hiver, les points d’interrogation demeurent.
La résidence d’été de l’Orchestre Métropolitain en salle aura permis un galop d’essai à toutes les équipes sur les mesures sanitaires en plus d’accroître la visibilité internationale de la salle Bourgie. Isolde Lagacé ne peut que se féliciter de l’expérience inédite : « Le test nous aide. L’Orchestre Métropolitain a été impeccablement discipliné. Je suis extrêmement satisfaite du résultat. Si je devais donner une note sur 100, franchement, ce serait 100 ! »