Rinaldo Alessandrini: la quintessence de la sonate en trio

Le grand claveciniste, organiste et chef baroque Rinaldo Alessandrini nous honorait de sa visite mardi dans un concert organisé par la Fondation Arte Musica à la salle Bourgie. Il sera en récital de clavecin ce mercredi soir au même endroit. Rinaldo Alessandrini est « grand » car depuis 25 ans il est, avec Jordi Savall et Vincent Dumestre, l’un des musiciens les plus primés par la presse internationale pour toutes ses réalisations, notamment dans la musique de Monteverdi.
Alessandrini nous arrivait hier avec son Concerto Italiano en formation réduite. Mais quelle formation ! En fait, c’est tout un champ de possibilités du mot « beauté » dans la sphère de l’exécution de la musique baroque sur instruments anciens que nous avons redécouvert mardi : beauté des timbres, qualité de l’intonation, souplesse des nuances et des équilibres, balance entre instruments jouant des valeurs longues et ceux campant des rythmes plus vifs.
Ce bonheur esthétique précieux était mis au service d’un genre : la sonate en trio dans sa forme 2 violons avec basse continue (un clavecin, un violoncelle). Et un musicien portait tout particulièrement cet art à sa quintessence : le violoniste Boris Begelman. Son tandem de funambules avec Andrea Rognoni dans Vivaldi laissait pantois, son expressivité dans Porpora aussi. Begelman, qui avait été invité par Arion en soliste en mars 2019, est véritablement la star actuelle du violon baroque. Il renoue avec le phénomène que pouvait être Fabio Biondi jeune et surpasse les pionniers du violon baroque et des vedettes actuelles consacrées comme Onofri, Kraemer et Carmignola. Avec lui il n’y a ni « crin-crin » ni approximation et Alessandrini trouve, sur le terrain de l’expressivité, un partenaire de jeu exceptionnel.
La soirée, que l’on aurait rêvée encore plus nourrie d’oeuvres instrumentales, était aussi dévolue à des compositions vocales, des cantates pour soprano, soutenues par la même formation, et, s’agissant d’Alessandro Scarlatti, une trompette naturelle en complément. Sonia Tedla Chebreab a pleinement la voix de l’emploi, bien projetée, point trop ample, avec une diction claire et une incarnation sobre et pas trop outrée dans ces partitions mineures mais agréables, où celle de Leonardo Leo (notamment l’aria spiritoso final) apparaissait particulièrement bien troussée.
Mais ce sont assurément Begelman et Rognoni, accompagnés d’Alessandrini et Minasi qui ont fait le show, et tout particulièrement dans Vivaldi et Porpora.