Courtney Barnett au FIJM: Ne change pas, Courtney!

Questions existentielles d’un mercredi matin de tournée. L’auteure rock Courtney Barnett est dans le Maine au moment où nous la rejoignons, pas encore complètement émergée de sa sieste. Le beau soleil qui frappait ce jour-là, à Montréal comme à Portland, favorisait les réflexions profondes, du style : que reste-t-il de l’Australie dans la musique que vous faites ? « Je ne sais pas trop, s’avance-t-elle entre deux bâillements. C’est drôle parce que c’est un sujet de conversation que j’ai régulièrement avec les gens, tu vois : comment l’environnement dans lequel t’as grandi, t’as vécu, a un effet sur la musique que tu fais ? »
Dans le cas qui nous occupe, un très bel effet, à l’évidence. Auteure, compositrice, interprète, guitariste, Courtney Barnett est rapidement devenue chouchou de la critique rock, au firmament des nouveaux troubadours de la guitare qui se branchent à un ampli, des chroniqueurs tendres mais électriques de la vie qui grince parfois, là-haut avec Ty Segall, Kurt Vile (avec qui elle a enregistré l’excellent Lotta Sea Lice, 2017), Angel Olsen, Mac DeMarco, Sharon Van Etten. Tous Nord-Américains… sauf Barnett.
« C’est une bonne question, enchaîne-t-elle. De quelle manière la musique est le reflet du milieu dans lequel tu t’épanouis ? Je n’ai pas de réponse — d’ailleurs, y a tellement de groupes que j’aime qui ont un son particulier que je ne saurais lier à leur lieu d’origine… Ça a peut-être davantage à voir avec la proximité entre les musiciens d’un même lieu, plus que le lieu lui-même. La proximité, ces liens qui se créent, les artistes qui s’inspirent entre eux et développent une sorte de scène, de paysage musical qui finit par se démarquer ? I have no idea, really… »
La jeune trentenaire a grandi à Sydney, décrite comme un désert culturel. Cela semble un peu ingrat, mais elle est d’accord avec le constat tout en reconnaissant que « la scène musicale là-bas est très différente de tout ce que j’ai connu ailleurs. Je crois que ça bouge davantage aujourd’hui, y a plus de groupes qui s’y forment, plus de petites salles de spectacles, plus d’événements qui s’organisent, you know ? ».
Le son de Melbourne
C’est plutôt à Melbourne qu’elle a fait sa marque au sein d’une poignée de groupes rock, accompagnant d’autres auteurs-compositeurs-interprètes, avant de lancer un premier EP en 2011. Tout d’un coup, cette proximité qu’elle décrivait, cette inspiration partagée entre une communauté d’artistes a gagné son étiquette, le « dolewave », le son rock indé de Melbourne de la dernière décennie et dont Barnett est la plus grande ambassadrice. « Oh, I don’t know about that… Si tu le dis ! »
Son premier disque édité sous sa propre étiquette Milk !, cofondée avec sa copine d’alors, la musicienne Jen Cloher, Sometimes I Sit and Think, and Sometimes I Just Sit (2015), a fait mouche. Sa chanson aux teintes de grunge, sa poésie perspicace, sa voix rauque et débonnaire, le ton mi-chanté, mi-parlé qu’elle prend, confère à son travail ce quelque chose de singulier et d’envoûtant.
Le mot s’est vite passé ces dernières semaines : on raconte que, sur scène, Courtney Barnett volait la vedette à The National, qui l’avait invitée à faire sa première partie pendant une bonne partie de sa tournée nord-américaine. « Si j’avais songé à changer quelque chose dans mon concert pour l’aligner avec le disque plus doux qu’a lancé The National ? Je ne pense pas… J’essaie de ne rien changer au genre de performance que j’ai l’habitude de donner. Je me dis que ce serait inutile ; après tout, ce sont eux qui m’ont invitée à faire leur première partie, ils devaient savoir à qui ils avaient affaire… »
À voir en tête d’affiche du MTelus le 5 juillet à 20 h 30.