Glenn Copeland: le messager

Ce n’est qu’en 2016, à la réédition de l’album «Keyboard Fantasies» (1986), que la musique de Glenn Copeland s’est frayé un chemin au cœur des listes de lecture numériques.
Photo: Maria Jos Govea Ce n’est qu’en 2016, à la réédition de l’album «Keyboard Fantasies» (1986), que la musique de Glenn Copeland s’est frayé un chemin au cœur des listes de lecture numériques.

Glenn Copeland — qui a conservé le nom de scène Beverly Glenn-Copeland — est un être lumineux : communicateur hors pair, optimiste inépuisable, compositeur d’une musique qui lui est envoyée, dit-il, du cosmos. L’artiste expérimental à la formation classique sera jeudi à la Cinquième salle dans le cadre du FIJM.

« Ah ! Je ne savais pas que c’est maintenant que vous appelleriez ! J’étais dans un avion et, avant ça, dans un hôtel où la seule chambre qui n’avait pas le wi-fi était la mienne… Mais c’est excellent, ça ne pourrait être un meilleur moment ! » Glenn Copeland, âgé de 75 ans et bouddhiste pratiquant, croit peu au hasard. Il ne l’attendait pas, mais dans l’enchaînement des choses possibles et probables, cette conversation devait avoir lieu. « Tant de choses m’arrivent, mais je suis ravi qu’elles arrivent », s’exclame-t-il au bout du fil, depuis sa maison de Miramichi au Nouveau-Brunswick.

Né à Philadelphie en 1944, Glenn Copeland — qui s’appelait Beverly avant une transition de genre amorcée en 1995 — arrive à l’Université McGill en 1961 pour suivre une formation en chant classique. Il ne quitta plus jamais le Canada. Sa musique est parfois décrite comme nouvel âge, électronique, folk, contemporaine. Sa grande maîtrise vocale est indéniable, tout comme son audace dans la composition. Il cumule les apparitions dans les festivals de musique nichée ou populaire. Dont le Festival de jazz. De Montréal, bien sûr, mais pas seulement. Il revient tout juste de Vancouver où il a présenté ses oeuvres aériennes mettant en avant le clavier au Festival de jazz, justement. « Je n’ai jamais été un fan de jazz, en fait. Et ma musique n’a rien à voir avec le jazz. La musique qui me vient n’est pas vraiment définissable. Mais je suis devenu un fan de jazz, visiblement. Car ce que j’entends dans ces événements repousse les limites de la définition du style musical vers les marges, vers ce qui n’est pas traditionnel. »

Renommée tardive

 

Avec une carrière de plus de 50 ans derrière lui, ce n’est que récemment, en 2016, à la réédition de son album Keyboard Fantasies, écrit en 1986, que sa musique s’est frayé un chemin au coeur des listes de lecture numériques. « La jeune génération est extrêmement à l’écoute, dit-il. J’ai entendu une prophétie il y a longtemps qui disait que naîtrait un jour un groupe d’humains qui serait très conscientisé, appelé les enfants d’indigo. Et l’autre génération suivante serait les enfants de cristal. Alors, quand je vois les gens dans la fin vingtaine, début trentaine, je les reconnais. Pendant des années, j’ai cherché et puis aujourd’hui je me dis ohhh ! et ces jeunes de douze ans qui défient les gouvernements, ce sont clairement les enfants de cristal. Ce sont des gens qui sortent dans le monde et se demandent : “comment je peux contribuer à le rendre meilleur ?” La prophétie était totalement vraie ! »

Pendant des années, la joie de créer lui suffisait. Le succès ne venait pas, ou seulement dans des cercles très fermés, mais qu’à cela ne tienne. « Vous savez, je suis seulement très reconnaissant envers l’univers. J’ai toujours su que la musique serait en moi. La création seule m’apportait beaucoup de joie. Et j’ai fait plein d’autres choses, j’ai travaillé beaucoup pour des émissions pour enfants [notamment le programme éducatif Mr. Dressup à CBC]. On vit dans une époque d’instantanéité. Il y a cette pression : je devrais être heureux tout de suite, je dois avoir du succès instantanément. C’est une maladie de la société. Que qui que ce soit survive dans toute cette pression est un miracle ! »

Sortir de soi

 

Pas de surprise, le groupe de musiciens doués qui accompagne M. Copeland en concert s’appelle Indigo Rising. L’artiste les décrit comme un ensemble d’artistes exceptionnels et de personnes magnifiques, totalement dénuées d’ego.

C’est d’ailleurs ce qui le motive dans l’art. Il n’est qu’un messager. « On co-crée avec l’univers, dit-il. Tous mes amis qui sont artistes visuels et qui ont mon âge me disent la même chose, que l’oeuvre les traverse par une quelconque forme d’énergie. Oui, je sais écrire la musique et blablabla, mais quand j’entends ce que me dicte l’univers, je dois arrêter ce que je fais pour l’écrire. Et quand tout est transcrit, je dois le réapprendre, je ne m’en souviens plus. Chaque fois que j’ai tenté de faire intervenir mon ego là-dedans, ça a été totalement raté ! Ça s’est retrouvé à la poubelle. »

Copeland rit aux éclats en pensant à ces fois où il a été vaniteux au point de vouloir se mettre en avant, lui, plutôt que ces beaux sons apaisants qui lui sont communiqués par les forces mystérieuses de la Création. Est-ce que ce serait ça, la sagesse ?

Beverly Glenn-Copeland et les Indigo Rising seront à la Cinquième salle jeudi, à 19 h.

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