Le thé au Sahara de Malasartes

«Oriental Blue» est une suite pour guitare et saxophone composée par Samuel Bonnet. Ce maître de la six-cordes est né à Haïfa, en Israël. Il a étudié à Paris et enseigne aujourd’hui à l’École de musique Vincent d’Indy.
Photo: Malasartes / Samuel Bonnet «Oriental Blue» est une suite pour guitare et saxophone composée par Samuel Bonnet. Ce maître de la six-cordes est né à Haïfa, en Israël. Il a étudié à Paris et enseigne aujourd’hui à l’École de musique Vincent d’Indy.

Entre la poire et le dessert, le baron de Montesquieu avait coutume de marteler : « Nous sommes tous des accidents géographiques. » Aujourd’hui, amis lecteurs, c’est très sérieux, on va mettre l’unité de lieu sens dessus dessous, car on va tracer la diagonale entre Israël, la France, l’Arménie, le Liban, l’Argentine et Montréal. Rien de moins.

Il se trouve que toutes ces zones géographiques ont pour dénominateur commun deux personnes. Pour être précis, on devrait écrire deux et demie, cette dernière étant représentée par un producteur très savant qui s’appelle Damian Nisenson, fondateur de l’étiquette Malasartes. Cet Argentin d’origine installé à Montréal propose aujourd’hui Oriental Blue, un album confectionné par deux têtes curieuses des différents coins et recoins du monde. Éclaircissons la chose.

Oriental Blue est une suite pour guitare et saxophone composée par Samuel Bonnet. Ce maître de la six-cordes est né à Haïfa, en Israël. Il a étudié à Paris et enseigne aujourd’hui à l’École de musique Vincent d’Indy. Au soprano et au ténor, on retrouve Mathias Wallerand. D’origine arméno-libanaise, ce dernier a poursuivi un parcours analogue à celui de Bonnet, soit un parcours au long cours. Aujourd’hui, il enseigne au conservatoire de Senlis en France.

Entre deux cours sur la grammaire musicale, nos deux artisans ont donc réalisé, à Montréal, ce bleu d’Orient qui, par ses choix esthétiques, fait penser aux belles œuvres que John Zorn enchaîne avec constance sur son étiquetteTzadik. Cela relevé, les pièces écrites par Bonnet font surtout penser aux horizons sonores méditerranéens.

Ce guitariste a ceci d’admirable, de très singulier, qu’il est parvenu à touiller les harmonies andalouses, sahariennes et autres particularités latines en un tout séduisant, voire conquérant. En d’autres termes, il nous promène dans des univers qui rappellent aussi bien Andrés Segovia que Manitas de Plata ou encore Egberto Gismonti.

Au saxophone, Wallerand détaille des chapelets de notes qui parfois adoucissent, parfois épicent, parfois révèlent. Quoi donc ? Les beautés d’une géographie qui n’a rien de luxuriant. En compagnie de Bonnet, notre saxophoniste déploie un jeu qui fait penser à celui que John Surman déclina il y a des lunes de cela avec Jack DeJohnette lors de l’enregistrement de ce chef-d’œuvre baptisé The Amazing Adventures of Simon Simon.

Cela étant, avec Oriental Blue, l’étiquette Malasartes montre, ou plutôt confirme que l’inclination pour l’originalité, le risque et la curiosité se révèle aujourd’hui salutaire. En imprimant sur l’évolution de cette étiquette l’inclination fixée à l’origine, Nisenson a fait de Malasartes l’étiquette des harmonies géographiques.

Un grand du jazz s’éteint

Critique et historien très respecté, Ira Gitler est décédé le 23 février à New York. Il avait 90 ans. Au cours de ses soixante ans de carrière, il avait écrit des centaines de textes de pochettes et des milliers d’articles. Il avait surtout été la cheville ouvrière de The Encyclopedia of Jazz. Car après avoir participé à la rédaction de celle-ci, il fut responsable de son actualisation permanente.