Les espaces célestes de Mélanie De Biasio

Le rythme obsédant et hypnotique de sa musique, posée au centre d’un univers nimbé de mystère. La charge émotive de sa voix. Le dépouillement de son art fait d’envoûtements superposés. Mélanie De Biasio navigue dans des espaces célestes.
Dans un Monument-National absolument attentif à ce qui se déroulait sur scène, la chanteuse et flûtiste belge a proposé vendredi soir un spectacle légèrement plus texturé que celui présenté en 2015 de l’autre côté de la rue, au Club Soda. Plus texturé, mais néanmoins très près dans l’esprit.
L’univers reste le même — tout en apesanteur, planant dans chaque recoin, éthéré. L’enveloppe n’a pas changé non plus : des lumières tamisées où domine le clair-obscur. Le son ? Feutré, et néanmoins pénétrant — parfois même plutôt lourd, vers la fin du spectacle, en point d’orgue d’un lent crescendo.
À l’image de la musique, les changements sont subtils : une présence plus incarnée sur scène — elle arpente la scène pieds nus, se trouve parfois éclairée plus directement, remercie ici et là le public (sans décrocher du fil du concert, jamais).
De Biasio à la flûte, un pianiste, un claviériste-guitariste (délicats effets sonores), un batteur plein de finesse. La musique créée se déploie sur une trame électro-jazz-blues où la tension est palpable dans chaque mesure. Trame mélodique puissante. Un minimalisme… consistant. Du raffinement ? Partout, même quand le rythme s’envole.
On retiendra de cette deuxième expérience De Biasio une magnifique livraison d’Afro Blue (popularisée par Coltrane et Abbey Lincoln), une des rares reprises qu’elle se permet. Mais plus globalement, on retiendra l’effet d’apesanteur créé par cette prestation… et ses espaces célestes.
Soulignons combien la première partie, confiée à la pianiste montréalaise néoclassique Alexandra Stréliski, faisait une entrée en matière cohérente — pianiste de la délicatesse et des nuances, qui varie les climats et l’intensité de son lyrisme.