Roch Voisine, presque à la bonne franquette

Presque à la bonne franquette. Il y aura une invitée en ouverture, et puis Roch Voisine, quelques guitares, un piano, deux accompagnateurs pas toujours là, une liste de chansons pas coulées dans le béton, un brin de jasette mais pas tellement plus parce que ça va durer une petite heure et quart en tout et partout. Ainsi se présente le spectacle le plus simple et le plus surprenant des Francos, donné de vendredi à lundi : un joli moment en compagnie du vétéran chanteur à la Cinquième Salle de la PdA. Notez : c’est programmé tôt en soirée, dès 19 h. « C’est un peu comme si je faisais la première partie de tout le monde ! » rigole Roch.
À 55 ans — l’âge de mon frère, ça fait drôle d’y penser —, Roch Voisine peut se permettre ce qu’il veut. Dans la mesure de cet homme très mesuré. « C’est pas improvisé, mais ce n’est non plus pas un concert préparé à la seconde près. On a monté 15-16 chansons, on n’aura pas le temps de toutes les faire, c’est sûr, peut-être qu’on en changera de soir en soir, on va s’ajuster. Vraiment, je souhaite une rencontre sympathique, dans un contexte dénudé. On sera pas dérangé par la batterie et le gros orchestre ! »
À l’aise en toutes circonstances
Dérangé, Roch ? Fallait le voir en 2016 avec Simon Leclerc et l’OSM à la Maison symphonique, à l’aise comme les chanteurs populaires le sont rarement dans ces soirées souvent mal mariées. Un mélange de prestance chic, d’ambiance bon enfant et de savoir-faire. Après la rochmanie du début des années 1990 et presque trois décennies de carrière sans grand temps mort, plus rien ne décontenance l’Acadien. « J’ai vraiment eu du fun avec Simon. Il y a tout un protocole dans ce contexte symphonique, tu sais jamais trop quand il faut saluer ou serrer la main du chef d’orchestre… J’ai essayé de m’amuser avec ça. Au moment de la pause, j’ai été voir la première violoniste, je lui ai mis le micro sous le nez et je lui ai demandé : “C’est-tu un break syndical ?” Elle a ri, tout le monde a ri. C’était pas un manque de respect, juste une petite démystification. Ça sert à ça, de telles rencontres. »
De la même façon que les trois volumes d’Americana parus en 2010 et 2011, tour d’horizon de ses chansons préférées, Roch Voisine a beaucoup appris à faire plaisir en se faisant plaisir. « Ce ne sera pas Hélène, Darling, Avant de partir, un hit après l’autre. Les incontournables, je peux les contourner, les gens changent, ils viennent moins à la rencontre de leurs souvenirs qu’à une rencontre, tout court. On va se promener ensemble dans mon répertoire, redécouvrir des chansons d’albums qui n’ont pas tourné à la radio. J’ai eu la chance de travailler avec des auteurs qui m’ont écrit sur certaines de mes mélodies des trucs extraordinaires, vraiment. » On ne le sait que trop, la différence entre un succès géant et une chanson oubliée tient à peu de choses : velléité de producteur, arrangement malheureux, programmateur de radio qui a mal à une molaire le matin de l’écoute… « Je pense que ces chansons méritent de vivre un peu. Alors je dis : saisissons l’occasion ! »