Vincent Lauzer et Arion sur la route d’un disque

Arion ouvre sa saison 2017-2018 avec un programme autour des facettes sacrées et profanes, instrumentales et vocales, de l’activité compositionnelle de Vivaldi — et, certes, non, nous n’avons pas la même conception de la signification de l’expression « mener une double vie » !
Pour ce faire, nous retrouvons avec plaisir ce vendredi, mais aussi demain et dimanche, le brillant flûtiste à bec Vincent Lauzer et sommes invités à découvrir la mezzo-soprano américaine Meg Bragle dans deux airs et une cantate.
Le concert de la série des premières, que nous commentons ici, d’une durée d’une heure sans pause, nous a privés de parties plus substantielles que d’habitude : deux des quatre concertos pour flûte à bec (les RV 441 et, surtout, 439, « La Notte ») et l’air « Così potessi anch’io » d’Orlando furioso. Cet air est chanté par Alcina, un rôle en général distribué à une mezzo-soprano plutôt sombre, alors que le rôle de Ruggiero (« Sol da te mio dolce amore ») est incarné par un contre-ténor. On verra que Meg Bragle n’est ni l’un ni l’autre.
Des solistes très contrastés
On retient du concert la prestation toujours virtuose et solide de Vincent Lauzer, d’autant plus affûtée qu’à l’issue des concerts, la semaine prochaine, ATMA enregistrera un disque de ces concertos vivaldiens, CD à paraître au printemps. Il sera sans doute excellent, car l’association de Vincent Lauzer avec Alexander Weimann est positive, le chef, toujours attentif et élégant, ne créant pas trop de tumulte et laissant le flûtiste s’exprimer.
La partie vocale n’appelle pas autant de louanges. La chose la plus impressionnante chez Meg Bragle, c’est son CV. Soliste chez John Eliot Gardiner ! Mazette ! Avec quoi ? J’ai eu encore l’impression d’entendre une de ces choristes vaguement améliorées qui se hasardent à jouer les solistes. En tout cas, jeudi, Meg Bragle chantait comme si ses résonateurs vocaux étaient en panne ou comme si elle jugeait que la salle était si petite qu’il ne fallait pas que sa voix projette.
Nous avons donc entendu un timbre de mezzo très commun, comme canalisé, pauvre en harmoniques qui ne se déploie pas. C’est presque indescriptible, tant c’est banal. Pour ne rien arranger, « Sol da te mio dolce amore » est un dialogue avec un très ardu solo de flûte que Claire Guimond survolera sans doute mieux lors des prochains concerts. Il est chaudement recommandé de ne pas écouter l’enregistrement Jaroussky-Spinosi, ou la vidéo Bartoli-Fasolis qui circule sur YouTube avant d’aller au concert !