Normand Legault et Yaëlle Azoulay: des calleurs bien ancrés

Yaëlle Azoulay calle depuis une quinzaine d’années.
Photo: Vitor Munhoz Yaëlle Azoulay calle depuis une quinzaine d’années.

Lors d’une veillée de danse, les calleurs sont pris en sandwich entre la musique et la danse. Nous en avons rencontré deux pour une entrevue croisée : Normand Legault, qui est implanté dans le milieu depuis plus de 40 ans, et Yaëlle Azoulay, qui calle depuis une quinzaine d’années. Un homme, une femme et deux générations différentes : les deux animent cette année les veillées de Mémoire et Racines.

Quels sont vos styles musicaux préférés pour caller ?

Normand Legault : J’ai des sets en trois parties que j’ai collectés et qui offrent une belle variété de mouvements et un bon niveau de difficulté. Sinon, c’est l’ensemble des quadrilles : le grand quadrille, le lancier, le caledonia et un peu de saratoga. La contredanse, pas trop. Je préfère le bon reel en 2/4, ou pour les quadrilles, de beaux airs en 6/8.

Yaëlle Azoulay : Moi, j’aime particulièrement les sets carrés qui font danser tout le monde en même temps. C’est pour ça que j’ai essayé quelques square dances américains. Contrairement à Normand et à d’autres, je ne fais pas beaucoup de quadrilles.

Photo: Danielle Giguère Normand Legault, qui est implanté dans le milieu depuis plus de 40 ans

Quel type de collectage avez-vous fait avant de commencer à caller ?

Y.A. : Pendant cinq ans, j’ai fait le tour du Québec le plus que je pouvais, toutes les fins de semaine. Je voulais voir les calleurs, leur façon de dire les choses, leur pédagogie. J’ai noté les danses, dont certaines callées par Normand.

N.L. : J’ai commencé vers 1972-1973. À l’époque, la pratique était vraiment plus active. J’ai débuté au Saguenay, puis j’ai rebondi dans Charlevoix. J’ai connu Québec, la Beauce et Inverness. Les danses, je les ai apprises en dansant ou en observant les calleurs. Tu essaies d’imiter leur pitch vocal et leur façon de verbaliser la danse.

Avez-vous davantage développé les styles de quelques régions ?

Y.A. : À un moment, je me promenais beaucoup dans la région de Valleyfield. Sinon, c’est des danses d’Inverness, que j’ai collectées par les livres de Normand ou par lui. Dans le style d’Inverness, j’aime toutes les figures de traverse où il y a beaucoup de gens qui dansent en même temps. Ces danses renferment une bonne progression de figures.

N.L. : De mon côté, il y a Charlevoix, Lotbinière, toute la région de Kinnear’s Mills, Thetford. Sainte-Agathe aussi. Là, vers 1972-1973, les danseurs avaient tous des fers en dessous des souliers, alors quand venait le moment de faire le swing, ça punchait ! À Inverness, ils pouvaient être une trentaine tous ferrés comme des chevaux qui se mettaient à taper. Par contre, dans Charlevoix, c’était la finesse des petits virages. Chaque région avait de belles affaires qu’on ne voit presque plus aujourd’hui.

Normand Legault avec les Frères Brunet au câll

 

Quel est pour vous le rapport entre le call et la langue ?

N.L. : L’essentiel du calleur est de décrire les figures pour que les gens comprennent ce qui se passe, et la petite phrase que tu dis, ce n’est pas n’importe quoi. Le calleur a toujours entre quatre et huit temps d’avance sur ce qui se passe. Il faut que tu visualises la danse. Une fois que les gens ont compris, tu peux t’amuser avec un petit baragouinage.

Y.A. : Je compare souvent le calleur à un rappeur. On ne s’en rend pas toujours compte, mais dans une veillée, la quantité de mots qui sont dits par un calleur est vraiment phénoménale parce que les gens ne connaissent pas les danses. Moi, j’essaie toujours d’expliquer la danse avant de commencer, puis, lorsque les gens ont compris, je commence à être de plus en plus libre dans ce que je dis. J’aime avoir de la place pour baragouiner.

Quel est votre rapport à la percussion pendant le call ?

N.L. : Je joue des os, et quand la musique est trop bonne, je ne peux pas m’empêcher de giguer. La percussion, je trouve que ça ajoute de la vigueur au rythme, mais il faut qu’il y ait des arrêts pour que les gens apprécient quand ça repart.

Y.A. : Moi, c’est de giguer surtout. C’est difficile de se retenir. Dans ces moments, je calle avec bien moins de mots. J’aime aussi caller une finale où tout le monde gigue. Avec Bon Débarras, on a placé des choses et je peux puncher en fonction de la musique.

Yaëlle Azoulay avec Bon Débarras

Festival Mémoire et Racines

Normand Legault et le Trio Lemieux sur la scène Danse danse, vendredi à 21 h. Yaëlle Azoulay et Bon Débarras, sur la scène Danse danse, samedi à 22 h. Les deux artistes offrent également des ateliers de danse. memoireracines.org

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