Cœur de Pirate, Half Moon Run et plusieurs autres poussent les premières notes du Festival de jazz

La voix de Cœur de pirate a rempli la place des Festivals pour lancer le Festival international de jazz de Montréal, mercredi soir.
Photo: Pedro Ruiz Le Devoir La voix de Cœur de pirate a rempli la place des Festivals pour lancer le Festival international de jazz de Montréal, mercredi soir.
Pluie, pas pluie, on y va ! Ça a débuté à l’heure de l’apéro avec Plants and Animals et The Franklin Electric sur la scène plantée coin Sainte-Catherine et Jeanne-Mance, ça s’est poursuivi avec Milk & Bone, Cœur de Pirate et Half Moon Run sur la place des Festivals. Avec la foule des grands soirs, celle-là qui finit par déborder un peu partout sur les rues avoisinantes par manque d’espace au pied de la scène, avec tous les festivaliers tanguant au rythme lancinant des Montréalais invités à célébrer l’anniversaire de la ville, le début de la 38e édition du Festival international de jazz de Montréal (FIJM), l’odeur diffuse des saucisses à hot-dogs qui frémissent sur les grils, et encore plein d’autres choses qui nous rappellent qu’on est en été.

Avertissement : voici le paragraphe mêlant, mais nécessaire. Le grand marathon pop-rock gratuit d’hier soir servait de concert d’ouverture de la programmation extérieure du FIJM, mais aussi de célébration à l’agenda des festivités du 375e anniversaire de Montréal. Un peu comme la grande journée de clôture des FrancoFolies d’il y a dix jours, mais pas exactement, car en vérité la journée francofolle ne faisait pas partie de la série Sessions 375. Ça, c’est la collaboration entre le comité des célébrations montréalaises et quatre grands événements musicaux — le FIJM, Osheaga, ÎleSoniq et Pop Montréal — qui nous concoctent quatre concerts gratuits estivaux, le premier de cette série étant celui qui nous attirait à la place des Festivals en ce mercredi soir. C’est clair ?
Photo: Pedro Ruiz Le Devoir Le duo Milk & Bone

Donc, nous fêtions quoi déjà, hier ? Ah oui, c’est ça : l’été. Qui, chez nous, rime avec musique, bière et crème glacée, touristes et locaux marchant côte à côte d’une scène à l’autre. Lorsque le trio folk-rock Plants and Animals a lancé les festivités vers 17 h, les tours de bureaux du quartier commençaient à se vider : travailleurs en cravate ou en tailleur se fondant dans la masse des chanceux déjà en vacances. Les musiciens ont commencé ça cool, puisant dans leur répertoire (surtout dans le plus récent disque, leur quatrième, Waltzed in from the Rumbling) les chansons les plus coulantes, idéale trame sonore de 5 à 7. Tout allait si rondement, les averses ont eu tort de s’inviter. Ça a poussé les spectateurs vers les abris, juste au moment où le trio gagnait en muscle.

Plus conventionnellement rock, The Franklin Electric a pris le relais, faisant fi des parapluies. Batterie carrée, refrains pop, une machine bien huilée, The Franklin Electric, à défaut d’être original dans sa proposition. Tout repose sur les épaules du magnétique chanteur (excellente voix), guitariste, pianiste et trompettiste Jon Matte, qui attire sur lui toute l’attention. Une dynamo sur scène, toujours soucieux de garder le contact avec son public, s’adressant à lui en français et en anglais entre les chansons.
Photo: Pedro Ruiz Le Devoir Jon Matte, du groupe The Franklin Electric

Après les hors-d’œuvre, il fallait passer à la grande table pour le plat principal. Les festivaliers ont ensuite convergé devant la grande scène de la place des Festivals pour « le dernier concert — pour vrai, cette fois — avant le prochain album », assurait Camille Poliquin, qui forme le duo électro-pop Milk & Bone avec son amie Laurence Lafond-Beaulne. Il était autour de 19 h 30, la pluie n’allait plus venir nous déranger pendant leur tour de chant douillet, un peu trop douillet pour les circonstances, d’ailleurs.

Elles ont eu beau nous titiller avec leur reprise du duo dance russe TATu (All the Things She Said, l’une des plus rythmées du concert) et avec deux ou trois chansons nouvelles qui semblent les pousser vers des grooves plus pop et souriants, reste que la mélancolie latente de leur œuvre, délicatement déposée avec leurs voix fines sur de simples rythmiques électroniques, avait du mal à s’imposer sur la grande place. Avec Milk & Bone, on entre dans le royaume de l’intime, de la chanson électronique en dentelle, joliment faite, au demeurant. La scène paraissait un peu grosse pour nos deux orfèvres pop.

Du coup, en jetant un œil sur la suite du programme, on se disait qu’il nous faudrait manquer le vrai party du début de l’été pour écrire ce compte rendu. Pour sûr, ça allait se passer avec les efficaces Half Moon Run à partir de 22 h 30, et ensuite du côté du Métropolis dès minuit avec Pierre Kwenders, High Klassified, VNCE, Black Tiger Sex Machine et les autres marchands de beats. Parce que, bon, s’en venait Cœur de Pirate vers 21 h, elle aussi portée sur une certaine mélancolie, rien pour dégourdir les mollets et faire lever une si grosse foule, hein ?
Photo: Pedro Ruiz Le Devoir Warren Spicer, de Plants and Animals

Erreur. Avec ses quatre musiciens, Cœur de Pirate a livré un concert dynamique, bardé de refrains que ses fans étaient venus chanter en chœur avec elle, surtout ceux livrés en français, les Pour un infidèle livrée tôt, plus tard St-Laurent, puis l’enchaînement Ensemble, Adieu, Crier tout bas, Comme des enfants, Oublie-moi en clôture. Sur Cast Away et Our Love, l’orchestre surchauffait, propulsant les refrains de la Montréalaise jusqu’au fleuve. Du panache, de la gouaille, de l’autorité. Elle était fière de chanter devant tant de gens – juste après Comme des enfants, le gros plan de la caméra sur Béatrice Martin nous l’a montrée étouffant un sanglot, ravie et reconnaissante d’être là, hier soir, en ouverture du FIJM. Ou était-ce pour fêter Montréal ? Ah, mais non, c’était parce que l’été est arrivé. Enfin.

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