Randy Weston, le griot du jazz

Enfin ! Randy Weston vient d’être reconnu pour ce qu’il est depuis des décennies : un monument. Les critiques de jazz répartis aux quatre coins de la planète et que le mensuel Down Beat invite annuellement à concocter un inventaire à la Prévert ont élu Weston au Hall of Fame. On le répète, mais autrement : il était temps.
Né le 6 avril 1926 sur les hauteurs de Brooklyn, le pianiste, compositeur, arrangeur et historien de l’Afrique est l’archéologue par excellence du jazz depuis le début des années 1950. De cette époque à aujourd’hui, il n’a jamais cessé de faire l’alchimie entre les tambours du Sénégal et du Cameroun, les cordes du Mali, les flûtes marocaines, les chanteurs du fleuve Congo, les traditions soufies, la science des Dogons et le jazz conçu par ses maîtres et amis qu’étaient Duke Ellington et Thelonious Monk.
Cela fait donc 60 ans que Weston, on le répète mais autrement, s’applique à nous rappeler que le jazz est la conséquence, parmi d’autres, d’une spoliation. En clair, qu’il est né en Afrique et non dans les fjords norvégiens, sur les rives du Pô ou à Munich. Cette insistance géographique et cette évidence culturelle sont à l’origine d’une des grandes oeuvres du jazz : The Spirits of Our Ancestors, publiée en 1992 par Antilles.
Pour dire les choses telles qu’elles sont, ce double album est un des dix plus grands enregistrements de l’histoire du jazz. Oui, oui, oui… The Spirits of Our Ancestors fait partie de la catégorie où sont rassemblés, entre autres, les Kind of Blue de Miles Davis, A Love Supreme de John Coltrane, Mingus Ah Um, Monk’s Dream et Urban Bushmen de The Art Ensemble of Chicago. Il est à la fois un aboutissement esthétique et une dissertation sur une longue réflexion.
Aboutissement ? Du milieu des années 1950 jusqu’à aujourd’hui, Weston a fait de longs séjours dans plusieurs pays africains afin d’étudier au plus près leurs us et coutumes musicaux. Cela souligné, on ne sera pas étonné d’apprendre que, pour faire cet album, Weston a fait appel à deux percussionnistes qui entourent le batteur Idris Muhammad. Ce souci pour la diversité des rythmes africains s’est accompagné d’une greffe instrumentale étonnante : il a demandé à Pharoah Sanders et Yassir Chadly de jouer du genbri, du karkaba et du gaita.
À ces messieurs se sont joints de gros canons du jazz : Idrees Sulieman à la trompette, Benny Powell au trombone, Talib Kibwe, Billy Harper, Pharoah Sanders et Dewey Redman aux saxophones, Alex Blake et Jamil Nasser aux contrebasses et… Dizzy Gillespie, le maître renard de la trompette. À lire les noms des artistes invités, on aura compris que Weston et Melba Liston, sa complice pour ce qui a trait à la composition et aux arrangements, ont choisi les africanistes du jazz.
Ce qui a été accompli à la faveur de cette production, Weston n’a pas cessé de l’explorer, de le détailler depuis lors. Sur ses albums Saga, Zep Tepi, The Storyteller, Khepera, Volcano Blues et The Roots of The Blues, Weston continue à nous régaler avec ses récoltes africaines. À cet égard, on doit préciser que sa relation à l’Afrique est loin d’être cantonnée à la stricte sphère musicale. Weston n’a jamais été dans l’exercice de style.
Au contraire, il a toujours eu une inclination marquée, profonde, pour l’Histoire avec un grand H du continent africain. Pour les philosophes, les écrivains, les scientifiques de cet espace où est né, dit-on, le premier homme. En un mot comme en mille, Randy Weston était et reste un homme de la Renaissance. Il était temps de le saluer.
La pianiste et chanteuse Norah Jones va publier un nouvel album enregistré avec Wayne Shorter, Lonnie Smith et Brian Blade pour le compte de l’étiquette Bue Note. Sortie prévue : le 7 octobre prochain. Elle reprend notamment Blowin’ the Blues Away d’Horace Silver et Fleurette africaine de Duke Ellington.
Les organisateurs de la 31e édition du Festi jazz international de Rimouski viennent d’annoncer le changement suivant : le trio du pianiste new-yorkais Kevin Hays va remplacer Neil Cowley, qui a été dans l’obligation d’annuler sa prestation prévue pour le 3 septembre.