Archiv, un condensé d’histoire dans un cube

John Eliot Gardiner est un artiste qui a émergé médiatiquement dans les années 1970 grâce au catalogue Archiv.
Photo: Patrick Kovarik Agence France-Presse John Eliot Gardiner est un artiste qui a émergé médiatiquement dans les années 1970 grâce au catalogue Archiv.

Universal rassemble dans un cube 50 CD retraçant le legs artistique du label Archiv Produktion entre 1959 et 1981.

Les mélomanes ont désormais l’habitude de ces cubes renfermant une cinquantaine de CD en pochettes de carton dont la couverture reprend le visuel d’origine. Lorsque le substrat du cube est le catalogue de musique ancienne et baroque Archiv Produktion et qu’Universal regroupe en 50 CD des florilèges des « Analogue Stereo Recordings, 1959-1981 » d’Archiv, nous obtenons un objet tout à fait particulier : un raccourci d’histoire.

Documentation sonore

 

Les années couvertes sont celles de la révolution baroque. Or la vocation même d’Archiv fut d’être à la pointe de toutes les recherches. Francisé, le nom complet du label fut à l’origine « Production d’archives du studio d’histoire musicale de la compagnie Deutsche Grammophon ». Les pochettes, alors toutes beiges et dépourvues de visuel, indiquaient un sous-classement, un « domaine de recherche ». Bach était le « Forschungsbereich IX », alors que le domaine VII était « l’Europe de l’Ouest entre les époques baroque et le rococo ». Chacun de ces domaines avait lui-même des ramifications (A, B, C…) selon qu’il s’agissait de musique instrumentale, de ballet, etc.

Cette documentation sonore de recherches musicologiques rassemblait les grands esprits pionniers comme August Wenzinger (1905-1996) et les chercheurs de la Schola Cantorum de Bâle, fondée en 1933. Ils eurent une influence déterminante sur les grands esprits de la génération suivante, notamment Gustav Leonhardt et Nikolaus Harnoncourt. Ce dernier enregistra pour Archiv avant de voler de ses propres ailes.

 

Archiv avait déjà publié en 2013 un coffret (argenté) d’enregistrements échelonnés entre 1947 et 2013, allant à l’essentiel. En se concentrant sur la période analogique, le nouveau coffret (couleur bronze), qui ne recoupe en rien le premier, est plus exploratoire et diversifié, laissant davantage de place à la musique instrumentale.

Des explorations totalement oubliées refont surface : des quatuors de Vachon et d’Alayrac par le Quatuor Loewenguth, Marcel Couraud dirigeant Pigmalion de Rameau ou Claus Storck retrouvant un arpeggione pour la sonate de Schubert du même nom.

Ils sont tous là : Wenzinger (dans un disque Haendel), Ristenpart, Karl Richter, Melkus, Harnoncourt (Musique à la cour de Maximilien Ier), Mackerras avec son Didon et Énée, les moines de Silos pour le chant grégorien, Michel Corboz explorant la musique vocale portugaise et Jürgen Jürgens avec son fameux Orfeo pionnier.

Puis, imperceptiblement, apparaissent, dans les années 1970, le regretté David Munrow, John Eliot Gardiner (Acis et Galathée de Haendel), Trevor Pinnock (Suites de Bach), Reinhard Goebel (Offrande musicale), Simon Preston et Jordi Savall, qui conclut le parcours avec Battaglie e Lamenti.

 

Le raccourci est vertigineux, le coffret historiquement essentiel. Que tout cela est allé vite !

Archiv Produktion

Analogue Stereo Recordings, 1959-1981. 50 CD 479 5555