Montréal baroque, festival par immersion

En retrouvant partiellement ses quartiers au Vieux-Montréal, entre le 23 et le 26 juin, Montréal baroque regagne les lieux qui ont vu naître cette manifestation immersive, une « virée » avant la lettre.
C’est en 2003 que Susie Napper prenait le risque de créer un festival baroque autour de la fête de la Saint-Jean. D’emblée, Montréal baroque n’était semblable à aucun autre événement classique, faisant se succéder deux concerts en soirée, investissant des lieux inhabituels, explorant des avenues a priori insensées (un concert le dimanche à 7 h du matin — archicomplet !) et proposant aux familles de nombreuses activités gratuites, dont un défilé en ouverture.
Bref, Susie Napper avait redonné un sens à la notion de fête dans le mot festival, dimension trop souvent oubliée par des manifestations plus institutionnalisées. Aujourd’hui, Susie Napper continue de passer le flambeau à son successeur désigné, Matthias Maute. Tous deux portent le titre de codirecteurs artistiques. Avec un retour partiel dans le Vieux-Montréal, c’est une partie de l’esprit de Montréal baroque qui renaît, alors que le festival s’était replié depuis deux ans sur le campus de l’Université McGill.
Tempêtes
Comme par le passé, Montréal baroque repose sur un thème. Avec le titre « Tempête dans un verre d’eau », le millésime 2016 évoquera les « tumultes de la nature » et nous promet un ouragan musical. Au-delà du déchaînement des éléments, Susie Napper et Matthias Maute précisent que « “Tempête dans un verre d’eau”, c’est aussi l’espoir de l’apaisement des tourments et qu’un rayon de soleil naisse au bout de l’horizon… ».
Montréal baroque 2016 s’ouvrira le 23 juin à 12 h par un concert extérieur gratuit au square Phillips, suivi d’un marathon musical de 15 h à 18 h réunissant musiciens amateurs et professionnels.
Le grand concert du soir, à 19 h, à la salle Redpath de l’Université McGill, affichera La tempête de Prospero, une soirée unissant des passages de The Tempest de Shakespeare et la musique de scène de Purcell et Blow. Ce concert, soulignant le 400e anniversaire de la mort de Shakespeare, sera proposé par la Bande Montréal baroque, les ensembles Passiflore, Flûte Alors ! et Pallade Musica, dans une mise en scène de Jean Asselin.
La tempête soufflera ensuite, à 21 h, dans la même salle lorsque des guitares électriques s’associeront aux violes des Voix humaines pour faire exploser l’Art de la fugue de Bach, compositeur dont un autre jalon majeur, les Sonates et Partitas pour violon seul, sera interprété par la violoniste Lina Tur Bonet, invitée spéciale du festival. La bouillonnante Espagnole effectuera ce parcours en trois concerts, le vendredi 24 juin à 14 h, le samedi 25 juin à 21 h et le dimanche 26 juin à 16 h, dans trois lieux différents. Autre invité vedette, le gambiste italien Paolo Pandolfo se produira le 26 juin à 11 h dans le hall du pavillon des Arts de McGill.
C’est vendredi, jour de la Saint-Jean, que Montréal baroque retrouvera le Vieux-Montréal. Après un déjeuner-causerie avec Gilles Cantagrel, à 9 h au café Tasse et coupe, la salle de la commune du marché Bonsecours abritera à 11 h un récital d’Odéi Bilodeau, lauréate du Concours Mathieu-Duguay du Festival international de musique baroque de Lamèque, et du claveciniste Martin Robidoux, le premier concert des Sonates et partitas de Bach (14 h) et Larmes et tempêtes ! par l’ensemble Sonate 1704 et la soprano Jacinthe Thibault (17 h). Des concerts extérieurs gratuits se tiendront dans le square Phillips et à la place d’Armes à midi (Metis Fiddler Quartet) et à 16 h (Ensemble vocal Tactus).
Le soir, la chapelle Notre-Dame-de-Bon-Secours abritera le programme Il grêle ! La grande gigue de l’Ensemble Caprice et du Metis Fiddler Quartet (19 h), et sa crypte, un concert intime de musique de Joseph Bodin de Boismortier, avant une soirée de la Saint-Jean débridée.
Si le grand concert du dimanche 26 sera logiquement consacré à la suite de la présentation des cantates de Bach par Eric Milnes et la Bande Montréal baroque, avec les Cantates BWV 76, 79 et 80 enregistrées en vue d’une parution CD sur étiquette Atma, le projet original qui suscite la curiosité sera donné samedi 25 juin à 19 h.
Intitulé La veuve Rebel à la foire Ville-Marie, il s’agit d’un projet du Nouvel Opéra, organisme réunissant la soprano Suzie LeBlanc et la chorégraphe Marie-Nathalie Lacoursière. Présenté à Montréal, puis au Festival de Saint-Riquier en France, La veuve Rebel à la foire Ville-Marie est un spectacle de musique, de chant, de danse et de théâtre inspiré par les théâtres de foire du XVIIIe siècle. Il sera composé de trois ballets parodiques sur des musiques de Jean-Féry Rebel (Les éléments, Les plaisirs champêtres, Ulysse) et ponctué par des extraits de comédies foraines mettant en scène Pierrot et Arlequin. Le Nouvel Opéra nous prévient que « le chant, la danse, le jeu, la déclamation et la prononciation suivront les conventions et l’esthétique de l’époque » et qu'« une chorégraphie de 1704 écrite pour Ulysse sera même intégrée au spectacle ».