Une rentrée à la pièce

Sylvain Cormier Collaboration spéciale
On peut se procurer une nouvelle chanson des Sœurs Boulay sur iTunes depuis le 20 août dernier.
Photo: Annik MH De Carufel Le Devoir On peut se procurer une nouvelle chanson des Sœurs Boulay sur iTunes depuis le 20 août dernier.

Fais-moi un show de boucane. Ce n’est pas le titre du deuxième album des Soeurs Boulay, qui devrait paraître avant le défilé du père Noël, mais bien l’appellation fumante d’une chanson à fond l’accélérateur que l’on peut se procurer depuis le 20 août dernier. Disponible sur iTunes, et sur toutes les plateformes d’écoute en continu, précise le communiqué. Entendez : ça annonce l’album, comme au temps du « premier extrait radio », mais ça existe en soi. Expérience complète. « Pis ça presse », chantent Mélanie et Stéphanie, « […] le feu est pris dans boîte à gants » : on dirait que la chanson s’est échappée de l’album, irrépressible, folk-rock en rut, réalisation à la fois fine et brute de Philippe B. Ça donne le goût. D’acheter tout de suite la chanson. L’album ? Une vente à la fois.

C’est l’idée. Hola les lolos, depuis le 6 juillet, vit ainsi sa vie de nouvelle chanson de Bernard Adamus : le lancement aux Foufs de l’album Sorel Soviet So What, fin septembre, est en quelque sorte une autre affaire. Mise en marché distincte. Comme au temps des 45-tours. La pratique n’est pas neuve, mais elle se systématise. Pas le choix. Oui, la chanson sert encore de locomotive au grand oeuvre et sa douzaine de wagons. Mais non, le destin de la nouvelle toune et le sort de ses consoeurs ne sont plus aussi intrinsèquement liés.

Très attendues

 

Aussi avez-vous peut-être dans votre virtuelle discothèque tout un tas de chansons des albums les plus attendus de l’automne : You’ve Changed, d’Americana Submarine, le premier EP en solo de Laura Sauvage (la vivifiante Viviane Roy des Hay Babies, sous un pseudo qui rappelle irrésistiblement la Rita Sauvage du film de Gilles Carle, Les mâles) ; Trust, de Sun Leads Me On, le deuxième Half Moon Run que l’on n’aura pas avant fin octobre ; Here’s to the Death of all the Romance, proposée au téléchargement un gros mois en amont de la parution du nouveau The Dears, Times Infinity Volume One ; et bien d’autres.

Le Roses de Coeur de pirate, en magasin le 28 août, a été précédé de si longue date par la bilingue Oublie-moi (Carry On) qu’on s’étonne presque de retrouver la chanson dans l’album : on en parle dans sa bio comme d’un morceau de son curriculum. Chez Audiogram, DEUX pièces du prochain album de Catherine Major sont affichées à l’enseigne d’iTunes : Rien du tout et la chanson-titre La maison du monde. L’intervalle est vertigineux : chanson-titre présentée à la mi-mai, lancement de l’album à la mi-septembre.

On notera qu’il y a des dissidents : dévoilé à la mi-août, Bye bye Lou se présente bel et bien à l’ancienne, comme le « premier extrait radio » du nouveau Cowboys Fringants, promis cet automne (et réalisé par Gus Van Go et Werner F., le tandem du dernier Whitehorse, mon album fétiche de 2015 : bon signe). Exception confirmant l’incontournable nouvelle norme ? Geste de résistance, comprend-on.

Toutes les façons

 

Toutes les stratégies sont bonnes, dans la nouvelle donne numérique. Sont justifiées toutes les façons d’amener le consommateur de musique à désirer assez ses préférés pour le prouver en espèces sonnantes et trébuchantes, y compris la niche du vinyle. Eh ! Il y a tant d’offres ! En septembre, rien qu’au Québec, je compte au moins une parution par jour. Ça va d’opportunistes d’albums-hommage (Pelchat chez Bécaud, Brigitte Boisjoli pas gênée de se payer Patsy Cline) à d’authentiques nouveautés : Limoilou, le premier album dur et magnifique de Safia Nolin (en précommande sur iTunes, soit dit en passant : allez-y de ma part), et celui tout aussi nouveau-né de Rosie Valland, intitulé Partir avant.

Mais encore ? Je ne vous ferai pas de liste d’épicerie (l’ADISQ fournit un calendrier passablement complet sur son site), mais j’attends bien impatiemment le nouveau Philémon Cimon (Les femmes comme des montagnes), le Susie Arioli, l’Ingrid St-Pierre, le Jordan Officer, le Seasons… Et quelques disques venus d’ailleurs.

Échantillons

 

Un aveu ? Faded Gloryville, le nouvel album de Lindi Ortega, dans le lecteur de l’auto depuis deux semaines, testé jusqu’au Massachusetts, fait déjà ma saison : personne ne se joue dans le vif des plaies avec autant de brûlant sans-gêne que l’ancienne Ontarienne de Nashville. Qui la délogera du lecteur ? Peut-être l’album solo inespéré de Keith Richards, le forcément événementiel Crosseyed Heart. Lequel paraît le même 18 septembre que Rattle That Lock, le nouveau David Gilmour. Guitaristes célébrés, mais pas dans le même bout du manche. Prince, manieur pas manchot non plus et prolifique créateur quand ça lui prend, viendra jouer dans les platebandes avec un autre disque, sur les talons de ses deux précédents : HITNRUN. En un mot.

Un album d’inédits de Kurt Cobain, quelqu’un ? Rééditions grand luxe des Tug of War et Pipes of Peace, négligés du catalogue McCartney ? Coffret américain des premiers 33-tours de Françoise Hardy ? Retours de Los Lobos, Duran Duran, Don Henley ? Vous n’êtes pas obligés. Après tout, il y a Jewel qui revient aussi, et Lana Del Rey, The Chills, Grand Corps Malade, St. Germain, PJ Harvey, The Dead Weather avec ce diable de Jack White. Et la grandissime interprète Darlene Love. La chanteuse à tout chanter de Phil Spector, redécouverte en 2013 dans le documentaire 20 Feet From Stardom. Le titre de l’album, réalisé par Steve Van Zandt, avec des contributions de Springsteen, Costello, Jimmy Webb, est très volontairement ironique : Introducing Darlene Love. À 77 ans, il est à peu près temps. En précommande sur iTunes, ça aussi.

Ce contenu a été produit par l’équipe des publications spéciales du Devoir, relevant du marketing. La rédaction du Devoir n’y a pas pris part.

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