La diversité culturelle dans toutes ses gammes

Au Québec, les artistes de la diversité culturelle créent environ un disque par semaine. Certains profitent d’une structure organisée, alors que d’autres, faute de moyens, décalent les lancements de leur album ou s’en remettent davantage aux réseaux sociaux pour assurer leur promotion. En voici sept qui méritent une écoute. Ils sont indépendants, bien différents les uns des autres, et ont tous fait paraître un disque depuis le début de 2015. Pour une Cécile Doo-Kingué qui parvient à accéder à un réseau de diffusion relativement plus large, d’autres se battent avec persévérance dans l’underground. Ils sont parfois repérés par des diffuseurs, des promoteurs ou, plus rarement, des labels internationaux, mais ils doivent être patients. Pour chacun des disques présentés ici, nous indiquons de quelle façon les trouver. Bonne écoute !
Cécile Doo-Kingué, Anybody Listening – Part 1 : Monologues (Indépendant, cdkmusik.com/musik, iTunes, Amazon, cdbaby)
Pour son troisième album, la chanteuse-guitariste Cécile Doo-Kingué propose un disque acoustique et dénudé : le premier d’une trilogie sur les racines musicales et tous les aspects de la vie. Son blues est plus universel et ouvert que formel, sa parole est sociale, sa voix, mélodieuse, et sa guitare, très souple, avec ou sans bottleneck. Dans sa musique, il y a aussi l’Afrique, subtilement intégrée par l’héritage, et la citoyenne du monde rassembleuse et dénonciatrice. Une artiste aux mille talents.
Mehdi Nabti Pulsar 4, Multiple Worlds (F-IRE, iTunes, Amazon et autres plateformes numériques)
Le prolifique compositeur-saxophoniste Mehdi Nabti vient de signer avec le label de jazz anglais F-IRE, qui lance cette compil’ de presque tous les titres d’Artistes en résidence et de Temps composés, les deux disques de Mehdi Nabti Pulsar 4. C’est un excellent groupe à la pulsion rythmique intense, qui offre un world jazz sauvage empreint de transes des confréries maghrébines, mais aussi de l’Europe traditionnelle autant que très contemporaine, là où les temps se confondent de l’Antiquité à la science-fiction.
AfriKeleKtro, AfriKeleKtro EP, (Indépendant, www.afrikelektro.com, iTunes, cdbaby)
Appuyé par DAM, le trio AfriKeleKtro est partie prenante de l’afro-électro, un courant très créatif en ce moment. Ici, Lionel Kizaba, le chanteur-batteur-percussionniste venu de la RDC, mène les destinées du groupe en puisant dans ses inspirations pour le moins éclectiques, de Daft Punk à Fela et à la musique du Kassaï. Mais les deux autres partenaires sont aussi très présents : le claviériste Vergil Sharkya fait plonger le groupe dans l’électro et le guitariste Chris Hamel Burrage joue plus funky. La musique est accrocheuse et explosive.
Orkestar Kriminal, Tummel (Sainte Cécile, www.mediafire.com)
Les membres d’Orkestar Kriminal ont enregistré à l’ancienne, au studio Hotel2Tango, en temps réel sur ruban ¼ de pouce, le tuba placé dans un coin, la voix en avant et les autresinstruments disposés selon la force sonore. Punks avant la lettre, l’octuor Orkestar Kriminal interprète un répertoire international de chansons de voyous des années 1920 et 1930, souvent sous l’angle du gagne-petit. C’est la fanfare rapide à la guitare électrique, les instruments qui répondent, la plainte dramatique et les jeux gutturaux. À la fois excitant et larmoyant !
Matching Keys, Momentum (Indépendant, www.matchingkeys.com, iTunes)
Figure de la musique celtique dans la capitale, Matching Keys offre depuis une décennie des pièces instrumentales composées par les membres du groupe, de même que des pièces traditionnelles généralement tirées des archives, pas encore enregistrées et interprétées en anglais par Bill Vincent, le chanteur à la voix grave et élégante. Il chante l’amour, la vie des bûcherons, des draveurs et des marins, dont quelques-uns ont « échoué » au Québec. Heureusement pour eux, leur histoire est portée par de très bons musiciens dans Matching Keys.
Francis Leclerc, Roots Crossing (Indépendant, francisleclerc.bandcamp.com)
La souche commune des titres de Francis Leclerc, compositeur-guitariste, est le flamenco, qu’il a longtemps appris dans sa forme la plus trad. Mais sa formation classique ou une intention plus folk expliquent sans doute le caractère plus suave des pièces qu’il interprète ici avec sensibilité. Un répertoire instrumental qu’il livre avec violoncelle, basse électrique, percussions ou harmonica. Au menu : six créations et deux versions de titres de Desjardins. Un disque bellement relaxant et tout en finesse.
Carina Lorenzo, Ahora (Indépendant et en version bonifiée sur iTunes)
Française de souche espagnole, Carina Lorenzo a commencé le flamenco à l’âge de sept ans. Avec le temps, elle a créé une chanson populaire très inspirée par la rumba flamenca et le flamenco-fusion, quelque part entre les Gypsy Kings et Ketama. La voix graveleuse, elle navigue en espagnol entre rumba bluesy, parfois funky, plus percussive ou aérienne, et la ballade romantique.