Bernard Adamus, 125 shows plus tard

Les dernières. La der des ders. C’est la nouvelle idée pour faire parler encore d’un spectacle : on rend désormais événementielle la fin de parcours, fin de tournée, fin de cycle. À tout le moins y convie-t-on les mêmes médias qu’aux premières : cette semaine, coup sur coup, au même Cabaret du Mile-End, Marie-Pierre Arthur puis Bernard Adamus concluaient, et nous assistions jeudi soir à la conclusion d’Adamus.

Manœuvre un brin désespérée d’une industrie en mal de visibilité ? Oui et non. Dans les deux cas – j’ajouterais la remise prévue en décembre d’un disque platine à Lisa LeBlanc, juste avant qu’elle ne passe sous le radar en mode écriture -, il s’agit de refaire un peu de lumière sur l’artiste et son disque à l’approche des Fêtes, ce qui ne peut pas nuire. Mais l’occasion, me disais-je, nous est fournie là de vivre ce qu’on ne vit pas d’habitude : un spectacle à son extrême degré d’achèvement et d’efficacité dans le lâcher lousse.

Chez lui

Lousse ? Fallait voir Bernard Adamus déambuler parmi ses spectateurs, avant et pendant la première partie (assurée par le duo guitare batterie Ponctuation, du sous-Black Keys en français dont on a vite souhaité le point final) : du bar à la table de marchandises, le grand gaillard était chez lui, zéro stress, zéro distance de vedette. Un quidam, quasiment, même pas salué en chemin, ou si peu.

C’était beaucoup ça jeudi, Adamus dans l’ex-Club Soda (lieu qui n’a pas changé d’une balustrade, j’en témoigne, des Colocs à Oasis à notre homme aux dreads les plus mobiles depuis Bob Marley) : une célébration à guichets fermés pour les fans les plus fans (supplémentaire ce soir), qui ont eu amplement le temps de loger au chaud de leur chaumière l’intégrale des textes du Bernard Adamus No 2, et un sacré party sans s’énerver pour l’auteur-compositeur-interprète.

Ça a démarré avec Y fait chaud (alors qu’on se les gelait dehors, c’était exprès), et ça n’a pas dérougi ensuite. « C’est pas Denis Coderre qui va faire les tounes, fait que ça va être correct », a lancé le chanteur rien que pour faire rigoler. Ça donnait le ton. La fanfare de cuivres – où l’excellent Benoît Paradis ne se faisait même pas remarquer tellement l’esprit de corps y était – pétaradait à souhait, on était à la fois à la Nouvelle-Orléans et sur l’avenue du Parc, ça fêtait déjà franchement. Ça a continué à bord de La diligence, avec jungle beat frénétique façon Cotton Club, et ainsi de suite.

Je ne suis pas resté très longtemps, une demi-douzaine de chansons, juste assez pour constater qu’il n’y avait rien à dire de plus – le collègue Philippe Papineau avait tout décrit au Métropolis en juin dernier, ainsi qu’à la première de novembre 2012 au Club Soda depuis longtemps déménagé sur la Main – et tout à partager dans l’allégresse générale.

C’était certainement chouette à voir, assurément bon à vivre pour les adamusophiles patentés, mais la salve de shows vécus en la compagnie du zigoto et des siens cet été aux Francos de Spa m’avait suffi pas mal plus que je ne le pensais, et j’ai laissé la petite foule et Bernard Adamus à leur liesse collective. Avec mon bloc-notes, il faut bien l’avouer, j’étais un peu superflu.

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