Le cadeau

C’était la récompense avant de commencer, une sorte de grande rasade de bonheur et de bonne énergie et de petits rires jouissifs avant d’aller jouer au festivalier jazzophile, une manière de dire : profitez-en, vous allez en manger, de la musique, à satiété, n’oubliez pas de la savourer un peu.

Ce spectacle du groupe qui porte le nom de son chanteur-créateur-en-chef était aussi une séance de réchauffement : Patrick Watson part en tournée européenne, les arrangements sont considérablement retravaillés pour ensemble plus réduit (il était en mode symphonique la semaine dernière à Toronto, et le sera à l’église Saint-Jean-Baptiste pour trois soirs en novembre), tout ça demandait une p’tite saucette dans un plant d’eau local. Et pourquoi pas au Gesù ? Après la place des Festivals baptisée en 2009, après Wilfrid et ses trois mille lucioles l’an dernier, notre Pat était ravi de se retrouver dans une « petite salle » où il n’avait « jamais joué ».

Et nous alors ! Privilège de la proximité, chance inouïe saisie, nous étions un brin extatiques, d’entrée de jeu : qu’à cela ne tienne, le gars sous la casquette (avec les as musiciens Robbie Kuster, Joe Grass, Mishta Stein, Josh Zubot, les choristes Ariel Engle et Jocie Adams) nous a bercés à son rythme, caressés avec sa voix d’ange, a été où il voulait, et c’était souvent l’inconnu. L’aventure de la musique, la grande, la belle ! Oh si, on reconnaissait les titres aimés, Man Like You, Into Giants, Quiet Crowd, mais on les découvrait réinventés, une fois de plus. Réinvention, mode de vie !

Toute une séquence autour d’un micro rappelait le bivouac de Louis-Jean Cormier vendredi dernier, mais avec la manière de gamin de Pat, qui s’immisçait et se retirait du groupe tel un « jack in the box », allant batifoler plus loin, chantant sans micro du tout, etc. Un homme libre, en transe, en joie.

Cette propension au jeu n’empêchait pas les passages somptueux et les signatures musicales hors du commun : ici une scie égoïne avec un violon et un pedal steel, là une trompette sortie de chez Morricone, tout était possible et tout arrivait. Immense cadeau, tout le temps. Merci.

Un mot sur Arc Iris, le groupe en lever de rideau : difficile d’imaginer plus exquis prog-folk, à sept sur scène, dont une marrante chanteuse-elfe (Jocie Adams). À revoir.

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