ADISQ - Le gala de l'industrie et l'Autre gala - L'année country

Laurence Hélie, Roch Voisine, même combat? Même grande famille, à tout le moins. Dans la vaste contrée du country, constatait-on hier à L'Autre gala de l'ADISQ, ils sont pour ainsi dire p'tits cousins de pedal steel. Les voir tous deux monter sur la scène du Saint-Denis — pour les 25 ans de l'ADISQ, l'Autre gala avait exceptionnellement droit à la même salle que le gros gala de dimanche — était en cela une vraie victoire pour le genre musical: ça voulait certainement dire que le country, cette dernière année, aura rejoint tout autant les aficionados des productions indépendantes que le grand public.
Autant l'Americana de Voisine ne s'imposait pas d'emblée dans la catégorie «album de l'année - reprises», dont le Félix aurait très légitimement pu aller à l'album des chansons de la série Trauma par Ariane Moffatt ou les Nouvelles fréquentations des Charbonniers de l'enfer, autant l'éponyme premier album d'Hélie avait affaire à forte partie. La donne de la catégorie country a-t-elle jamais été aussi relevée? Les albums des Chantal Archambault, Isabeau et les Chercheurs d'or, Tire le coyote et autres Frères Goyette étaient tous d'exemplaire tenue, et tous dignes représentants d'une nouvelle fournée d'artistes qui a trouvé son country ailleurs que dans les sentiers battus. Au podium, Hélie les a d'ailleurs louangés, pas trop sûre d'être vraiment là, soupesant la statuette comme pour y croire: «C'est lourd pour vrai!» À ses côtés, le réalisateur et multi-instrumentiste Joe Grass cherchait une contenance, entraîné là malgré lui par la chanteuse trop contente.Voisine, lui, a remercié à son premier tour de micro «les fans de country au Québec, et ceux qui le sont devenus cette année»: il a aussi remporté le Félix de l'«artiste québécois de l'année - interprétation autres langues». C'était le seul double gagnant de l'Autre gala, mais pas de la journée: au «gala de l'industrie» qui avait lieu plus tôt à l'habituel Club Soda, Fred Pellerin a été salué à la fois en tant que «scripteur de l'année» et «metteur en scène de l'année» pour le spectacle Saint-Élie-de-chansons; le travail du tandem Olivier Langevin-Pierre Girard sur le dernier album de Galaxie — l'excellent Tigre et diesel — a pareillement été souligné par deux fois (réalisation, prise de son et mixage). À l'opposé, l'incontournable Angèle Dubeau a été contournée deux fois: par l'Orchestre Métropolitain en «classique / orchestre et grand ensemble» et par Alain Lefèvre, David Lefèvre et le Quatuor Alcan en «classique / soliste et petit ensemble». Fin de règne? Ce serait présumer.
L'Autre gala aura été le lieu de revoyures notables: en plus du retour de Voisine (dont le sonorisateur a obtenu son propre Félix, soit dit en passant), on a à nouveau consacré les André Gagnon (reconduit en musique instrumentale), Alain Caron (en «jazz création») et l'inénarrable Ginette Reno («album de l'année - meilleur vendeur»). Ginette n'en était pas moins contente comme une débutante: «J'ai les fesses qui me tremblent, j'ai toujours l'impression que c'est la première fois...» C'était véritablement la première fois pour le groupe Arcade Fire: le Félix du meilleur album anglo de chez nous, catégorie pour laquelle la belle équipe avait glané sa toute première nomination, leur est forcément revenu. Le groupe n'était pas là, et l'animatrice Catherine Pogonat — le gala était diffusé à MusiquePlus et MusiMax — a dit pourquoi: «Arcade Fire est à San Francisco et participe à un spectacle-bénéfice avec Neil Young...» Sous-entendu: pour Neil Young, d'accord.
Mais encore? Malajube chez les alternos, Samian en hip-hop, Misteur Valaire chez les électros, Élage Diouf en musiques du monde, le Rémi Bolduc Jazz Ensemble en «jazz interprétation», Éric Lapointe en rock, le groupe Les petites tounes pour la jeunesse, La Volée d'castors en trad, Marie-Josée Lord en «classique vocal», sont tous repartis avec un Félix d'«album de l'année». La chanteuse était carrément extatique, et n'a pas manqué de remercier Guy A. Lepage de l'avoir invitée à son émission et, ce faisant, de lui «avoir sauvé la vie».
Sans surprise, c'est la bondissante chanteuse française Zaz qui a été élue «artiste de la francophonie s'étant le plus illustré au Québec», et c'est Vallières qui a été chercher le Félix pour le clip de la très fédératrice chanson On va s'aimer encore: grosse option sur le gros lot de dimanche, se disait-on dans la salle de presse. Chanson de l'année? Ça se pourrait bien. Notez que la liste complète des nominations et gagnants des deux galas d'hier peut être consultée sur le site adisq.com. La suite dans six jours.