Sir Paul charme déjà Québec

Québec — Des quatre Beatles, Paul McCartney est celui qui semble avoir le plus goûté aux joies de la renommée. Moins provocateur que John, plus dégourdi que George, plus talentueux que Ringo, il reste encore, après plus de 40 ans de carrière, le plus fier ambassadeur du mythe.

Non seulement a-t-il accepté de venir se produire au 400e, mais il a pris la peine de transmettre à son public un sympathique message vidéo. «Bonjour tout le monde au Canada! Comment ça va?, lance-t-il en anglais. Ici Paul McCartney. Je veux annoncer que je vais faire un show, un gros show le 20 juillet. C'est pour aider Québec à célébrer son 400e anniversaire. C'est la première fois que nous venons à Québec, on va vraiment s'amuser et j'adorerais vous y voir. Donc, 20 juillet, Québec, 400 ans à célébrer. Soyons-y ensemble!»

Du McCartney tout craché. Charmeur, généreux de son temps. Et le résultat est là: les gens de Québec sont doublement fiers et contents. D'autant que le spectacle de McCartney est essentiellement dédié au répertoire des Beatles, aux pièces les plus connues. «Au sein des fans clubs, c'est probablement le plus populaire», concède le représentant du fan club Beatles Québec Alain Lacasse.

Jeune, Paul est celui qui attirait toutes les groupies, et ce, sans déplaire à leurs mères. La petite histoire des Beatles lui attribue peu de mauvais coups. Certes, il a été le premier à reconnaître avoir pris du LSD. Ce que les autres avaient trouvé un peu étrange... puisqu'il avait été le dernier à en faire l'expérience.

En 50 ans de carrière, son image est restée presque sans tache. À la suite de son divorce d'avec Heather Mills, un sondage le plaçait parmi les personnalités les plus aimées de l'Angleterre, son ex-femme figurant en haut du palmarès des plus honnies.

Chouchou? «Oui. C'est tellement un mélodiste hors pair! poursuit M. Lacasse. En plus, c'est un homme qui semble très sympathique, très simple. Les Beatles venaient d'un milieu ouvrier, ce sont des gens qui ont commencé au bas de l'échelle, alors ils n'ont jamais eu la grosse tête. Les gens s'identifient facilement à cet homme-là.»

Dans le milieu de la musique, McCartney est un talent qu'on se plaît à jalouser. On le dit trop populaire, voire trop «simple», mais tous s'inclinent devant le génie de cet homme qui a marqué l'histoire de la musique sans savoir lire une partition.

«C'est sûrement mon bassiste préféré, note le chanteur et bassiste Fred Fortin. À cause de son style mélodique, son beau son, sa facilité. Il a un talent incroyable. En fait, il fait vraiment chier!» Avec son père et des amis, Fred Fortin a même créé un groupe, les Chuck Berry, qui rejoue certaines de ses pièces préférées, comme Baby's in Black. «Beaucoup des détracteurs de Paul McCartney lui reprochent d'être parfait. On dit qu'il est un peu froid, que ce n'est pas un grand parolier et qu'il n'a pas le côté "soul" de Lennon. Mais en même temps, il arrive, il fait sa petite toune, avec sa petite mélodie, et ça marche!»

Animateur à Sherbrooke d'une émission de radio dédiée exclusivement aux Fab Four, Stéphane Messier abonde dans ce sens. «C'est un mélodiste incroyable. S'il y a une phrase à retenir, c'est celle-là.» Âgé de 30 ans, l'animateur n'était même pas né quand ils se sont séparés en 1970 et il s'intéresse autant à leurs projets solo qu'au groupe. «Quand j'étais petit, McCartney, c'était le gars qui chantait Say, Say, Say avec Michael Jackson. Et puis il a chanté avec Stevie Wonder. Mais c'est son album Flowers in the Dirt en 1989 qui a été une révélation pour moi.»

Quand on lui demande si le qualificatif de «chouchou» sied bien à son idole, il n'hésite pas longtemps. «Oui, Paul aime le vedettariat dans un certain sens. Il aime être sur scène, être vu, créer l'événement.»

Sir Paul n'a certes pas beaucoup d'affection pour les paparazzis, mais il se prête sans broncher au jeu de la nostalgie collective et continue de raconter l'histoire des Beatles en entrevue ou à travers mille projets, dont le spectacle Love du Cirque du Soleil ou le récent documentaire sur le même sujet, All Together Now.

Sinon, pour bien des fans, la meilleure époque de McCartney en solo est celle des premiers albums McCartney et Ram. On reconnaît à la période Wings quelques bonnes pièces, comme la spectaculaire Live and Let Die, mais en général, les gens considèrent que ça s'est gâché durant les années 1980. «Sa période Stevie Wonder était insupportable!», lance le chanteur Éric Goulet (alias Monsieur Mono). Lui aussi a créé son band de Beatles, Les Ringos. Avec d'autres «fans finis» (Damien Robitaille et des musiciens des Chiens), il revisite les chansons moins connues du groupe.

McCartney n'est pas son préféré, mais il s'incline devant le «génie». «Je préfère George, mais en même temps, la plupart des chansons que je préfère ont été écrites par Paul, ce qui est un peu paradoxal.» Parce qu'il est trop simple, reconnaît-il. «Il n'a pas des préoccupations aussi ésotériques que George Harrison, n'est pas aussi caricatural que Ringo, ou sarcastique que John. En même temps, d'un point de vue musical, c'est celui qui a le spectre musical le plus large.» En effet, un monde sépare Helter Skelter de Honey Pie...

Le contraste entre ces deux chansons témoigne aussi du potentiel vocal de McCartney. À ce niveau aussi, d'aucuns trouvent qu'il «l'a eu facile». «Il n'a jamais l'air de faire des efforts, fait remarquer Éric Goulet. Même quand il crie, il n'a pas l'air de forcer.» Quant à son «jeu de basse», il «mérite une thèse d'université», ajoute-t-il.

Fils d'un grand admirateur des Beatles, Fred Fortin leur attribue toute sa formation musicale. «Quand j'étais petit, j'étais sûr que j'étais le plus grand fan des Beatles au monde. Les premières lignes de basse que j'ai sues, c'est celles de I Saw Her Standing There. Je devais avoir huit-dix ans. Ç'a été mon école. Et puis, après les avoir découverts, je me suis intéressé à leurs racines à eux: Chuck Berry, Ray Charles, etc.»

McCartney n'aura donné que trois concerts cette année (à Kiev, à Liverpool et à Québec). Lors du concert de Kiev en juin, des admirateurs lui avaient fait parvenir une demande spéciale — Mrs. Vandebilt — et il l'a jouée. À Québec, les membres du fan club ont voté pour Oh! Darling.

On prévoit que jusqu'à 170 000 personnes pourront assister à son concert gratuit sur les plaines d'Abraham. Difficile d'évaluer quelle sera l'ampleur du débarquement de fans hors Québec, mais on peut prévoir de longues heures d'attente pour une bonne place. Peu porté sur les foules, Éric Goulet ne sera pas là, Fred Fortin non plus. Stéphane Messier, lui, est prêt à attendre. Même chose pour Alain Lacasse. «Les gens vont débarquer de l'Ontario, des Maritimes... Il faut savoir qu'en temps normal les billets pour les spectacles de McCartney sont très chers. Il va falloir faire des efforts pour le voir, mais ça vaut la peine!»

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