Zizek Urban Beats Tour - La cumbia reprend ses droits

La musique cumbia est la musique de la populace. Du moins, c'est la perception qu'ont encore plusieurs bien-pensants dans la capitale de l'Argentine. Le style est originaire de la Colombie, mais il foisonne depuis des dizaines d'années dans de nombreuses régions de l'Amérique latine. Une nouvelle forme de cumbia envahit pourtant aujourd'hui le chic Buenos Aires, où se rassemblent des artistes de l'ensemble du pays. Zizek Urban Beats, l'un des événements les plus populaires du genre néo-cumbia, fait escale demain soir à Montréal. Entretien avec deux artisans du mouvement.

«Nous avons commencé à mélanger la cumbia avec plusieurs musiques électroniques au début de la décennie, se rappelle Federico Rodriguez, du duo rap Fauna originaire de Mendoza. Nous y mélangions la musique drum'n'bass, très saccadée, avec la rythmique cumbia. Un grand nombre de musiques nous influencent, mais on y colle de plus en plus des rythmiques d'inspiration ragga jamaïcaines et le résultat est encore plus explosif!»

La cumbia est elle-même le résultat d'un métissage unique entre la culture des esclaves déportés d'Afrique, celle des Européens colonisateurs et celle des autochtones. Ses interprétations se déclinent d'ailleurs aujourd'hui en diverses influences selon le pays d'origine de ses interprètes.

«Nous ne sommes pas les seuls à nous être approprié la musique cumbia, renchérit Rodriguez. Dans toutes les régions du continent, les artistes locaux ont repris ce genre à leur manière.» La cumbia, symbole des classes ouvrières, semble pourtant, avec cette nouvelle mouture, pouvoir voyager largement sur toute la planète.

Latinité

Avec la cumbia pour porte-étendard, plusieurs musiques latines, la bachata ou le reggaeton en sont d'autres exemples, se frottent depuis quelque temps à différentes musiques produites à l'ordinateur. Aidés par la diffusion gratuite de leurs oeuvres sur Internet, des DJ et des musiciens argentins, tels Villa Diamante ou Oro11, ont également connu un certain succès de ce côté-ci du continent. Depuis bientôt cinq ans, on observe ainsi un regain d'intérêt en Amérique du Nord et en Europe (en grande partie grâce au Web) pour la musique électronique inspirée des genres célébrés dans les quartiers populaires de plusieurs villes et régions du monde paupérisé.

«Plusieurs des artistes avec lesquels je collabore ont produit leur musique sur le vieil ordinateur familial ou sur un ordinateur emprunté», raconte Grant C. Dull. Ce DJ américain installé en Argentine depuis trois ans est le principal organisateur des événements Zizek. «L'accessibilité des technologies permet enfin à toutes les bonnes idées d'être conçues et diffusées beaucoup plus facilement.»

Dull vient de lancer cette semaine le premier disque de l'étiquette Zizek Records, la compilation ZZK Sound Vol. 1 - Cumbia Digital, qui rassemble la plupart des artistes majeurs du genre en Argentine. Selon lui, le phénomène derrière ces nouvelles interprétations de la cumbia s'inscrit dans une mouvance beaucoup plus large. Après le choc de la dernière crise économique argentine, l'îlot à l'influence très européenne qu'est Buenos Aires renoue enfin ses liens longtemps occultés avec l'Amérique latine.

***

Collaborateur du Devoir

***

- La tournée nord-américaine de Zizek s'arrête demain soir au Club Lambi de Montréal (4465, boul. Saint-Laurent) avec les DJ et musiciens Chancha Via Circuito, Villa Diamante, Oro11, Fauna et Glove. Renseignements: www.whatsupbuenosaires.com/zizek.

À voir en vidéo