Spectacles - Avant Springsteen, après Springsteen...

Bruce Springsteen et son E Street Band en spectacle
Photo: Agence Reuters Bruce Springsteen et son E Street Band en spectacle

Pour certains, la saison n'a qu'un nom (et une date, et un lieu): Bruce Springsteen, le 2 mars, au Centre Bell, avec son E Street Band. Pour d'autres, rien de bon n'arrivera d'ici au retour de Radiohead, à moins que ce ne soit le retour de Leonard Cohen (dates et lieux à venir). Pour d'autres encore, c'est déjà fini: Ozzy, c'était mercredi dernier. Ce qui ne fera pas un pli à ceux qui ont leurs billets pour la première montréalaise d'Isabelle Boulay au Saint-Denis, fin février. Chacun ses allégeances.

J'étais comme ça, exclusif et fier de l'être, avant que le métier de critique ne me fasse le coup du «sortez-moi de moi», comme chante Bélanger, et me rende un peu plus universellement curieux, ajoutant à mon goût naturel pour l'expérience répétée — Springsteen chaque fois, jusqu'à ce que mort s'ensuive! — un désir de variété dans l'expérience. Aller zieuter les Spice Girls au Centre Bell le 31 janvier, mettons, histoire de comparer les ravalements de façade. Ou alors fouiner du côté de Mika, au même endroit, le 28 janvier, pour jauger le phénomène pop de l'heure. La Compagnie Créole sur la même scène le 15 février? Faudrait pas exagérer. Autant se taper Céline, les cinq soirs, en août. Pour peu que l'on daigne m'inviter, je suis partant. Je pourrais même être content.

N'empêche qu'en survolant le calendrier des spectacles, mon vieux moi-même frétille là où ça frétille depuis toujours: rock'n'roots, quand tu nous tiens! Avant Springsteen, c'est John Mellencamp — avec Tom Cochrane et Red Rider, au Centre Bell le 1er février — qui s'impose. Même diminué, même vieillissant, Mellencamp, c'est Mellencamp. R.O.C.K. in the USA! Pareillement impossible de passer outre aux vétérans folk-rockeurs de Blue Rodeo, le 31 janvier et le 2 février au Saint-Denis. J'ai aussi méchamment hâte de découvrir en spectacle le duo kitsch'n'cool Dean & Britta, avec Keren Ann le 8 février au Cabaret du Musée Juste pour rire. Et clapote dans mon jus à l'idée qu'Eleni Mandell revient au Lion d'Or le 28 février. Et n'en revient pas que, la veille de Springsteen, il y a Steve Earle à l'Outremont. C'est presque trop. Après Springsteen, pour l'enthousiasme, ce sera plus ardu. Il va me falloir deux bonnes semaines pour décanter le meilleur show rock'n'roll au monde. Minimum. Tant pis pour les Hives, Josh Ritter, Sum 41 et les Foo Fighters, tous programmés dans l'ombre de l'après-Bruce. Je serai sans doute remis à temps pour le cultissime duo pop-de-garage The Raveonnettes, le 22 mars. Et tout à fait ravi de retrouver le génial Joe Jackson au Métropolis le 2 avril. Et Cohen? Le magnifique Leonard en tournée, pour la première fois en 15 ans, à Montréal on ne sait pas encore quand? N'importe quand, on sera là, religieusement.

Et Anne Murray au Saint-Denis le 20 avril, ça vous excite? Difficile d'être excité à l'idée de revoir Anne Murray. Soirée de qualité en perspective, néanmoins. Six jours plus tard, c'est ce bon gourou barbu de Richie Havens qui grattera frénétiquement sa sèche à l'Oscar Peterson Concert Hall. Effluves de Woodstock: autre survivant, Carlos Santana fera encore l'amour avec son Ibanez le 15 avril au Centre Bell. Qui d'autre nous gratifiera d'une visite? Des tas d'autres. Il est quand même fascinant de penser que nous vivons dans une ville où, dans les mois qui viennent, se produiront concurremment les Jane Birkin, Michel Fugain et Spaghetti Western Orchestra (tous dans le cadre du festival Montréal en lumière), ainsi que les Michael Bublé, Thomas Fersen, Henry Rollins, James Blunt, André Rieu, Linkin Park, les Gypsy Kings, Ministry, Moustaki, The Cure, Avril Lavigne et... Michel Louvain.

L'apothéose Louvain

Oui, Michel Louvain. Première idole de la chanson populaire d'ici, Michel Louvain s'offrira en bouquet final de la tournée de ses 50 ans de carrière la totale au Centre Bell ce printemps, le 1er juin très exactement, avec danseurs et escalier géant: nous y serons, pétris d'admiration. Je le dis sans ironie aucune, c'est l'événement de la saison locale. Plus événementiel que les rentrées de Jorane, de Kaïn, d'Alfa Rococo, de Laurence Jalbert, de Sylvain Cossette (avec son show 70's) et même d'Isabelle Boulay, plus fort encore que la grosse bringue de Louis-José Houde au même Centre Bell, aussi spécial que les soirées intimes de Daniel Bélanger au Monument-National (les 8 et 9 février). Pour Louvain, ce n'est pas une rentrée, c'est l'apothéose.

On ne sera pas moins heureux de retrouver Clémence DesRochers sur les planches du Gesù, lundi et mardi prochains (plus quelques soirs en avril): l'alerte de santé passée, le spectacle prévu à l'automne aura enfin lieu, et la septuagénaire jeune fille nous servira ses «classiques», en compagnie de l'estimable Steve Normandin. Là-dessus, à vos billetteries.

Collaborateur du Devoir

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